Le nom de Steven Spielberg est rarement associable au terme de polémique. Et pourtant, en 2005, en choisissant le sujet brûlant du conflit israélo-palestinien, il était inévitable qu’il soit au cœur de critiques.
Taxé à la fois d’antipalestinien en France (malgré la présence de la palestinienne Hiam Abbass) et d’antisémite aux États-Unis et en Israël (alors que Spielberg, Mathieu Kassovitz ou Yvan Attal sont juifs et qu'Igal Naor est israélien), Munich est un film qui peut déstabiliser car il ne prend pas réellement partie pour l’un ou l’autre camp. En effet, il arrive à montrer les raisons des uns et des autres
(la séquence de discussion entre Avner et Ali permet de montrer que tout n’est pas noir ou blanc)
et le fait que le milieu des services secrets n’amène qu’à la violence (remettant en cause le principe de la vengeance systématique de l’état israélien) et la paranoïa. Spielberg signe une œuvre atypique dans son œuvre car cette dernière laisse habituellement pointer une lueur d’espoir même dans ses films les plus sombres alors qu’ici il n’y en a aucune. On se croirait presque face à une œuvre faite pour un cinéaste comme Costa-Gavras que pour Spielberg.
Pourtant, le cinéaste fait preuve une fois de plus de maestria dans sa mise en scène même si celle-ci semble apriori plus discrète étant clairement inspiré du cinéma des années 70. Il suffit d'analyser certaines séquences pour constater que cette simplicité n’est qu’une apparence et que le réalisateur offre, comme presque toujours, un travail sans faille (la scène de l’attentat contre Mahmoud Hamchari, avec le suspense autour de sa fille, est une vraie leçon de cinéma).
En outre, on ne peut que saluer la sublime musique de John Williams et l’impeccable interprétation d’un casting international : on y trouve des comédiens venant d’Australie (Eric Bana, Geoffrey Rush), de Grande-Bretagne (Daniel Craig, Michael Lonsdale), d’Irlande (Ciarán Hinds), de France (Mathieu Kassovitz, Michael Lonsdale à nouveau, Mathieu Amalric, Yvan Attal, Valeria Bruni-Tedeschi), d’Allemagne (Hans Zischler, Moiritz Bleibtreu), du Canada (Marie-Josée Croze), d’Israel (Igal Naor), de Palestine (Hiam Abbass)…
Ainsi, si les esprits chagrins pourront peut-être lui reprocher certaines facilités (le choix d’utiliser la Tour Eiffel pour indiquer l’arrivée de l’action à Paris ou le fait que les personnages parlent anglais et non hébreu la majorité du temps), Munich reste une œuvre forte évitant le manichéisme et étonnamment pessimiste de la part d’un auteur qui prouve qu’il peut se renouveler tout en conservant son génie créatif. Une fois de plus, une grande œuvre de la part de Steven Spielberg !