En deux mots: grosse déception. Certes, il y a évidemment beaucoup de virtuosité chez Paul Thomas Anderson (mais on est loin de Magnolia....) et de talent chez Daniel Day-Lewis (mais on est loin de There will be blood...), qui semblent l'un et l'autre loin de leurs univers pour se livrer à un exercice de style qui devient vite rasoir.
Reynolds Woodcock est un grand couturier dans le Londres des années 50, avant que la haute couture ne devienne médiatisée et mondialisée, lorsque les mannequins défilaient dans des salons feutrés devant un aréopage de clientes titrées assises sur des chaises Louis XV. Oui, la reconstitution est magnifique -mais on s'en fiche un peu. Oui, le défilé de trognes des riches clientes est rigolo -mais on s'en lasse. Oui, l'étalage des toilettes pompeuses et lourdingues comme on les aimait à l'époque a quelque chose d'une reconstitution muséale -mais dans l'ensemble elles sont moches.
En le voyant se préparer, très dandy scrupuleux, on pense évidemment à un Karl Lagerfeld qui n'aurait pas de Choupette, mais une Cyril (Lesley Manville), soeur envahissante mais indispensable, vestale du culte de Reynolds, barrière contre le monde extérieur, qui le défend contre, par exemple une compagne qui oserait faire du bruit en beurrant sa biscotte matutinale au risque de troubler la méditation du grand homme et de gâcher sans doute sa journée! Le portrait de ce vieux petit garçon gâté, qui se permet d'être caractériel et odieux comme l'artiste qu'il prétend être est évidemment délectable.
Dans cet immeuble victorien où l'on passe son temps à monter et descendre des escaliers étroits entre les appartements, l'atelier et les salons, il y a une tierce personne dans le duo fraternel: c'est la muse du moment, celle sur laquelle Reynolds crée, (mais à laquelle il ne semble pas, sexuellement, faire beaucoup de mal) et dont il se lasse vite. Et cela va être Alma, serveuse dans un restaurant de bord de mer, qu'il croise par un coup de foudre aussi surjoué qu'improbable, et qu'il ramène à Londres. Vicky Krieps, physique de cariatide, visage plat magnifiquement inexpressif (ou subtilement expressif quand il le faut) est évidemment une sensationnelle découverte parmi les nouveaux visages du cinéma, tant elle est magnifiquement atypique! Mais Alma n'entend pas se contenter de se rôle subalterne. Elle veut devenir la femme de la vie de Reynolds....
Vraiment pas indispensable, mais distrayant