PHANTOM THREAD
P.T.Anderson est donc de retour. Après un léger râté sur ses deux derniers films (captivants mais trop étranges (The Master, Inherent Vice) le metteur en scène de Magnolia, Boogie Nights, Punch Drunk Love ou encore l’immense There Will Be Blood, revient accompagné de toutes ses névroses, tout son talent, pour un film captivant, et ce sous plusieurs formes.
Dans la passe énigmatique de sa mise en scène, d’une élégance rare sans être chichiteuse (composition des plans, valeurs des mouvements, de la lumière, art du découpage, de la scénographie) P.T.Anderson délivre son film le plus délicat et raffiné, qui au travers un récit sur la haute couture nous conte finalement le rapport entre deux êtres, deux êtres guidés par leur névrose et leur personnalité, de maniaque a passionné. Etrange lecture d’un réalisateur qui semble mettre en scène sa propre vi(e)sion de l’homme assujettie à un art, la couture dans son récit, le cinéma en ce qui concerne le réalisateur. En effet, difficile de ne pas voir la projection que le cinéaste pourrait faire de sa passion du 7ème art, quand on connaît un peu sa vie et Phantom Thread remis au centre de sa filmographie. Le film opère de manière étrange, qui dans son opacité de départ délivre au fur et à mesure une certaine addiction, d’abord à son histoire, mais surtout à ses deux (voire 3) personnages principaux. Pour ce, l’évidence même du casting, l’indétrônable Daniel Day-Lewis pour ce genre de rôle explose la norme, et ne nous permet plus de trouver d’adjectifs adéquats pour qualifier ses prestations. Vicky Krieps qu’on n’avait pas remarqué jusque là et ce malgré une filmographie imposante, puis Lesley Manville dont le jeu bicéphale scotche réellement. Tous les trois forment un tout, un centre sur lequel se déploie la mise en scène de P.T Anderson dont l’élégance et la préciosité épate encore. Phantom Thread est un vrai piège, thriller psychologique, film aimant, vif, tout en étant immobile, froid et bouillant à la fois, vecteur de perturbations internes comme externes. Il scotche, trouble, aimante et demande de l’attention avant d’en comprendre l’intention. Au final, dans ce chaos des sentiments P.T.Anderson, même dans une proposition complexe mais brillante, propose de nous parler du couple, et des forces qui le composent, et ce jusqu’à la perte du soi au « cœur » des passions. Troublant. requiemovies.over-blog.com