Pour voir des allemands en uniforme dans des films français, il faudra attendre la Libération et, plus tard, "la traversée de Paris" d'Autant-Lara. Ce qui frappe ici c'est l'agressivité et la qualité des dialogues, que les protagonistes encaissent sans broncher. Belle brochette de super acteurs : Larquey, Seigner, Bertin, Fusier-Gir, Balpêtré, Roquevert, ... Et, bien entendu, Pierre Fresnay, parfait dans son rôle de médecin comme s'il avait fait ce métier là toute sa vie, et à la diction parfaite ce qui est utile car la bande son est fatiguée. Son idylle contrastée avec l'ex "femme du boulanger", Ginette Leclerc, volage et sexy puis amoureuse, est comme un rayon de soleil dans ce noir de corbeau. Entre la pose de ventouses sur l'abdomen féminin et la familiarité du couple après consommation de l'acte, il n'y a pas de transition. Avec Pierre Niney et Virginie Efira, aujourd'hui, cela ne se passe plus comme ça. Film noir mais avec passages humoristiques : enfants dissipés, discours grandiloquent du sous-préfet, rombières caricaturales, cérémonies religieuses moquées,... Le corbeau accuse le docteur Fresnay d'être un avorteur, ce qui était un reproche violent à cette époque. Le personnage joué par Fresnay dit "je ne suis pas croyant" et fait preuve d'une certaine distanciation sociale à cet égard, soulignée par sa jeune amie enceinte de ses oeuvres. Le haut clergé français a dû davantage tiquer que les pontes de la Continental. Tout ça super bien filmé, avec effets d'ombres chinoises, loupiotes qui se balancent, caméra agile et intelligente,... Bref, un bon film, vu à la télé ce soir, merci à eux.