Albert (Pio Marmaï) et Bruno (Jonathan Cohen) ont les poches trouées, des dettes en pagaille et une montagne de problèmes que leur inépuisable jovialité ne suffit plus à régler. Leur chemin croise par hasard celui de Cactus (Noémie Merlant). À la tête d'une bande de jeunes activistes écolos, elle multiplie les coups de force pour sensibiliser l'opinion publique aux dangers de la surconsommation et du dérèglement climatique. Autant de préoccupations qui a priori n'émeuvent guère les deux trentenaires goguenards.
Le duo le plus successful du cinéma français est de retour. Après "Intouchables", "Le Sens de la fête" et "Hors normes", il signe une nouvelle comédie qui, comme les précédentes, prend le parti du rire pour traiter d'un sujet sérieux. Un sujet ou plutôt deux ici qu'il percute : la fin du mois et la fin du monde.
Cette percussion, qui recoupe un fossé entre deux générations, celle des millenials et de la génération X, est intelligente car les deux sujets peuvent s'opposer : peut-on "en même temps" lutter contre la fin du monde, en réformant nos modes de consommation, sans mettre en péril la fin du mois ? Ou pour le dire autrement, l'éco-anxiété est-elle un luxe d'enfants de riches, qui ont les moyens d'acheter bio, alors que les masses prolétaires ont d'autres priorités hélas plus urgentes à traiter avant de se soucier de ces questions de long terme ? Le sujet opposerait donc non seulement les générations mais aussi les classes sociales.
Ces questions sont passionnantes. Toledano & Nakache le savent mais choisissent de ne pas les traiter de front, de peur de lester leur film de trop de gravité. Ils font le choix revendiqué de la légèreté, de l'humour, de la blagounette sinon du cabotinage. Ils sont tellement doués dans leur écriture qu'ils s'en sortent haut la main. Ils sont considérablement aidés par les incroyables show-men que sont Pio Marmaï et Jonathan Cohen, dont on se demande comment ils ont réussi à tourner certaines scènes en gardant leur sérieux.
Dès la première, on est happé. Je me souviens de la première scène de "Hors normes" qui avait, avec la même efficacité, réussi à me scotcher. Jusqu'à la dernière, sacrément bluffante, dont on se demande avec quel artifice elle a été tournée (la réponse est : à 6 heures du matin), on est conquis. On passe un excellent moment. Et on applaudit à tout rompre au générique de fin.
Mais, avec le recul, quand on a laissé le film infuser, on modère son enthousiasme. On le trouve moins convaincant. On reproche aux réalisateurs une certaine lâcheté, sinon de l'hypocrisie, à vouloir traiter ces sujets brûlants sans vouloir trop se mouiller. Pour être tout à fait honnête, on leur aurait aussi peut-être reproché leur militantisme s'ils avaient pris un parti trop affirmé. Si l'on était militant, on pourrait même trouver blessante la façon dont ils se moquent des jeunes écolos du film. Un peu comme à Thomas Lilti dans son dernier film sur l'Education nationale, on fait grief à ces deux réalisateurs sacrément roués d'avoir appliqué la même recette que celle qui avait fait précédemment leur succès.