Bon, je vais pas passer par quatre chemins pour dire que j’ai été complètement bouleversé par cette histoire d’amour aussi authentique qu’atypique. Je n’ai pas ressentie pareille émotion devant une romance depuis le fameux Sur la route de Madison de Clint Eastwood, qui, en se mettant en scène lui-même, réalisait une des plus belles histoires d’amours de cinéma, sur une toile sociologique passionnante.
Je n’avais encore vu qu’un seul film de Sofia Coppola, Virgin Suicides, que j’avais beaucoup apprécié. Mais il me manquait THE film pour me faire devenir grand fan de cette cinéaste. Dans ce premier film j’avais vraiment aimé toute cette facette mystérieuse et de non-dit qui entourait ces soeurs suicidaires, et qui faisait marcher notre imaginaire et nous faisait vivre de la plus intense manière qu’il soit leur détresse. On peut alors dire que cette patte narrative de Sofia se retrouve également dans Lost In Translation. Cette histoire d’amour entre Bill Muray et Scarlett Johanson, à la différence des milliers d’autres films qui sortent chaque semaine dans les salles de cinéma, se détourne de tous les clichés possibles, et ne se raconte pas, ne s’émotionnalise pas à l’aide de ficelles vues et revues, elle se ressent pleinement.
C’est entre autre la mise en scène exceptionnelle de Sofia qui ressort de ce film. Un peu à la manière de Mann (et Refn plus récemment) qui immortalisaient les rues de L.A, Woody Allen qui mettait en scène un Paris de carte postale, Sofia arrive mieux que n’importe qui à magnifier les rues « cyberpunk » de Tokyo by night. Mais comme tout grand réalisateur, ces décors ne sont pas uniquement faits pour faire beau, mais s’inscrivent directement dans l’histoire, et apporte une richesse de lecture supplémentaire. Ici la ville de Tokyo impalpable et mystérieuse sert de cadre idyllique à une rencontre furtive, entre deux vies en transition temporaire, comme le titre du film l’indique. Et c’est cette rencontre éphémère dans un environnement inconnu qui va la rendre intense cette belle histoire d’amour. Certes les clichés orientaux, il y en a à la pelle, mais c’est tellement drôle et subtilement mis en valeur que c’est totalement justifié (et la plupart des clichés sont vrais, et faut pas oublier que c’est d’un point de vue occidental, donc normal). Autre prouesse, la manière de filmer les personnages. Entre tous ces moments de silences suggérés qui rendent la relation entre les deux personnages tellement sensuelle et ces instants de complicité entre les acteurs (qu’on a l’impression que ce sont eux qui parlent à la place de leurs personnages), on passe du rire au larme, de l’euphorie au désespoir, pour notre plus grand bonheur. Voilà les principales raisons pour lesquelles ce film ne tombe pas le cliché ou dans le niais. Il y en a d’autres certes, mais il faudrait revoir ce film une bonne dizaine de fois avant d’épuiser toutes les richesses de cette histoire.
Au finak, ça ne sert à rien de vouloir expliquer l’inexplicable, mais juste se réduire à dire que ça nous prend au tripes, que ça ne nous touche au plus profond de nous-même.
Un film à revoir encore et encore, car c’est un véritable bonheur de vivre cette pure histoire d’amour impossible. Le cinéma, c'est beau.