L’intime conviction
Après son incursion du côté du tour de chant, Daniel Auteuil revient au cinéma, derrière et devant la caméra, pour notre plus grand plaisir, parce que ces 115 minutes de film de prétoire ressemblent fort à ce qu’il a fait de meilleur depuis longtemps. Depuis qu’il a fait innocenter un meurtrier récidiviste, Maître Jean Monier ne prend plus de dossiers criminels. La rencontre avec Nicolas Milik, père de famille accusé du meurtre de sa femme, le touche et fait vaciller ses certitudes. Convaincu de l’innocence de son client, il est prêt à tout pour lui faire gagner son procès aux assises, retrouvant ainsi le sens de sa vocation. Tout en tension, ce film tient en haleine jusqu’au mot FIN. Une fin qui vous laisse pantois et très mal à l’aise.
C’est en parcourant le blog que tenait Jean-Yves Moyart, - surnommé Maître Mô -, que Daniel Auteuil a tout de suite été frappé par la puissance des histoires de vie et de justice qu’il y racontait, mais aussi par sa manière d’exprimer la solitude de l’avocat. Car, au-delà du suspense sur l’innocence ou la culpabilité de l’accusé, c’est bien cette solitude qui constitue le vrai sujet de ce drame. La solitude d’un homme face à son intime conviction, à ses doutes, à ses certitudes, à ces peurs, à lui-même. Face à lui, un homme fragilisé, à la personnalité complexe, de ces gens qui n’ont pas la parole et qui, en l’occurrence, s’en remet à celle d’un autre. Comme je l’ai dit plus haut, c’est un véritable film de prétoire, avec son climat de tension permanent, mais sans jamais pour autant que ce soit spectaculaire. La photographie du belge Jean-François Hesgens, - Un silence, Sage-homme, Les Intranquilles, Continuer…-, nous place au cœur des personnages, dont en ressent le moindre frémissement, au plus près de quelque chose qui nous brûle, qui nous dérange, qui nous gêne. De la belle ouvrage.
Grégory Gadebois, est un immense acteur. Ce n’est pas une découverte. Ici, il excelle dans le rôle de ce père à la fois adulte et enfant. Bouleversant. Daniel Auteuil est parfait de sobriété et nous fait admirablement partagé le combat interne de son personnage. Et puis, quelqu’un qui écoute en boucle Bach et fauré, ne peut être qu’estimable. Le reste de la distribution est également à la hauteur avec Sidse Babett Knudsen, Alice Belaïdi, - totalement à contre emploi -, Gaëtan Roussel, épatant pour sa 1ère au cinéma, et Isabelle Candelier. Un drame judiciaire bouleversant aux allures de thriller aux nombreux rebondissements, un face à face sombre, opaque et troublant. A voir !