Par où commencer ? Eh bien allons au plus simple et laissons Lucy faire. Alors, on débute par une division cellulaire, puis nous atterrissons en pleine préhistoire nez à nez avec un cousin australopithèque qui s'abreuve. Une voix-off débarque, histoire de nous mettre face a l'interrogation ultime, le but de l'existence. Et pif-paf-pouf, nous voilà téléportés en Corée à l'époque contemporaine. À peine le temps de présenter...Non, en fait pas de présentations, la charmante Lucy est manipulée pour remettre une mallette contenant une chose qu'elle doit remettre à quelqu'un, le tout parsemé d'images échappées d'un National Geographic consacré à la chasse à l'antilope (véridique). Il apparait que ledit monsieur est un coréen plutôt pas gentil cherchant à écouler le stock d'une nouvelle drogue qui permet de déverrouiller le cerveau humain pour lui faire atteindre son plein potentiel. Par la suite, des cartons vous indiqueront à quel pourcentage en est rendue l'héroïne (le personnage, pas la came). Tout cela vous semble grotesque ? Vous êtes encore si loin du compte...
Je ne vous décrirai pas la suite. D'une, pour préserver la surprise. Deux, parce que j'ai encore du mal à y croire moi-même. Pas que le film devienne confus, loin de là. Mais il va tellement loin dans son délire que le point de non-retour devient un simple arrêt sur la route de la mort cérébrale. Rien à voir avec le pitch, qu'il soit invalide est bien la dernière chose qui nous intéresse. Le problème, c'est que Luc Besson n'a rien trouvé de mieux pour donner naissance à sa super-héroïne. Parce que c'est vrai qu'avec des fonctions cérébrales renforcées, on peut contrôler le corps d'autrui, les balles, les réseaux, la vie, l'espace, la gravité, l'univers,...Supporter la disette scénaristique et les innombrables facilités qu'elle implique, c'est déjà dur. Alors imaginez qu'en contrepartie, le réalisateur se lâche complètement la bride sur la narration. En gros, une marmite dans laquelle vous jetez des bouts de 2001 : L'Odyssée de l'Espace, de Matrix, de Terrence Malick, des cours de neurosciences pour gros nuls, vous saupoudrez le tout avec du Besson et vous faîtes bouillir. On obtient donc un melting-pot dégénéré, avec des personnages tous plus vides les uns que les autres, des rebondissements aberrants et une philosophie de piliers de comptoir. Vous vouliez de l'action ? Eh bien même là vous serez déçus, Lucy pêchant par flemmardise avec des combats expédiés en troisième vitesse et franchement laids. Je ne m'étendrai pas sur la traversée de Paris en voiture, pas loin d'être illisible et agrémentée d'effets visuels gênants.
Scarlett Johansson et Morgan Freeman ont l'air complètement paumés, et je les comprends. Comment suivre un spectacle fonçant tête baissée sur les routes du nanar, comme un pet sur une toile cirée ? Dans ses 15 dernières minutes, on arrive à un tel point de fusion que Lucy devient autre chose. Un objet impossible à définir bien que les qualificatifs ne manquent pas. Heureusement, dans sa grande sagesse, Luc Besson nous sort de l'impasse avec un énième, dernier et peut-être le plus bel éclat de rire de la séance. Ouf, juste un ratage intégral mais terriblement drôle.