On ne peut que saluer l’interprétation éblouissante des acteurs dans le rôle des frères martyrs. La béatitude qu’ils expriment, et le message final en voix off du Frère Christian sur le don de soi, le pardon, l’amour du divin, rendent l’ensemble du film émouvant à l’extrême. Cependant après l’intense émotion, vient la réflexion. Et cette réflexion se déclenche lorsque notre mémoire se souvient de répliques ici et là. Ainsi on peut entendre un colonel Algérien lancer un poncif indigéniste selon lequel le chaos économique actuel, la folie meurtrière des islamistes, et son cortège d’horreurs, seraient le fruit de la colonisation. Autre poncif, celui de la nécessité pour la France à toujours faire repentance. Ainsi, dans son discours posthume, Frère Christian sous-entend que les islamistes commettent des atrocités, que la colonisation aurait commis à l’encontre des populations avec qui vivait la confrérie. Rien de plus faux. La répression coloniale ne s’est jamais abattue sur les populations Kabyles. En revanche, ce sont ces populations Kabyles qui ont été les 1ères visées par les islamistes. Car beaucoup de ces Kabyles n’étaient pas forcément musulmans. C’est le fait qu’ils pratiquaient souvent une forme d'oecuménisme culturel et religieux, ce qu’exècrent les islamistes, qu’ils subirent les foudres sanglantes des islamistes. Les Kabyles, qui furent aussi les cibles privilégiées de la dictature qui s’est mise en place après l’indépendance. Si la beauté de la mise en scène de Xavier Beauvois, et le brio des acteurs ont contribué au succès du film, son côté hyper consensuel, voire lénifiant, ne remettant en cause pas une seconde la propagande néo FLN, a également influé.