Suite au huis clos de «Panic Room» (USA, 2002) où chaque figure du suspense tenait son rôle dans la machine de l’angoisse, David Fincher élargie ses horizons et, dans «Zodiac» (USA, 2007), redonne au slasher movie son véritable enjeu : faire de la figure du Mal une entité impersonnelle dont la menace pèse sur tous. Le tueur en série possède un corps, nous en apercevons la silhouette dès les premières minutes, mais son visage véritable nous reste inconnu. En ne personnifiant pas son criminel, en incrustant sa face dans l’ombre, Fincher rend au Mal sa véritable forme, celle absente et indicible qui installe une pression constante sur le quotidien. Par le même procédé, le cinéaste offre un reflet à «Seven». Le film de 1996 et son compte à rebours criminel rendait le dévoilement du meurtrier inéluctable. «Zodiac» offre à voir la quête même, la chasse vaine du Mal. La seule image identitaire du meurtrier en série est caractérisée par la voiture, instrument récurent de ses meurtres. Etrange coïncidence avec le film «Deathproof-Grindhouse» de Tarantino. Cette incarnation maléfique par l’objet finit de rendre la terreur sans visage. Et la terreur sans visage est en définitive ce qui menace les Etats-Unis et le monde. La réussite de «Zodiac» est de mener à bien l’opération d’abstraction des frontières. Le pouvoir n’est plus aux seules mains de la police, elles se décentrent jusqu’en pouvoir de la presse. Car c’est, in fine, un dessinateur-journaliste qui se plongera dans les turpitudes de l’enquête, dans les méandres du code à déchiffrer pour révéler l’identité du tueur. Cette abolition des frontières, cette démocratisation des pouvoirs, cette globalisation de la terreur fait de «Zodiac» un curieux reflet du monde du XXI° siècle par les années 70-80. Les aspects du reflet prennent l’allure classique d’un film américain à l’heure où Hollywood nécessite un renouvellement de ses formes. Mais le slasher, avec «Zodiac» n’a jamais été aussi ad hoc au monde.