A première vue, L'Attaque des Titans est une série horrifique des plus classiques, qui suit le combat pour leur survie des derniers représentants de l'humanité face à des géants cannibales. Un postulat qui n'est pas sans rappeler par exemple The Walking Dead, à ceci près que dans la version japonaise les morts-vivants mesurent plusieurs mètres de haut, et possèdent un pouvoir de régénération qui les rends quasiment invulnérables.
Les inspirations évoquées par l'auteur du manga Hajime Isayama sont multiples : ce dernier reconnaît ainsi l'influence des films de monstres (Kaijū-eiga) tels que Godzilla et Gamera, de jeux vidéo divers (Mega Man, Monster Hunter) ; quant à l'idée des Titans, elle lui est venue le jour où un ivrogne l'a empoigné par le col dans un cyber-café, sans parvenir à s'exprimer distinctement.
Pourtant, parmi ces références avouées, Isayama n'a pas cité les plus évidentes, à savoir les séries mecha comme Gundam et Evangelion, un genre dont il a repris l'essence tout en le révolutionnant graphiquement.
Ainsi, la question mérite d'être posée : L'Attaque des Titans est-elle le prolongement de ces illustres séries animées japonaises ?
L'ORIGINE DES MECHAS
On appelle mecha ces mangas, films ou animés mettant en scène des robots ou des personnages arborant des armures robotisées. Dès les années 50, le public japonais se passionne pour les histoires de ce genre avec Astro Boy ou Tetsujin 28-gō, toutes deux adaptées en séries animées au début des années 60.
Le genre est révolutionné dès 1972 avec les sorties combinés du manga et de l'animé Mazinger Z de Gō Nagai, première série à mettre en scène un robot dirigé de l'intérieur par un humain. Un premier succès suivi de deux dérivés, Great Mazinger et Goldorak, qui va ensuite ouvrir la voie à d'autres productions du genre et passionner encore un peu plus le public japonais féru de robotique.
En 1979, Mobile Suit Gundam débarque à la télévision japonaise. La série ne rencontre pas un succès immédiat, mais ses ventes de produits dérivés vont provoquer un engouement à retardement, marquant le début d'une franchise prolifique (plus de vingt autres séries Gundam ont depuis été produites) et lucrative (les revenus de la marque sont estimés à 500 millions de dollars annuels).
Dans les années 90, la série Neon Genesis Evangelion marque une nouvelle date majeure dans l'histoire du genre mecha ; s'éloignant des séries d'action précédement produites, elle dresse un portrait plus intimiste d'adolescents pilotes de robots organiques, derniers remparts de l'humanité d'un futur apocalyptique.
Par son traitement plus dramatique et humain, Evangelion rencontre à son tour un succès phénoménal, devenant très vite une référence qui participe à la popularisation du genre en Occident, en témoignent les sorties de Pacific Rim et sa suite, ainsi que la récente mise en chantier d'une adaptation en prises de vues réelles de Gundam.
UNE SERIE MECHA… SANS MECHAS
Disons-le d'emblée : L'Attaque des Titans n'est pas une série mecha… puisqu'elle ne met pas en scène de robots. Mais, d'un point de vue narratif, l'animé phénomène se rapproche bien plus de Gundam et d'Evangelion qu'on ne pourrait le croire.
Tout d'abord, ces séries se situent toutes dans un univers post-apocalyptique : futuriste chez Gundam et Evangelion, et fantasy pour L'Attaque des Titans dont l'action se déroule dans un monde imaginaire aux inspirations steampunk. Dans chacun des cas, il y est question d'envahisseurs géants et surpuissants, opposés aux derniers remparts de l'humanité. De jeunes héros, parfois de simples adolescents, participent alors au conflit de la dernière chance en pilotant des machines de guerre pour contrer la menace.
Dans les séries mecha, ainsi que l'a instauré Mazinger Z, les robots sont pilotés par la main de l'homme ; mais le procédé diffère-t-il du don possédé par Eren, capable de se changer en Titan et de le contrôler depuis l'intérieur même de son organisme ? Un procédé qui permet au jeune héros de combattre d'égal à égal les monstres, à l'instar des assauts menés contre les Anges dans Evangelion.
Une fois ce parallèle tracé, bien qu'il soit évident que L'Attaque des Titans ne puisse être qualifié de série mecha, il paraît comme indéniable que l'animé phénomène a su s'inspirer des codes du genre, alliés aux autres influences citées précédemment, pour créer un tout nouveau type de série, à mi-chemin entre l'hommage et le renouveau de l'animation japonaise.
Un constat qui explique sans doute le succès inouï rencontré par la série, dont la troisième saison est actuellement diffusée en simulcast VOST chaque dimanche sur la plate-forme Wakanim.