A l’instar d’une œuvre ponctuée de grands films (L’Anglais, Kafka, A fleur de peau, Erin Brockovich), de films mineurs (The Good German, Solaris, Magic Mike, The Informant), de fascinants ovnis (Sexe, mensonges & vidéo, Bubble, King of the hill, Girlfriend experience), d’excellents films de studios (Hors d’atteinte, Ocean’s eleven, Traffic) et de gros ratages (Contagion, Full Frontal, Ocean twelve, le Che), Soderbegh clôt officiellement sa carrière avec un film inégal : une première partie formidable et une seconde poussive. La première heure réunit le meilleur du cinéaste : intelligence de la dramaturgie (un palpitant thriller médical qui se teinte peu à peu d’ambiguïté tandis que le personnage principal s’enfonce dans la paranoïa – ou comment la quête de vérité s’ouvre sur un abîme sans fond), brio de la mise en scène (incroyable capacité de rendre le quotidien anxiogène, ambiguïté diabolique du point de vue, tentation de l’abstraction qui se mêle heureusement avec une observation aigüe du réel) et une direction d’acteur au cordeau (Jude Law n’a pas été aussi bon depuis longtemps). Bref, l’état de grâce ! Et voilà que la deuxième heure vient ruiner ce bel édifice : l’histoire vire au pâle thriller hitchcockien, se dévitalisant peu à peu de tous les palpitants enjeux humains et dramatiques de la première partie. Comme si le cinéaste saccageait tout le potentiel de son film pour finit sur une improbable et bien pauvre histoire de vengeance (seul le machiavélisme froid du héros, malheureusement sous-exploité, vient troubler le ronronnement d’une machine qui tourne à vide). Alors on se dit que, oui, effectivement, Soderbergh a bien besoin de faire un break. Mais qu’il va vite nous manquer…