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    Silence
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    lhomme-grenouille
    lhomme-grenouille

    3 328 abonnés 3 170 critiques Suivre son activité

    2,0
    Publiée le 23 février 2017
    Ralalah ! Mais que ça va être compliqué pour moi de vous parler de mon impression face à ce « Silence » ! Bon, c’est vrai, ma seule note de « deux étoiles » pourrait suffire pour vous faire comprendre que, globalement, je n’ai pas été enjoué par ce film (et c’est un bel euphémisme). Parce que oui, pour tout dire dès le départ, je me suis quand même bien fait chier (et pas qu’un peu), j’ai eu beaucoup de mal à voir où le gars voulait vraiment en venir, et en plus de cela, j’ai parfois un peu tiqué sur des aspects que j’ai trouvé un brin douteux… Mais bon, voilà, malgré tout ça, ça reste quand même du Scorsese ce film ! Déjà, moi, je trouve ça vraiment très beau. Pas mal de plans sont à tomber (notamment celui renversant de cette barque vue du ciel, avançant vers le soleil, mais avec un orage sur le chemin. Je trouve ça tellement riche de sens ! Tellement dans le ton de la peinture religieuse auquel le film cherche à s’attacher). A cette belle science de l’image s’y associe souvent un usage astucieux du son. Parfois les sons disparaissent, parfois certains sont surrappuyés par rapport à d’autres, ce qui génère vraiment des fois des ambiances vraiment envoutantes. Et puis – allez je l’avoue – je trouve aussi que cet univers est, de mon point de vue, vraiment fascinant. Marier un univers de premiers chrétiens à celui de ce Japon médiéval, c’est quand même assez saisissant et ça donne lieu parfois à des atmosphères vraiment grandioses. Donc voilà, en gros c’est pour cela que je vais être assez mal à l’aise pour parler de mon global désagrément concernant ce film. Relever tout ce qui m’a posé problème tout en repensant à tout ce qui m’a enchanté, c’est vraiment délicat. Le pire, c’est que franchement, ça aurait pu passer. Parce que l’air de rien, ce film me rappelait quand même grandement une autre œuvre de Scorsese à la démarche assez proche, sa fameuse « Dernière tentation du Christ ». Et cette « Tentation », franchement, moi je l’avais bien aimée, alors que pourtant, d’habitude, j’ai une certaine « sensibilité » dès qu’un film se risque à tout zèle de bigoterie. Là, avec ce « Silence », on navigue plus ou moins dans les mêmes eaux. On retrouve une fois de plus un prêcheur solitaire cherchant à transmettre sa foi en un lieu et en une époque où cela n’avait rien d’évident. D’ailleurs, les questions abordées dans ces deux films sont presque identiques : il s’agit de questionner la détermination et la foi du prêcheur solitaire ; la pertinence de son abnégation alors que tout l’invite à abandonner et à renier son dieu… Et bizarrement, ce n’est pas forcément cet aspect qui m’a dérangé le plus. Certes, Scorsese regarde un petit peu ce qui l’arrange dans ce Japon du XVIIe siècle, mais d’un autre côté on regarde aussi cette situation du point de vue de son personnage principal, donc pourquoi pas… Non, finalement, ce qui m’a dérangé dans ce film, c’est qu’au fond Scorsese sache à ce point nous montrer qu’il a perçu toutes les limites de ce genre de démarche bigote mais que, malgré tout, il y aille quand même ! Ce personnage principal, moi, j’étais prêt à m’ouvrir à ses problématiques, mais à condition que le film sache révéler toute l’ambigüité et toutes les incohérences de ses positions. Or, ça le film, le fait… mais pour se rétracter ensuite à chaque fois. Certes, dans « Silence », le personnage de Kichijiro illustre magnifiquement toute l’absurdité morale de la logique d’absolution. Mais d’un autre côté, Scorsese s’arrange pour qu’à la fin spoiler: une justice divine s’applique quand même contre lui puisqu’il sera trahi par le port d’une idole
    . Certes, il y a bien des personnages parmi les autorités japonaises qui sont là pour démontrer toute la fermeture d’esprit, le dogmatisme et l’arrogance des pères jésuites à venir évangéliser un pays sans se soucier de la culture qui y est déjà en place, il n’empêche que d’un autre côté, les pourfendeurs de la culture japonaise ne sont montrés qu'au travers du prisme de l'oppression, et se présentés eux-mêmes que comme arrogants et cruels. Certes, le personnage de Rodrigues va bien être confronté à spoiler: son mentor, le père Ferreira
    , ce qui ouvre une sacrée piste au doute. Mais une fois de plus, il n’empêche qu’au final spoiler: ledit Ferreira ne sera jamais présenté comme un véritable apostat. Il doute. Il se trahit même sur le fait qu’il n’ait pas vraiment renié Dieu dans son cœur malgré toutes ses années, bref Ferreira est présenté comme quelqu’un se sachant dans l’erreur. Alors après, pourquoi pas ? Mais ça aurait été tellement plus éprouvant pour le personnage principal et nuancé pour le spectateur que d’avoir à faire à un personnage de Ferreira totalement convaincu par son rejet de la foi !
    Bref, à chaque fois ce fut la même chose. A chaque fois, Scorsese avait les clefs pour faire de ce « Silence » un film ambigu, un film universel… Mais non, en fin de compte il a préféré le réduire à un film flou ; d'un film plus complaisant au final qu'il n'est véritablement interrogateur. Le simple fait que le film se termine par spoiler: un crucifix dans les mains de Rodrigues
    suffit pour moi à tuer tout l'intérêt de l'intrigue. Quand même quoi ! Vraiment Scorsese n’a pas pu s’empêcher ! Il a fallu qu’au dernier moment il nous dise : « spoiler: Non mais je vous rassure ! En fait il n’a jamais douté ! On l’a juste forcé à se taire ! Au fond de lui c’était toujours un « vrai » ; un gars qui avait la foi ; parce que c’est inconcevable que des gens renient sincèrement leur foi !
    » Alors du coup, forcément ce « Silence » me frustre parce que d’une part , moi le sans-foi il m'exclu presque de-facto (mais encore passons). Mais en plus, ce « Silence » m’horripile aussi parce que son propos final est au fond assez malhonnête ; en mode « doute mais pas trop ». Et enfin, surtout, ce « Silence » m’exaspère au plus haut point parce qu'au fond, j'ai l'impression que cet aspect « film pour épargner les croyances » impacte aussi la forme, expliquant notamment de nombreuses « largesses » formelles fort mal venues. Qu’on passe plus d’une heure en plein de milieu de la campagne à observer la beauté de ces premiers chrétiens touchés par la foi, pour moi ça ne se justifiait pas. Qu’on ne regarde la chrétienté de ces gens là qu’au travers de la seule question de la foi, et qu’on exclut du coup des angles sociologiques, politiques, culturels, moi je trouve que ça biaise toute la démarche et empêche de créer un vrai univers de questionnement. Pire, je trouve que ça assèche l'univers et le ressenti de ce choc des cultures. Tout ça au service de quoi ? Tout ça au service d'une démarche de foi qu'on entend épargner chez les spectateurs. Alors après, certes, je n'ai rien contre la démarche, mais quand ça nuit à ce point au contenu et au propos final de ce film, je trouve ça quand même sacrément triste. Que la mise à l’épreuve du personnage principal soit si longue ; que l’opposition japonaise soit si monolithique et calqué sur le modèle de la passion du Christ menée par les Romains ; que la rencontre avec Ferreira mette plus de deux heures à se produire ; qu’il n’y ait finalement plus de flou que d’ambiguïté sur le bien-fondé de la foi du personnage principal ; tout ça, pour moi, ça tue le chef d'œuvre qu'aurait pu être ce film. Ça le rend long, lent, chiant, étroit d’esprit, alors qu’il est pétri de qualités formelles – et même narratives – qui ne demandaient qu’à rentrer en écho avec une œuvre davantage conciliante et ouverte à l’égard de son public. Bref, ça m’attriste de le dire, mais pour moi ce « Silence » ne m’apparait au final que comme un film limité et bridé, qui a mis en œuvre beaucoup de belles choses mais pour une démarche globale qui n’est pas du tout à la hauteur de l’événement. Ça peut mériter le déplacement pour les véritables curieux du cinéma, certes, mais malheureusement au risque de pas mal décevoir et frustrer. A savoir…
    Stephenballade
    Stephenballade

