Training Day
Un film d’Antoine Fuqua
D’ordinaire habitué aux films d’action plutôt linéaires, Antoine Fuqua signe ici un polar sombre au rythme effréné. L’histoire se déroule sur une petite journée, même pas une vingtaine d’heures.
Mais cette journée appartient à une espèce bien particulière, celle des journées dont on se dit qu’elles ne finiront jamais, et que si elles doivent finir on n’ose imaginer la manière dont elles le feront. Cette journée marque les premiers pas de Hoyt, jeune flic ambitieux, au sein de la brigade des stupéfiants. Hoyt éprouve le besoin impérieux de servir la société en mettant sous les verrous le maximum de criminels, en particulier si ceux-ci ont un rapport avec les circuits de distribution de la drogue. Une volonté louable en somme, mais qui se ternira sous le poids des compromissions auxquelles il faudra se plier afin d’y parvenir.
Hoyt rencontrera Alonzo, patron d’une unité de cinq officiers des stupéfiants, et effectuera sa première journée d’évaluation (d’où le titre) sous sa houlette. Alonzo exploitera une personnalité alternativement écrasante et doucereuse, manipulatrice, afin de séduire le « stagiaire ». Car le but d’Alonzo est de corrompre le nouveau, de le convertir à ses méthodes pour en faire son double.
Dans cet échange entre le mentor et son apprenti, chacun dévoilera des ressources cachées avant de se retrouver face à face dans un affrontement sans merci.
Dans le rôle de Hoyt, Ethan Hawke exprime toute la gamme d’émotions par laquelle passe un jeune policier avide de promotion, un jeune policier qui veut surtout se sentir utile en améliorant le quotidien de ses concitoyens. Tour à tour étonné, exalté, découragé, apathique, puis vindicatif, il finira par se rendre compte du fossé existant entre les préceptes inculqués à l’Académie de Police et la manière de les appliquer –ou ne pas les appliquer- dans le milieu de la jungle urbaine.
Pour incarner le mentor, Alonzo, Antoine Fuqua a choisi le comédien noir Denzel Washington. Evoluant dans un registre qui lui est plutôt inhabituel, celui-ci donne la répartie à un Ethan Hawke bien propre sur lui. A travers le comportement excessif, voire caricatural, d’Alonzo, et les hésitations de la nouvelle recrue, le spectateur a vite fait de comprendre qu’il n’assistera pas à un de ces tandems blanc-noir pour le meilleur et pour le rire. Le récit est noir et l’ambiance oppressante. Les premières notes d’une musique feutrée, suggestive sont là pour nous prévenir. On se demande rapidement où le personnage de Denzel Washington veut en venir ; la réponse à cette question viendra progressivement, insidieusement et fort habilement.
C’est justement dans cette montée progressive de la tension que des scènes décalées telle celle de la partie de poker prennent tout leur relief, pour composer un film étouffant et réussi.