Avec Rodin, Jacques Doillon développe un tout nouveau concept cinématographique, le biopic sans histoire. Pas de début, pas d'élément déclencheur, pas de temps fort, pas d'objectif, pas d'action, pas de personnage, pas de drame, pas de fin, bref, aucun argument pour justifier l'existence d'un film, encore moins sur le père de la sculpture moderne. Rodin n'est qu'un long étalage de séquences vides consistant à faire tourner Vincent Lindon et Izïa Higelin en rond dans un atelier avec, éventuellement, des scènes de sculpture. Et comme il n'y a pas d'histoire, il n'y a pas non plus de direction. Aucun acteur n'articule, leur diction incompréhensible accentue encore plus la sensation d'assister à du néant. Autant que le film, leurs expressions sont figées, y compris quand il daigne enfin montrer un semblant de conflit au bout d'une heure de brassage d'air. Quel est le sujet ? Qu'est-ce qui faisait de Rodin un sculpteur aussi avant-gardiste ? Pourquoi raconter ça ? Et surtout, pourquoi lui ? Doillon pouvait prendre la vie de n'importe qui d'autre pour arriver à un résultat aussi lisse. Mieux, il pouvait en faire un film original sans avoir à impliquer des artistes qui ont suffisamment investis dans leurs vies pour éviter qu'on leur fasse l'affront de les adapter en exercice aussi pitoyablement apathique. Un somnifère surpuissant.