Juré n°2 est un bon film pour terminer sa carrière. Après un Cry Macho reçu fraîchement, la justice est enfin rendue : la dernière œuvre du Grand Monsieur sera ce sympathique film de procès aux acteurs très en forme (absolument tout le casting est bien trouvé, jusqu'au détonnant binôme Nicholas Hoult et Toni Collette qui tient le film tout du long), au rythme qui ne se fait jamais ressentir, et à l'histoire cousue de fil blanc mais qui fonctionne en grande partie. On ressent une immense influence des films 12 Hommes en colère et surtout Le Septième juré (l'histoire d'un meurtrier qui se retrouve à juger un autre homme dans ce qui devrait être son propre procès, et est le seul à vouloir arrêter un élan de condamnation aveugle : tout pareil), avec beaucoup de respect, une mise en scène comme toujours soignée, et un final très attendu qui marche bien (même si le dernier plan nous a perdu : et ? La suite ?). Pour être tout à fait franc (la main droite levée), l'intrigue nous a souvent fait tiquer par les grosses ficelles qu'elle utilise. Le scénario concède lui-même qu'il a débauché le pire légiste qui soit (qui confond des blessures de coups de pieds et poings avec le choc violent d'une voiture), ce à quoi il faut rajouter les explications nébuleuses de l'apprentie médecin quant aux fractures des clavicules (plutôt que la position "penchée sur la route, tapée de front" assez étrange qu'elle avance, et dont le vol miraculeux sans toucher le parapet semble tiré par les cheveux, le scénario aurait dû favoriser l'idée bien plus simple que la victime vomissait par-dessus le parapet et a simplement basculé de l'autre côté, l'adhérence des talons hauts sur le bitume mouillé n'étant pas de notoriété publique... Le parapet aurait pu garder une trace de frottement (des genoux par exemple) à moitié dégradée par la forte pluie, le légiste "très fatigué" n'aurait rien noté en ce sens sur les jambes, car c'est un nul... Expliqué comme ceci, l'accident nous aurait paru nettement moins foireux, merci Pierre Bellemare, notre idôle). Tout au long de l'enquête, personne ne pense à refaire une autopsie, bien que la bêtise absolue du premier rapport est un secret de polichinelle (même l'avocate qui est opposée à cette thèse
concède à la fin qu'elle sait que cette autopsie est complètement ratée...
Mais que fait l'avocat de la Défense ?). Idem, comment croire que
l'avocate prend le temps de chercher tous les moindres détails des propriétaires des voitures identiques à celle du tueur, mais ne pense même pas à demander le nom du mari responsable de la collision la plus suspecte, et ne voit pas toutes les photos du couple qui tapissent pourtant la maison ? Et enfin, on déplore de n'avoir pas eu de scène pour justifier le dernier revirement d'opinion du jury (quid de la mamie qui disait mordicus qu'elle ne voterait pas autre chose qu'innocent ? Comment l'a-t-on convaincue, finalement ? Il manque tout le dernier réquisitoire du Juré n°2, ç'aurait été très intéressant de voir justement comment il pouvait faire machine arrière auprès des autres jurés qui ont voté comme lui, après l'avoir écouté).
Pas mal de grosses ficelles (cet énorme pavé explicatif pourrait donner l'impression qu'on a trouvé le film bête, mais s'il prend de la place dans cette critique, il en prend nettement moins dans le souvenir plutôt agréable que le film nous laisse, pas d'inquiétudes, vous pouvez y foncer sans hésiter !), donc, mais qui ligotent quand même un film devant lequel on ne s'ennuie certainement pas, où le binôme Hoult-Collette est vraiment excellent, prenant même le temps de creuser la psychologie de ce pauvre homme pour mieux nous questionner quant à ce qu'on ferait, à sa place, et finalement, on pense que, comme lui, on aimerait mieux ne jamais connaître la réponse.