    395 abonnés 1 237 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 21 février 2017
    Probablement le film le plus réfléchi et le plus abouti de Martin Scorsese, sans doute parce que c’est aussi le plus personnel. Il faut dire que ça fait grosso modo 20 ans qu’il écrit ce film alors qu’il n’est ni plus ni moins que l’adaptation cinématographique du roman éponyme d’un écrivain japonais catholique. Aussi je ne rédigerai pas cet avis comme j’ai l’habitude de le faire. Parce que ce "Silence" va en surprendre plus d’un, et sera sujet à bien des controverses, ou tout du moins divisera le public. Et quand on regarde l’ensemble des commentaires publiés par les internautes, ça a déjà commencé. Il y a de grandes chances pour que ceux qui sont tombés amoureux du cinéma scorsesien à travers des œuvres telles que "Taxi driver", "Les affranchis", ou bien "Casino", ou plus récemment "Le loup de Wall Street", risquent fort d’être déçus. A l’inverse, ceux qui n’accrochent pas à son travail en général pourraient être agréablement surpris par ce "Silence". Pourtant, le cinéaste nous a habitués à nous offrir des spectacles diversifiés, avec notamment "La couleur de l’argent", ou encore "Les nerfs à vif". Là, non : il nous sert quelque chose de très différent, en sachant que je n’ai pas encore découvert "La dernière tentation du Christ", pas plus que "Kundun". Cependant on reconnait aisément la patte du réalisateur, notamment avec la narration en voix off si chère au cinéaste. Après, dans la mise en boîte, c’est certainement la réalisation la plus sage (ou sobre, comme vous préférez) que je lui connaisse. Pourtant, et c’est là qu’est le délicieux dilemme, on ressent très tôt la tension que suscitait une telle situation. Une tension qui va perdurer et évoluer tout au long du film. Cette tension qui fait qu’on sent que des choses graves peuvent se passer à tout moment, comme si nous étions sans arrêt sur le fil du rasoir. Cette tension se concrétisera même parfois par des scènes chocs dont les horreurs peuvent pousser le spectateur à détourner le regard spoiler: , en particulier lors des représailles faites sur la famille d’un chrétien japonais
    . Des scènes dures, il y en a quelques-unes, et c’est ce qui explique l’avertissement envers le jeune public. Ne nous y trompons pas, "Silence" n’est de toute façon pas fait pour un jeune public. Je ne suis même pas sûr qu’il soit accessible à tout le monde. Mais pour ceux qui seront captivés par le "jardinage des marécages", nul doute qu’ils trouveront cette œuvre poignante, sidérante, voire dérangeante. Quoiqu’il en soit, on ne peut en aucun cas rester indifférent devant ce douloureux épisode de christianisme, tout comme le personnage joué par Andrew Garfield ne l’est. Une fois de plus, ce comédien nous rend une copie parfaite, littéralement habité par son rôle comme il a pu l’être à l’occasion de "Tu ne tueras point". Je dirai même qu’il est peut-être un cran au-dessus… Pour le coup, il est tentant de dire qu’il a la foi en son personnage de la même manière que son personnage a la foi… en sa foi. Il faut dire qu’il s’est donné tous les atouts pour réussir sa prestation, en ayant étudié le jésuitisme durant un an, poussant même le vice à faire une semaine de vœu de silence lors d’une retraite spirituelle. Son interprétation est d’autant plus remarquable que les conditions de tournage ont été épouvantables, entre les pentes abruptes et accidentées et la boue épaisse donnée par une météo instable. Cependant Scorsese a réussi à tourner la météo à son avantage, avec des prises de vues embrumées, enveloppant ainsi une lointaine contrée d’un voile de brouillard qu’on peut interpréter comme étant le flou de… on va dire d’une "guerre ethnique" peu avouable. Avec son cadrage millimétré, il ressort de la mise en images une certaine austérité qui contribue à instaurer la tension dont j’ai parlé plus haut, mais une austérité qui magnifie les paysages naturels, les personnages, et le récit. Certains plans, notamment les portraits, remplacent avantageusement toutes répliques alors que le style de Scorsese est déjà, nous le savons tous, très bavard à la base, ce qui est encore le cas ici. Il en ressort une belle photographie, avec un magnifique plan qui annonce l’espoir de jours meilleurs, celui où on voit le bateau se dessiner au beau milieu des eaux océanes, en plein halo de lumière qui n’est rien d’autre que le reflet de la lune, avec en fond un immense tapis d’étoiles. Le plan qui m’a le plus marqué, et qui montre la grande maîtrise de la lumière naturelle, par ailleurs utilisée une bonne partie du film. Alors certes, tout n’est pas parfait. "Silence" n’est pas exempt de longueurs (notamment sur la fin), les prêtres portugais parlent anglais, une langue que même l’ensemble des paysans japonais maîtrise plus ou moins alors que nous ne sommes que dans la première moitié du XVIIème siècle ! De ce long "Silence", on retiendra surtout la profondeur du propos grâce à la précision chirurgicale des dialogues, espacés quelquefois par des moments de silence (si, si, il y en a) eux aussi très parlants, et grâce aussi à la très bonne interprétation des acteurs, à commencer par Andrew Garfield qui porte le film sur les épaules, ainsi que Liam Neeson qui a trouvé ici un rôle enfin à la mesure de son immense talent d’expression scénique. Plus le rôle est difficile, plus il est bon, je trouve… Bravo aussi à ces petits japonais "anonymes", en particulier à ceux qui accueillent les ecclésiastiques sur les terres du pays du Soleil Levant car ils sont criants de vérité et de naturel. Un film atypique, pas distribué dans toutes les salles, comme c’est souvent le cas des films vraiment particuliers et pendant lequel il est nécessaire d’observer le plus grand silence (oh !oh !) pour ne rien perdre de l’attention qu’il demande. Observez, écoutez, et regardez combien la mission de ces émissaires jésuites était difficile, engagés dans un combat visant à coloniser l’esprit des âmes d’un pays où même Dieu... observe le plus grand silence…
    benoitG80
    benoitG80

