Donnée pour disparue après un accident, Aya devient Aïcha. Séduisante idée de départ pour l’histoire d’une renaissance dans la très phallocrate Tunisie. Mais pourquoi donc le scénario, résolument intrusif, prive-t-il également son héroïne de sa liberté d’action ?
Difficile de partager l’enthousiasme soulevé en Tchéquie par ce flash-back de la répression du printemps de Prague. De l’abnégation d’une bande de résistants inventifs aux clins d’œil à l’actualité ukrainienne, tout ici est joué d’avance, figé sous un glacis des plus académiques.
Malgré ce bel enjeu, le film s’embourbe dans un suspense fichtrement mal dosé et taille ses personnages à la serpe. Même Marina Foïs, dans la peau d’une vulcanologue inquiète, semble un peu perdue.
Sans concession aucune à la modernité, « Vermiglio », lion d’argent à la Mostra de Venise 2024, se mérite, mais sous son austérité de façade bat un cœur grand.
A cela s’ajoute Jean-Pascal Zadi, bon pro sur lequel le cinéma français s’appuie à raison, une fois de plus : son art exquis du relâchement, sa capacité à incarner de film en film la précarité dans la bonne humeur en font une tête d’affiche solide et précieuse.
Western, comédie, suspense, drame… Tout est déjà en germe dans ces plans-séquences de 50 secondes qui saisissent la réalité de l’époque et la mettent parfois en scène avec une innocence – la beauté des premières fois – par nature inégalable.
Repoussant sans cesse les attaques d’une tristesse tapie dans l’ombre (elle n’a pas sa place chez nous ! affirme la mamie), Baier orchestre une mise en scène respirant à pleins poumons l’esprit effronté, pop et graphique de son époque. Ses trouvailles visuelles ne sont jamais de simples gimmicks tape-à-l’œil.
Dans cette fiction complice du désespoir de ses héros, ce jeu des contraires synergique et habilement orchestré se voit servi par deux comédiens remarquables.
Pour son premier long-métrage, un drame en huis clos, le petit-fils d’Ingmar Bergman et de Liv Ullmann démontre une virtuosité indéniable de mise en scène qu’il surenchérit par de très voyants effets stylistiques. Au fur et à mesure qu’il marque ainsi son territoire, le sujet s’étiole.
Malgré des fulgurances – un suicide sublimement suggéré – et la cinégénie folle de Celeste Dalla Porta, la fable baroque tourne à vide et le temps paraît long, très long.
Couplés aux images de vidéosurveillance qui saisissent le cadre du crime et le témoignage hallucinant d’un témoin clé, ces enregistrements recontextualisent ce cauchemar personnel avec une précision inouïe, de même qu’ils dessinent un portrait de femme sensible dont la combativité l’emporte d’un cheveu sur ses vicissitudes.
Un exercice de style un peu vain mais joliment troussé sur le retour du refoulé chez des agents du MI6 en couple, prétexte à filmer Michael Fassbender, Cate Blanchett et leurs jeunes partenaires dans une série de joutes dialoguées, pleines de sous-entendus sexuels.
Nul happy ending à la fin de la séance, un petit ventre mou dans la deuxième moitié, mais pour un premier rendez-vous avec une autrice à suivre, ce « Blue Sun Palace » mérite le détour.
On aurait envie de l’accompagner dans cette comédie policière de réconciliation atrabilaire entre un père égotiste et égyptologue (Fabrice Luchini en roue plus que libre) et une fille (Julie Piaton, un peu trop sage) ne lui ayant jamais pardonné ses absences. Le tout sur fond d’intrigue à la Tintin, de quête au trésor, de malfrats inquiétants, d’énigmes historiques et d’escape game.
A travers le portrait d’une jeune femme et de sa culpabilité à « trahir » l’héritage culinaire de sa mère, le cinéaste dit dans un joli éclat de rire queer le cloisonnement des communautés racisées.
Le problème, ici, est que tout est joué d’avance et que le film, plombé par une gravité de petit séminariste, se borne à touiller un mystère éventé, jusqu’à flirter avec le grotesque (le dernier quart d’heure, passablement gratiné). Moralité : trop de système tue « le Système ».
Ce film bourrasque, échevelé et bouleversant fait un bien fou, tout particulièrement en ces temps de retour express d’une morale putride. Vive Peaches !
La lumière pointe, pourtant, dans ce film féministe et nuancé récompensé l’an dernier à Cannes par l’Œil d’or du meilleur documentaire, où un père aimant incite sa fille à réfléchir : le divorce n’est pas permis, il y a tant d’unions ratées. Et où une génération de gamines se tiennent, en réserve, prêtes à succéder à leurs aînées.