Alors que nous déroulons le fil de notre existence, derrière nos actes les plus ordinaires, essentiels ou inattendus, un univers est à l'œuvre et nous ne pourrions le définir avec certitude. Une autre histoire s'écrit, entre les lignes, entre les silences même; certains d'entre nous, la plupart peut-être, en ont la vague ou vive conscience; une histoire secrète qui nous relie tous, qui contient le sens profond du réel, ainsi que les aspirations les plus hautes de notre imaginaire.
Apparemment l'ordre des choses est maintenu, aisément ou non, avec de nombreux écueils souvent, mais nous nous sommes habitués, en règle générale, à ce mélodrame qui modèle nos vies. Plus ou moins malgré nous le temps nous emporte.
Quelque chose nous échappe. Pourquoi s'en préoccuper? Ça ne change pas grand chose, on s'en rend compte, au regard de nos expériences; ou ça dérange, ça perturbe, on le paye parfois cher.
Lorsqu'on remue le terreau, qu'on fouille le silence, on peut sentir trembler l'univers, comme la peau d'un être géant qu'on chatouille; alors un son grave, impressionnant mais presqu'inaudible, résonne en chaque parcelle autour de soi avant de nous atteindre quelque part en soi. À cet instant, un peu hors du temps, on appréhende une véritable connaissance, importante, bénéfique.
Quentin Dupieux provoque et partage de tels évènements. Il m'apparaît oser, particulièrement ici, le délicat courage de longer les frontières de l'évidence, sans glisser dans l'absurde et encore moins la facilité, jusqu'à révéler le quotidien mystère qui nous trouble tous: le masque translucide.