Sur le site d'Allo Ciné, la notation de la Presse est de 3,9 et 4,3 pour les spectateurs.
J’en conclus que la série est globalement appréciée.
Seulement, en cliquant sur La Presse, je m’aperçois que les extraits issus d’articles proviennent de la presse U.S.
J’en conclus que la série n’est pas du tout ciblée par la Presse française.
Je doute que la série passe inaperçue pour les professionnels des séries.
Je peux en conclure qu’elle est dédaignée par la Presse française, pas même un stagiaire pour y écrire quelques lignes, même désagréables !
J’ai découvert cette série sans aucune motivation, quelques mois après la fin de « Vikings ».
Sans motivation car « The Last Kingdom » était affublé du « Vikings du pauvre ».
Pauvre en moyens ?
En scénario ?
En acteurs ?
Bref, « Vikings » m’avait épuisé tant je m’ennuyais dès la quatrième saison.
Seuls Lagertha et Bjorn me poussaient à continuer et encore, leur présence s’étiolaient d’épisode en épisode.
Comme à l’image de « The Last Kingdom », je vais de suite trancher dans le vif : J’adorrrre !
J’assume la petite ribambelle de « r ».
C’est une série insupportable !
Comme Jack Bauer pour « 24h Chrono », le pauvre Uhtred est victime d’ingratitude ; son honnêteté, sa sincérité, les preuves à l’appui de ses faits d’armes envers la couronne d’Angleterre sont sans cesse discutés, suspectés.
C’est une série insupportable car (pratiquement) d’une séquence à l’autre, ça intrigue, ça suppute, ça doute, ça remet en question, ça fomente, ça complote, ça conspire.
Ça n’arrête pas !
Ce que l’on croit acquis est aussitôt remis en question.
Quand l’amour parvient à sortir la tête de la fange des mauvaises intentions, du purin de la malveillance, il est aussitôt sali par la jalousie, l’avidité du pouvoir, les intérêts personnels et l’argent. Quand ce n’est pas tout à la fois !
Comme à l’image d’Uhtred, ça n’arrête jamais. A peine mis en selle, on conteste, on soupçonne, on menace.
Alors me direz-vous, c’est parfois exagéré.
Dernièrement, le roi Edward refuse de patienter pour mieux attaquer les écossais sous prétexte qu’il soupçonne Uhtred de penser plus à son héritage qu’à la couronne !
C’est abusé comme dirait l’autre !
Parfois les complots peuvent sembler artificiels pour illustrer un suspens de plus. C’est possible et me suis fait la réflexion.
Peu importe, ça fonctionne à plein sur moi.
Me voilà à maugréer, à colérer, à haïr, à souhaiter la mort, à trembler pour mes personnages favoris.
Une série qui m’emporte à m’emporter !
Une série qui s’amuse avec mes émotions et ça fait du bien.
Une série qui suinte l’hypocrisie, qui pue le complot, qui respire la malveillance. La plupart des personnages sont venimeux.
Souvent, le venin s'invite dans une phrase anodine.
Que l’on peut croire anodine.
Ce n'est pas aussi bien que « Game of Thrones » (On ne fera pratiquement jamais mieux, les 5 premières saisons en tout cas) et « The Last Kingdom » n'a pas de dimension fantastique. Mais c’est nettement mieux que « Vikings » dans la mesure où j’ai vibré à tous les épisodes des cinq saisons !
Aucun épisode ne permet de repos.
Et si repos il y a, il ne nuit pas au rythme du récit. Les conversations sur le sens de la vie, du pourquoi, du comment ni ne s’éternisent ni ne se répètent comme dans « The Walking Dead », discussions philosophico-existentielles synonymes de remplissage.
« The Last Kingdom » est une transcription du droit à la différence, du droit au vivre ensemble. C'est peut-être pompeux dit ainsi, mais si on réfléchit bien c’est un principe de vie qui existe depuis que le monde est monde.
Comme tenter d’exercer sa foi en toute liberté.
La série se plaît à confronter les points de vue monothéistes contre polythéistes (Vikings l’abordait aussi), et la tolérance religieuse avait pour visages Uhtred, Gisela, Beocca, Pyrlig et Hild entre autres.
Un grand bravo aux acteurs quels qu’ils soient, des personnages les plus nobles aux plus infectes. Je fais allusion aux sentiments qui les animaient.
Evidemment, il y a des nobles infectes, par exemple Aethelred (Toby Regbo) !
Dès qu’Alexander Dreymon est apparu sous les traits de Uhtred, j’avoue avoir eu des démangeaisons sur sa diction.
A écouter en V.O pour s'en rendre compte. J’ignore la V.F.
