Recrutée dans l'anonymat, une équipe de criminels chacun doué en leur catégorie découvre en plein kidnapping de leur cible que celle-ci est Abigail, une fillette passionnée de danse classique. Alors que l'enlèvement semble se dérouler sans encombre et que tous doivent attendre le magot escompté en échange de leur petite captive, Abigail s'apprête à révéler sa vraie nature...
Arf, Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett devraient sérieusement penser à décapiter un ou deux membres des équipes chargées du marketing de leurs films car, après "Wedding Nightmare" auquel "Abigail" fait d'ailleurs souvent référence et pour lequel la bande-annonce en dévoilait déjà trop, celle de ce dernier long-métrage (et même à peu près tout le reste niveau promo, affiches comprises) ne fait guère de mystère sur ce qui se cache réellement derrière les traits innocents d'Abigail. Si le secret de ce twist avait été préservé -et mieux mené au sein même du film (des plans en amont de la révélation sont assez clairs sur cette piste)- il faut bien dire que "Abigail" aurait pu atteindre une toute autre ampleur devant la surprise susceptible d'être provoquée.
Néanmoins, sorti de la panade "Scream 6" (ne criez pas, on avait plutôt apprécié le 5 !), reconnaissons au duo de réalisateurs une envie de mieux faire qu'auparavant, de réparer surtout, comme on l'évoquait plus haut, les erreurs qui avaient fait de "Wedding Nightmare" une petite déception au vu de son potentiel avenant et pouvant se révéler extrêmement jubilatoire via son mélange d'horreur et de comédie noire (résultat: un bon début, une bonne fin et entre... une chasse à la femme parfaitement anecdotique pour caricaturer).
Reprenant le principe du "seule contre tous" au sein d'un presque huis-clos de ce dernier pour ici le transformer en "tous contre elle" à nouveau peuplé de personnages légèrement fracassés du bulbe (mais qui ici tiennent les rôles de proies face à une menace on ne peut plus sérieuse), "Abigail" s'y inscrit donc dans la complète continuité -jusqu'à un joli ultime clin d'œil- et va faire parfois preuve d'une bien meilleure maîtrise en termes de récit même si cela reste encore perfectible.
Couplée au problème du rebondissement majeur connu d'avance, les grandes lignes du film vont ainsi poser la question du "pourquoi ?" de cette réunion de personnages sous le même toit que leur otage et il faut bien avouer que cette inconnue à résoudre ne sera pas son point fort, "Abigail" traînant de la patte sur toutes les séquences s'intéressant à ce mystère pour ne pas proposer grand chose d'extraordinaire derrière (sinon changer sans cesse les rapports de force dans la dernière partie), de même quant à la touche émotionnelle censée être véhiculée par le lien entre les difficultés de l'héroïne et celles d'Abigail qui ne produit au mieux qu'un léger effet (encore une fois dans les ultimes instants).
On passera également sur la répétition à outrance du thème du Lac des Cygnes pour souligner la ballerine passionnée qu'est la petite fille (bonjour la subtilité, on n'en peut plus de la voir danser à un moment) et on préférera féliciter les metteurs en scène d'avoir bien mieux rythmé le spectacle sanguinolent proposé que leur premier film, s'appuyant sur les capacités (certes attendues) de leur prédateur pour créer d'amusants rebondissements et offrir par sa nature et ses conséquences des fulgurances gores ne pouvant que ravir les amateurs du genre.
Enfin, et c'est une de ces qualités les plus notables, on saluera un casting là aussi encore plus abouti que celui de "Wedding Nightmare", réunissant une chouette palette d'acteurs à l'alchimie indéniable et sauvant souvent le film de ses situations et dialogues les plus pauvres, notamment par l'intermédiaire d'un quatuor amené à se démarquer : Melissa Barrera, la Scream girl apporte une réelle plus-value à une héroïne peut-être un peu lisse, Dan Stevens, le comédien est toujours excellent dans tout ce qu'il fait, Kathryn Newton, la jeune actrice paraît vraiment s'épanouir dans ce type de proposition ces dernières années -jusqu'à ici atteindre une espèce de paroxysme en volant la vedette à tout le monde le temps de quelques séquences, vous devinerez vite lesquelles- et l'éternel second rôle musclé Kevin Durand, parfait en adepte neneu du culturisme. Ce qui est sans doute une des dernières apparitions d'Angus Cloud (auquel le film est dédié) récoltera moins nos louanges, une impression de voir une version bavarde et stupide de l'éternel Fezco de la série "Euphoria" qu'il restera, tout comme la présence d'un Giancarlo Esposito hélas totalement sous-exploité.
Bref, parfois trop long et maladroit dans ce qu'il pourrait être susceptible de proposer pour pouvoir définitivement remporter la mise, "Abigail" est encore un divertissement quelque peu imparfait du duo Matt Bettinelli-Olpin/Tyler Gillett... mais qui tend vraiment à prouver qu'ils ont les capacités pour s'améliorer sur certains points dont ils paraissent avoir conscience. En l'état, ce séjour forcé en compagnie d'"Abigail" reste très recommandable et on croise les pieux pour que le prochain soit encore mieux. Peut-être se pourrait-il que ce soit "Wedding Nightmare 2" officiellement annoncé, qui sait ?