    3 410 abonnés 1 464 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 22 février 2017
    "Silence" est un film doté d'un apport essentiel, par cette histoire saisissante de prêtres se rendant au Japon en 1633, ce qui sous la houlette de Martin Scorsese n'est guère étonnant.
    Rien que pour les thèmes du doute, de la foi et de la culpabilité ici placés ici en plein cœur, on se sent déjà plus qu'intéressé par ce fait historique remarquable !
    Mais Scorsese choisit un traitement très hollywoodien dans son esthétique et dans la direction des acteurs, ce qui contribue à aseptiser le récit et à affadir l'enjeu du film...
    Ce qui implique que ce problème se retrouve aussi au niveau de l'acteur principal Andrew Garfield pas toujours crédible dans ce rôle difficile, par son aspect un peu lisse et très (trop) "comme il faut..." !
    Pour exemple, sa chevelure semble toujours avoir subi un beau brushing et sa barbe est toujours bien taillée, et de surcroît ce personnage manque de charisme et de conviction face aux acteurs japonais bien plus persuasifs et présents.
    Trop de larmoiements, un manque de punch évident chez cet homme, et c'est ainsi que par ricochet le film manque cruellement de force et d'impact !
    C'est d'autant plus dommage que cette histoire aux résonances assez actuelles, avait justement tant besoin pour son rendu, d'une brutalité, d'une férocité, qui font cette fois défaut...
    Ce qui pour résumer, se rapprocherait de la critique des Cahiers du Cinéma, sans doute un peu exagérée, quoique !
    Si Scorsese était taraudé par le sacré et la spiritualité à travers le roman de Shusaku Endo qu'il avait envie d'adapter (pour la deuxième fois au cinéma), son entreprise n'est donc pas à la hauteur de ses prétentions ou de ses aspirations, tout simplement à cause de ce choix, alors que finalement son compagnon de voyage, Adam Driver, aurait sans doute après réflexion plus fait l'affaire !
    Il n'en reste pas moins que "Silence" reste un cinéma intéressant, mais que justement à ce propos, il aurait encore plus pertinent de garder le silence total de bout en bout, sans qu'à aucun moment Dieu ne souffle mot...
    Un film qui manque donc de persuasion pour convaincre et atteindre profondément le spectateur, alors que la reconstitution historique était par contre vraiment à la hauteur.
    tony-76
    tony-76