Est-ce le fait qu’il soit allemand et qu’il ait joué en anglais sans vraiment en appréhender la langue, ou est-ce volontaire ?
L’ensemble me donnait l’impression que l’acteur jouait par moments faux.
Puis peu à peu, son jeu m’a convaincu et par voie de conséquences, j’ai accepté cette diction pour le moins singulière.
Un mix danois, anglais marquant ainsi la double identité de son personnage.
Alexander Dreymon est Uhtred sans aucun doute.
Il a su traduire ce déséquilibre qui le perturbait : danois ? saxon ?
Un déséquilibre qui provoquait la suspicion tant du côté de la couronne d’Angleterre que du côté danois.
Uhtred, déchiré entre deux cultures, se cherchait et ne trouvait sa place nulle part. On le lui faisait bien remarquer.
Se tournant vers le roi d’Angleterre Alfred, ses intentions furent légitimement mises en doute.
Alexander Dreymon a su traduire ce tourment.
Là encore, on peut transposer ce tourment dans notre actualité avec ces générations maghrébines nées en France de parents maghrébins qui tantôt ne se reconnaissent pas français qui tantôt ne se reconnaissent pas dans leur pays d’origine en fonction des caprices de la société.
La série a su faire évoluer Uhtred : durant les trois premières saisons, une impulsivité liée à sa jeunesse d’une part, ajoutée à un sentiment d’injustice de la part du roi Alfred qui se servait de lui ; son obsession pour reconquérir son héritage, Bebbanburg, le rendaient presque incontrôlable, d’autre part. Puis, peu à peu résigné, père et petit seigneur de sa communauté, il acquérait une certaine sagesse et dans son comportement et dans ses propos.
Enfin, Uhtred est un être sensible. C’est un guerrier qui ne cachent pas ses larmes, ses émotions. C’est poignant. Alexander Dreymon a su incarner admirablement ce personnage qui mérite le respect de son entourage dans la série et des spectateurs.
Au-delà de son courage, j'admire son sens de la fidélité et son objectivité.
La série a su aussi remarquablement faire évoluer un grand nombre de personnages ; je ne peux pas tous les citer ; tous autant qu’ils sont, ce sont de solides personnages. Et tous les acteurs ont su défendre leur personnage avec conviction.
Et si cela a été possible, c’est sans aucun doute grâce à une direction d’acteurs rigoureuse.
Mais comment ne pas mentionner Brida ?
Emily Cox a su traduire tous les démons que son personnage engrangeait au fil de ses rencontres, de ses déceptions, de ses frustrations.
Brida était touchante dans les bras d’Uhtred comme elle fut touchante dans ceux de Ragnar. Sa frustration, ses déceptions, ses défaites, ses humiliations ont nécessairement viré au fanatisme.
Emily Cox a su défendre un beau personnage complexe. La série lui a offert un personnage riche et consistant.
Sa fin fut aussi touchante.
Contrairement à la plupart, j’étais mitigé quant à son sort, sans doute comme Uhtred. Oui, il fallait que ses méfaits cessent, mais je n’arrivais pas à me résoudre de sa mort.
Comme j’étais soulagé de voir Uhtred l’épargner.
Mais les flash-back qui rappelaient leur enfance, leurs amours n’annonçaient rien de bon.
C’était écrit, prévisible.
Le roi Alfred : là encore, je n’étais pas aussi catégorique que certains observateurs. Je comprenais leur acharnement contre ce personnage ingrat.
David Dawson a aussi su défendre son personnage, lui aussi torturé par la charge de son règne.
Si on regarde bien, la série nous a dépeint un grand nombre de personnages torturés. Si certains étaient monochromes, soit blancs ou noirs, Alfred faisait partie de ces personnages complexes, ni blanc ni noir, ni bon ni méchant.
Evidemment, je pestais contre lui quand il manifestait de l'ingratitude et du chantage envers Uhtred, mais il m’est arrivé de comprendre ses préoccupations et sa vision du pouvoir.
Quand il reçoit Uhtred, alors hors-la-loi, il finit par lui avouer son amour, sa reconnaissance ; c’était une scène forte en émotion. Son corps épuisé par la maladie préfigure le cadavre qu’il sera, un corps rabougri, une ombre fantôme, luttant pour rester debout, les yeux embués, fixant Uhtred en train de lire les chroniques de son règne (celui d’Alfred). Les deux hommes se comprennent et comprennent les choix que chacun avait pris l’un pour ou contre l’autre.
Trois personnages que j’ai aimé détester et pour lesquels je m’impatientais de leur mort : Aethelwold (Harry McEntire), Aethelred (Toby Regbo), Aethelhelm (Adrian Shiller) et j’ajoute aussi Kjarten, Odda le jeune entre autres.
