C'est loin d'être "un film de motards". C'est plus un film d'amour. Et autant un film sur l'amitié. Il y a beaucoup d'émotion. C'est aussi un film avec des messages auxquels on ne s'attend pas vraiment. Le film questionne sur le bonheur. Sur l'histoire, il nous pousse à croire qu'après l'âge d'or (des seventies et des bikers), c'est le gang qui domine (lequel naît à partir d'un acte de lâcheté). On nous montre aussi un biker qui parle de destin (sans le nommer) : "ça devient toujours ce que ça doit devenir" (à moins qu'il ait dit "on devient toujours ce qu'on doit devenir")...
Si vous n'êtes pas très très fluent en anglais, mieux vaut le voir en VF, car les dialogues sont des dialogues de dingues, sauf Austin Butler (qui n'a que sa gueule d'ange pour causer) et Tom Hardy (qui joue son Parrain à lui et qui dit tout en deux mots). Et sauf la fille, qui est donc l'héroïne et aussi celle qui narre le film du début à la fin. Ces dialogues restent l'intérêt du film car il n'y a pas d'histoire (à proprement parler). Ils sont ce qui nous reste comme histoire : des bribes d'événements qui n'en sont pas, du genre "j'aime bien être sale, j'adore avaler les mouches" (mais ce n'est pas suivi d'un discours sur l'hygiène, la gastronomie ou l'entomologie).
L'hystérie (ou le délire) des bandes fait d'ailleurs penser à une cour d'école à la récréation, avec des enfants qui crient, des enfants en construction, d'autres déjà en ruines, et où le monde des adultes semble absent. La liberté, la rébellion, s'exprime dans ces cours d'école, bien protégées du monde extérieur, et où l'on voit naître les dictatures (tiens ! comme par hasard).
L'hubris (ivresse du pouvoir) vs le rebelle éternel ?
Mais quand ces enfants sont des adultes bien mûrs, comme ceux du film, rebelles et libres (selon eux), et qu'on entend la musique du film qui joue "I feel free" de Cream (1966), on ressent une réelle tristesse, en même temps qu'un désarroi. Désarroi comparable à ce que peut ressentir la mère d'un fils cocaïnomane, ou à ce que ressent l'héroïne du film disant dès le départ "ça peut pas être de l'amour, ça peut être que de la bêtise".
La question pour chacun des personnages est la même : est-on heureux ? Le réalisateur ne la pose pas d'ailleurs, il s'y prend autrement. Quand le motard à la gueule d'ange esquisse un sourire (enfin !) à la toute dernière seconde du film, on se demande vraiment s'il est heureux comme elle le prétend.
A.G.