    1 071 abonnés 1 410 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 11 février 2017
    « Je prie face au silence. » Silence est un film sur les persécutions subies par les chrétiens au Japon du XVII siècle. Dès l'introduction, le film fascine sur l'intelligence de ses questionnements religieux et moraux et son exploitation du silence de Dieu. Réalisé par le vétéran Martin Scorsese, le long-métrage est une adaptation du roman Silence de Shusaku Endo. Il met la foi de deux missionnaires jésuites (Andrew Garfield et Adam Driver) à l'épreuve spoiler: alors qu'ils se font persécuter par les autorités en voulant trouver leur mentor (Liam Neeson). Emprisonnés, ils doivent tout renier pour sauver leur vie et celles d'autres Chrétiens.
    On peut dire que ce Silence ne manque pas d'ambition ! Scorsese aura rarement offert un long métrage aussi fluide en soignant son montage fascinant, ses images naturels et sa densité sonore prenante. C'est imposant visuellement ! Des scènes intenses spoiler: - l'épuisement, la souffrance, la trahison et même la violence -
    sont au cœur de ce Silence. L'ensemble se base sur une lenteur avec ces 160 minutes qui finissent par agir sur les spectateurs. On est bien loin d'un Loup de Wall Street... Que l'on adhère ou pas à son courage, impossible de ne pas être ébranlé par la performance renversante d'Andrew Garfield. Pas surprenant que Mel Gibson ait vu quelque chose d'unique en lui sur son magnifique Hacksaw Ridge. L'ancien interprète de Spider-Man campe une impressionnante figure christique. Adam Driver et Liam Neeson spoiler: apparaissent trop peu à l'écran
    mais sont assez surprenants et viennent contribuer à son collègue. Enfin, Silence ne plaira pas à tout le monde car c'est un film à gros budget au service de l'art ! Un objet d'une rare beauté qui mérite d'être nominé aux Oscars, rien que pour la prestation d'Andrew Garfield.
    gimliamideselfes
    gimliamideselfes