Ce ne fut pas si évident pour Aethelwold ; une fois encore, la série bouscule le spectateur en nous offrant un personnage déséquilibré par son statut, se cherchant continuellement pour exister, sous-estimé, pleutre et arriviste. Il y a eu des épisodes où j’ai cru en sa sincérité, il devenait sympa, amusant, il était la caution comique dans les rangs d’Uhtred si je me souviens bien, par sa maladresse, par sa couardise.
Puis comme Brida, rongé par la frustration, l’ambition, le mépris, il tomba dans les travers de la conspiration en commettant l’irréparable : assassiner lâchement Ragnar.
A revers, le personnage Haesten (Jeppe Beck Laursen) a joué aussi avec mes sentiments. J’ai eu de la peine de le voir transpercer d’un coup d’épée par le roi d’Ecosse.
Je n’aurais pas cru !
Voilà pourquoi cette série ne joue pas à plein sur le manichéisme de ses personnages pour peu que le spectateur soit sensible, ouvert à tous les enjeux des personnages.
Je mentionnerai aussi Aelswith (Eliza Butterworth), femme du roi Alfred.
Voilà un personnage qui m’a irrité pendant trois saisons entière.
Son ingratitude, sa bigoterie, ses mauvaises interprétations contre Uhtred, contre Gisela qui avait sauvé son bébé, me l’ont rendue odieuse.
J’ai cru en son rôle et fut épaté d’apprendre que l'actrice ait interprété une mère crédible alors qu’elle était âgée de 25 ans.
Eliza Butterworth a su aussi défendre un personnage ingrat.
Une pensée pour Hild, personnage rayonnant, sauvée d’un viol par les hommes d'Uhtred, elle tenta de se faire guerrière pour mieux se défendre des hommes mais choisit la paix en se réfugiant dans sa foi chrétienne. Elle était le rayon de soleil de la troupe d’Uhtred ; et pour Uhtred, sa raison, son refuge pour atténuer ses tourments, ses peines, ses colères.
Leurs relations étaient belles à voir et surtout saines.
Une pensée pour Gisela, épouse d’Uhtred ; femme forte, comme plus tard sa fille Stiorra ; elle a su modeler le caractère parfois bouillonnant d’Uhtred.
Une pensée pour le couple Aethelflead (Millie Brady ) Erik (Christian Hillborg). Leur relation amoureuse fut inattendue et déchirante.
Puis plus tard, avec Uhtred.
Son sacrifice pour régner sur la Mercie fut aussi insupportablement douloureux.
Le casting a réussi un coup de force car Millie Brady a le même âge que Eliza Butterworth ; c’est-à-dire que la fille et la reine mère étaient interprétées par des actrices ayant le même âge, soit 28 ans en fin de saison !
Une pensée pour le couple Stiorra (Ruby Hartley) et Sigtryggr (Eysteinn Sigurdarson). J’ai apprécié Sigtryggr, ses longs cheveux, sa dégaine Metal.
Stiorra, petit morceau de fille au caractère bien trempé.
Un beau personnage qui aurait mérité plus d’audience.
Je terminerai sur les compagnons fidèles d'Uhtred : Beocca (Ian Hart), Finan (Mark Rowley), Sihtric (Arnas Fedaravicius), Osferth (Ewan Mitchell) et Helig.
Comme on aimerait tous avoir de tels amis. A la vie à la mort. Dans la joie et dans la difficulté. Ils ont tous été précieux et à leur façon ont aidé à façonner le caractère d’Uhtred.
En tout cas, si la série pouvait entrapercevoir la pauvreté de son budget dans la première saison, en raison des combats (et encore, cela ne m’a pas choqué) elle a démontré très rapidement par son scénario, son récit fourmillant de rebondissements solides, qu’elle était loin d’être pauvre, surtout grâce à la richesse de ses personnages qui pour la plupart ont eu le privilège d’évoluer.
« The Last Kingdom » : « le Vikings du pauvre » !!??
Pas convaincu.
En tout cas, en fouillant ici ou là on s’aperçoit que la série repose sur des faits historiques et comme tout auteur, Basselget s’est arrangé avec la chronologie des évènements, avec certains personnages pour rendre son récit palpitant, en ce qui me concerne.
« The Last Kingdom » est une série ouvertement et injustement mésestimée à moins que je ne sois pas du tout objectif.
Mais sommes-nous tous objectifs quand une série vous saisit le coeur ?
Chacun a ses raisons pour aimer ou détester une série.
En soi, l’art ne se discute pas, il vous touche ou il ne vous touche pas.
A voir en V.O si possible pour l’accent singulier d’Uhtred.