S'inscrivant dans la continuité d'un cinéma LGBT irrévérencieux underground des années 70 à 90 (et même 60 en comptant par exemple "She-Man : A Story of Fixation") à la John Waters, à la Bruce LaBruce ou à la Gregg Araki, ce film, réalisé par Rose Glass, ne parvient jamais à atteindre le même niveau et sonne surtout artificiel.
En effet, à une époque de plus en plus demandeuse de productions LGBT (enfin c'est sujet beaucoup plus vaste que ça et surtout source de débats sans fin), la réalisatrice tente de sortir des sentiers battus en proposant un film Queer, mais à prendre au sens étymologique du terme, c'est-à-dire bizarre, étrange, à l'instar du travail des réalisateurs précédemment cités. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que le film se déroule dans les années 80, ce n'est pas par simple nostalgie à la "Stranger Things", ça raconte vraiment quelque-chose et reste ainsi, encore une fois, dans cet héritage de ce cinéma Queer et underground de cette époque. C'est pourquoi nous avons par exemple toute une galerie de personnages insolites et volontairement très stéréotypés, notamment la lesbienne musclée (renvoyant directement à la butch), la lesbienne junkie, le texan fasciné par les armes à feux et le mec hétéro violent bien beauf à la coupe mulet. Sans parler de la seule femme hétéro du film ; une femme battue soumise à son mari qu'elle aime toujours ou pense ou en tout cas aimer, vivant dans une désillusion constante du rêve américain à base de famille nucléaire. Tous ces personnages surnagent dans une histoire transgressive, ou en tout cas qui cherche à l'être à tout prix, sorte de "Thelma & Louise" poussé à son paroxysme. Le problème, c'est qu'à force de chercher à tout prix à être transgressif (autant narrativement que visuellement, notamment avec cette manière de montrer frontalement divers fluides corporels, des pénétrations réelles ou symboliques etc.), le film donne surtout cette impression de bordel constant et de ne jamais savoir vraiment où aller. On a en effet l'impression que le film ne suit pas vraiment de fil conducteur, on passe d'une scène à l'autre, d'un contexte à l'autre sans que ça ne fasse véritablement sens. Tout est confus et surtout, le film ne sait jamais vraiment où se positionner non plus. C'est-à-dire qu'il cherche à être transgressif mais ce n'est rien à côté d'un "Pink Flamingo" par exemple mais tente en même temps d'être accessible à un plus large public, notamment avec sa violence qui en devient finalement décomplexée voire même rigolote ; le film n'étant jamais dérangeant. "Love Lies Bleeding" est donc un film qui se veut provocateur et irrévérencieux mais qui est avant tout bordélique malgré sa galerie de personnages intéressants.