Dans le paysage cinématographique de la science-fiction, "I, Robot" d'Alex Proyas se dresse comme un colosse aux pieds d'argile, oscillant entre le génie et les écueils d'une ambition parfois démesurée. Ce film, marquant par sa vision futuriste de 2035, où les robots sont devenus des compagnons quotidiens de l'humanité, s'inspire librement des œuvres d'Isaac Asimov, bien qu'il s'en écarte significativement, créant ainsi un paradoxe captivant.
D'emblée, le film brille par son esthétique visuelle et ses effets spéciaux, qui, même après des années, demeurent d'une remarquable finesse. La conception des robots, en particulier Sonny, est à la fois innovante et profondément humaine, provoquant chez le spectateur un mélange d'émerveillement et d'inquiétude. La performance de Will Smith en tant qu'officier Del Spooner ajoute une couche de complexité à cette toile futuriste, son charisme et son jeu d'acteur rendant palpable la méfiance envers les robots, qui est au cœur du film.
Cependant, "I, Robot" trébuche sur le fil tendu de son scénario. Le film ambitionne de tisser une réflexion profonde sur l'intelligence artificielle, l'autonomie des robots et leur place dans la société, mais se perd parfois dans les méandres d'un récit qui privilégie l'action à la profondeur philosophique. Les moments de réflexion semblent être des îlots isolés dans un océan de séquences d'action, certes spectaculaires, mais qui érodent le potentiel d'une véritable introspection sur les questions soulevées par Asimov.
De plus, le traitement de certains personnages, notamment celui de Susan Calvin interprétée par Bridget Moynahan, manque parfois de nuance, réduisant leur potentiel à de simples archétypes dans une histoire qui aurait pu leur offrir une richesse bien plus grande. Le rythme du film, bien que maîtrisé dans sa globalité, connaît des fluctuations qui peuvent laisser le spectateur sur sa faim, cherchant désespérément la substance au milieu du spectacle.
En dépit de ces faiblesses, "I, Robot" demeure une œuvre cinématographique d'importance, notamment pour ses apports visuels et son audace créative. Le film parvient à poser des questions pertinentes sur notre avenir aux côtés des machines, même s'il ne trouve pas toujours les réponses. C'est dans cette dualité, entre la surface lisse de son esthétique et les aspérités de son contenu, que le film trouve sa place : ni chef-d'œuvre incontesté, ni simple divertissement oubliable, mais un objet de réflexion imparfait, un miroir de nos propres contradictions face à la technologie.