Le réalisateur a, assez courageusement, voulu relever le défi du réalisme, en enfermant quasiment tout du long le film et les personnages dans les quatre coudées de leur réclusion. L’aporie d’une telle tentative est dramaturgique : comment filmer la pure attente ? Et aussi bien mathématique : comment exprimer sept cents jours d’une telle macération en une heure trente de représentation ?
Si le film parvient parfois à tirer profit de son décor singulier, le pont du cargo encombré de gigantesques caisses en acier formant un labyrinthe que l’on croirait sans issue, il sombre vite dans une sorte de questionnement métaphysique pompier.
Si les intrigues de pouvoir rappelant Game of Thrones permettent à Wuershan d’explorer les thématiques de la justice et du sacrifice, on retient surtout ici la dimension épique des batailles servie par des nombreux effets spéciaux et quelques idées visuelles ingénieuses.
On reprochera toutefois au film de s’en tenir à une conception un peu trop littérale de ce qu’est un film politique : soit une envie d’édifier le spectateur, de nommer l’ennemi (le capitalisme), mais sans que rien ne passe jamais par une révolution de la forme ou un dynamitage des conventions scénaristiques.
Mais le dispositif du tournage perturbe l’ensemble et vient écorner le charme du duo. Ce qui se présentait comme une affaire spontanée et un tête-à-tête peu aguerri aux performances sportives s’avère techniquement et narrativement fort encadré.
Si le documentaire a des allures de success-story aseptisée, les prestations live qui restituent la puissance de feu du quatuor valent le coup d’oreille.
Le documentaire s’attache aussi brillamment à décrypter la qualité cinématographique des toiles. Le sens de la composition du maître, sa manière de jouer avec les regards, pour mieux les décaler et nous interroger.
A partir de son trio de personnages que l’on observe, dans un premier temps, seuls et hantés par la tristesse, le temps de quelques séquences émouvantes presque sans paroles, le réalisateur bâtit ensuite un voyage métaphysique vers une forme d’apaisement. Eric Khoo ambitionne de reconnecter tout ce qui a été séparé.
Tout le film est là, dans ce télescopage du vécu, entre instants minables et sublimes, avec lesquels la réalisatrice s’est construite. A sa manière, Maman déchire, film d’archives kaléidoscopique, est plein d’amour.
Il en résulte un film sur le fil, drôle et émouvant à la fois, tourné sur les lieux, à flot continu de Frédéric Chopin, sans céder pour autant sur la part de tragique. A Real Pain est une interrogation sur la double distance qui sépare, autour de la Shoah, les juifs américains des juifs européens.
Adaptation d’un roman de William S. Burroughs, le film est d’une extrême fidélité à son matériau original pour les deux premiers tiers, puis en étoffe considérablement la dernière partie, située au cœur de l’Amazonie.
Servi par ses couleurs chaleureuses, ce film d’animation, qui célèbre l’amitié et le pouvoir de la transmission, se démarque par sa vision très technophile du futur. Un émerveillement que viennent écorner des dialogues explicatifs et un récit qui tire un peu trop en longueur.
L’artiste britannique mourut d’une overdose en 1969, peu de temps après avoir été exclu du groupe. On aime assez l’idée que Brian, dégoûté des Stones, avait fini par passer ses journées à écouter les Beatles. On peut ainsi tout perdre, et rester un homme de goût.
It’s Okay ! balance entre moments légers et passages à vide, comme un précipité des contradictions propres à l’âge de son héroïne. Si certains développements semblent balisés, le film se démarque par une mise en scène dynamique et des personnages attachants, à même de séduire un public adolescent.
Avec une mise en scène digne d’une dramatique télé où tout le monde rit trop bruyamment et un casting autrichien qui ne se signale ni par son charisme ni par sa vraisemblance, La Fabrique du mensonge part à cet égard avec un gros handicap… que le film, contre toute attente, rattrape par un dispositif assez massif d’usage des archives.
Nous n’en dirons pas plus de ce film habilement écrit, auquel il manquera le vertige de l’incarnation et le sens de la mise en scène pour se hisser à la hauteur du modèle chabrolien qui est le sien.
Sous nos yeux, le film expérimente sa propre liberté, s’ouvre comme une récréation où se documente cette belle et douloureuse complicité qui lie les deux sœurs et son duo d’actrices. On regrettera toutefois que l’étrangeté, comme cultivée sous serre, frise trop souvent l’affectation, et culmine dans une issue qui se laisse un peu trop prévoir.
Avec ce quatrième long-métrage, le réalisateur Runar Runarsson reste fidèle à une esthétique – il tourne ses films en décor naturel, en un 16 mm dont il apprécie la sensibilité – autant qu’à une éthique : rendre compte, par les moyens du cinéma, de la complexité de l’expérience humaine.
Le film tout entier, stylistiquement rivé sur le flux nerveux de Jamel Debbouze, se déduit de cette épure, jusqu’au compte à rebours plein écran qui indique les chances progressivement amenuisées de Driss de se sortir indemne de cette sombre histoire.