Adapté du roman graphique de John Wagner et Vince Locke, "A History of Violence" est un film centré sur la violence où David Cronemberg filme avec une facilité déconcertante le changement de visage d'un homme, avec une bonne dose de questionnement qui font de ce film une oeuvre singulière. Alternant entre thriller et film de gangster, le dernier long-métrage de David Cronemberg met en scène Tom Stall, un citoyen paisible, patron d'un petit restaurant, bon père et bon mari. Un soir, deux tueurs font irruption dans son restaurant, s'apprêtant à commettre un massacre, mais en quelques fractions de secondes, Stall les abat avec une dextérité surprenante. Le fait divers fait la une des médias, la fierté de sa famille, et propulse Stall au rang de célébrité locale et nationale. Alors qu'il tente de retrouver une vie normale, un mafieux partiellement défiguré, répondant au nom de Fogarty, débarque dans son petit restaurant et l'appelle par un autre nom : Joey. Fogarty et ses complices prennent en effet Tom, qu'ils ont vu récemment à la télévision, pour un de leurs anciens complices qui leur a fait faux bond... La scène d'introduction est d'une intensité rare où deux types sortent tranquillement d'un motel isolé pour reprendre la route. L'atmosphère est calme, tout porte à croire que ces personnages sont en voyage d'agrément ou d'affaires. Tout, sauf le fait qu'ils ont oublié de prendre de l'eau pour le voyage et que le mouvement de caméra qui suit l'un d'entre eux jusqu'à l'intérieur du motel révèle au spectateur un crime sanglant, dont l'apothéose monstrueuse a lieu sous ses yeux en temps réel, avec l'assassinat de sang-froid d'une fillette qui avait survécu au massacre. Cette remarquable séquence inaugurale, qui révèle un silencieux carnage sous une atmosphère de pastorale américaine et deux voyous vicieux sous les oripeaux de deux possibles représentants de commerce, met le film sur des rails qu'il ne quittera plus. Ce long-métrage est d'une intensité rare, de la même veine que "No country for Old Man" réalisé par les frères Cohen. Le personnage principal est campé par l'excellent Viggo Mortensen qui signe une prestation honorable, tout comme Ed Harris, le truand du film. Derrière la caméra, le réalisateur Canadien David Cronemberg nous expose tout son talent, une mise en scène brillamment orchestrée, des personnages développés psychologiquement à la manière d'un virtuose (le double, la mutation, les limites de l'humanité) ainsi que des fusillades sanglantes. Ajoutons à cela une BO finement dosée et un rythme effréné et nous obtenons une très bon film film bien plus complexe qu'il n'y paraît.