Etant fan et jouant moi-même d'un instrument, je voulais regarder "Whiplash". De plus, les critiques élogieuses m'avaient vraiment convaincu. C'est donc hier soir que je l'ai visionné. Je l'ai trouvé formidable sur le coup. Et avec du recul et la nuit pour y penser, je peux affirmer mon avis : "Whiplash" est un grand film.
Damien Chazelle, qui avait d'abor réalisé un court-métrage de son histoire, livre cette fois-ci une œuvre primée au festival du film américain de Deauville 2014, et nommée aux Oscars. Le réalisateur met en scène un film fort, prenant, poignant et diablement intense. La dramaturgie du récit est une montée en puissance, rendue encore plus extraordinaire par les acteurs. Furieusement jouissif et rythmé, "Whiplash" est certes doté d'un faible budget, et d'une durée de tournage de 19 jours ; mais le résultat est resplendissant, exceptionnel. On ne peut tout d'abord pas nier la qualité scénaristique du film.
L'histoire est passionnante à suivre, et nous présente des personnages forts. Andrew Liman, jeune musicien de 19 ans, est le protagoniste. Sa quête, sa recherche de l'excellence nous prend aux tripes du début à la fin, sans longueurs. Il se déchire, se meurtri pour sa batterie ; les larmes et le sang coulent ensemble. Cela à cause de son professeur tyrannique. Celui-ci est une enflure, un enfoiré que l'on ne peut que haïr face à ses méthodes de travail. Il incarne à lui seul la quintessence du Détestable. Toutefois, il se montre efficace dans l'apprentissage d'Andrew. Il le pousse à se surpasser, à LE surpasser ! Miles Teller, que j'ai découvert dans "The Spectacular Now", et le pétard mouillé qu'est "Les 4 Fantastiques", incarne ce jeune homme à la perfection. Jouant dans sa vie privée de la batterie, il est poussé ici à reprendre ce loisir. Ses solos, sa maitrise de l'instrument est remarquable. Rarement j'ai vu des personnes jouer aussi bien. Les morceaux de jazz qu'il joue sont splendides, magnifiques ; le groupe qui l'accompagne contribue aussi à cette réussite auditive. Quant à J.K. Simmons ("Spider-Man"), il bluffe. Tout simplement phénoménal. Terrifiant et redoutable, il incarne ce professeur d'un conservatoire avec une animosité fabuleuse, sortant des répliques avec un vocabulaire bien précis. Ce duo ennemi, ce duel implacable est parfaitement bien retranscrit à l'écran ; grâce à une complicité entre les deux acteurs, et à la mise en scène réussie. Les thématiques, les sujets traités sont abordés de façon subtile, et sont superbement retranscrits.
Damien Chazelle maitrise son long-métrage de bout en bout. Le suspens qu'il distille le long de son histoire se montre superbement bien construit. Avec des séquences chocs, telles celle où le professeur cherche le meilleur batteur parmi 3, ou encore le concert final ; il ponctue son œuvre de scènes dramatiques mais aussi anxiogènes, voire insupportables. L'intensité génère un stress haletant, épuisant le spectateur. Le réalisateur fait suer ceux qui regarde son métrage, comme J.K.S. fait suer son élève. L'engouement autour de ce film est vérifié, vrai, et mérité. Groovy et jazzy, "Whiplash" est une perle, un film coup de poing à la bande sonore très bonne. La réalisation est quant à elle tout aussi splendide et maitrisée. Les plans sont beaux, les cadrages millimétrés, la photographie magnifique grâce à des couleurs dorés et sombres et le montage parfaitement construit et orchestré. Enchainements rapides de percussions, instruments et partitions, les concerts nous plongent dans une ambiance prenante et encore plus rythmée. Les gros plans, inserts et tournements de cadres, accentuent notre ressenti envers l'énergie dépensée des musiciens. Fatiguant et éprouvant, ces concerts et répétitions sont filmées magistralement. L'impression de n'utiliser que des superlatifs m'envahit en cet instant d'écriture, mais je n'ai rien de négatifs, rien à reprocher à ce film, si ce n'est sa longueur : j'aurai préféré poursuivre encore cette confrontation ! "Whiplash" est un pur chef d'œuvre ; une œuvre d'art grandiose sur la musique et l'ambition qu'il faut vraiment regarder.