Une expérience de cinéma épuisante surtout quand on a passé une journée assez harassante.
En soi, j’étais dans les conditions de ces personnages que l’on découvre serpentant depuis des jours sur des sentiers étroits et abrupts : déjà bien fatigué !
Ainsi, Werner Herzog nous plonge dans le vif du sujet avec ces hommes constitués de soldats, encombrés de canons et de leurs armes ; de guides locaux et d’esclaves portant des objets divers comme une statue sainte, et de deux femmes.
Une caméra qui saisit de très près Aguirre (Klaus Kinski) pour déceler une folie qui monte lentement crescendo.
Pour tenter de repérer des indigènes qui se confondent dans une forêt dense et verdoyante qui longe des fleuves tourmentés sur lesquels des conquistadors tentent de dompter sur des radeaux de fortune. En vain.
Et la forêt et les fleuves et les indigènes invisibles auront raison d’Aguirre et de ses hommes.
La caméra de Werner Herzog saisit la pesanteur de cette expédition rongée par la faim, la soif, le doute, les illusions de trouver un El Dorado, l’abandon, le désespoir et la folie.
Enfin par moments, cette caméra a les accents du documentaire avec ces gouttes de pluies qui la picotent, difficile de l’oublier.
Caméra qui se fait indiscrète quand elle vient troubler la solitude d’Inez (Helena Rojo), le regard perdu, vêtue de ses dessous blancs ; soudain, celle-ci fixe la caméra à son tour comme pour lui dire qu’elle ne va pas tarder à rejoindre la troupe : celle des personnages ou celle de l’équipe du film ?
Caméra embarquée sur un des radeaux de fortune, elle s’immisce au-dessus des épaules pour capter l’attention soutenue de ces hommes malmenés par un fleuve démonté.
Franchement, je ne m’attendais pas à ce scénario. Je pensais à quelque chose de plus épique, de plus enlevé. « Aguirre, la colère de Dieu » n’est pas un film d’action, c’est un récit contemplatif actif ! Cette pesanteur m’a captivé et non rebuté. J’étais aussi concentré que ces hommes chargés de maintenir stable leur radeau sur des eaux agitées.
Ravi d’avoir enfin vu ce film du patrimoine mondial.