    3 063 abonnés 3 967 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 16 février 2017
    N'ayant pas vu La dernière tentation du Christ, je n'ai pas forcément d'avis ou d'attentes particulières sur le cinéma plus mystique et religieux de Scorsese et j'aborde ce film sans trop savoir ce que je vais voir. Et le principal reproche que j'avais pu lire sur le film à savoir sa durée, se trouve être également pour moi son point faible. C'est un peu chiant, pas trop, ça va, ça passe, mais si j'ai suivi le film sans désintérêt, il y a quand même des moments moins forts, moins intéressants qui font qu'on sent une baisse de rythme, puis ça arrive malgré tout à repartir avec une scène très forte, avant de redescendre à nouveau.

    Disons que je l'ai trouvé un peu inégal. Pas inintéressant, loin de là, mais inégal malgré tout.

    Le sujet traité par contre est assez fascinant, je n'ai pas lu le bouquin, ni vu la première adaptation et je ne savais rien sur le christianisme au Japon, donc c'était tout un nouvel "univers" à découvrir pour moi. Il y a sans doute un parallèle à faire avec les premiers chrétiens à Rome et les persécutions qu'ils ont dû subir.

    J'aime beaucoup les questionnements abordés par le film, je les trouve vraiment très intéressantes, même si finalement j'ai trouvé que le film n'était pas assez "puissant" pour les porter totalement. Disons que j'aurai plus rêvé de voir un film en noir et blanc, bien austère comme il faut, quitte à ce que ça dure 5 heures. J'aurai aimé sentir ce côté chemin de croix, parce que les moments où j'ai un peu déconnecté du film c'était plus parce qu'il n'arrivait pas à me captiver sur ce passage là que parce que j'étais en souffrance devant le film.

    Dans les questions posées qui m'ont beaucoup plu, il y a logiquement tout le côté mythe de Sisyphe, inversé ici par rapport à l'exemple que donnait Camus avec Galilée où cette fois le religieux et non plus le scientifique est face à un dilemme, sa vie ou sa croyance. Le rapprochement est d'autant plus à faire lorsqu'il est question d’universalisme et de vérité, le chrétien croit (ou sait) que son dieu est universel, omniprésent (y compris au Japon donc), tout comme Galilée sait que ses trouvailles sont vraies malgré ce qu'en dit l’Église. On se retrouve donc avec deux détenteurs de vérités qui doivent soit les renier, soit devenir des apostats. Il est évident que je réagirais comme Galilée, non pas par lâcheté, mais par goût de la vie. Aucune vérité ne vaut de mourir pour elle. Sauf que pour les prêtres ce n'est pas juste une vérité qui n'est pas grave si on la renie. Le Soleil n'en veut à personne si on dit qu'il tourne autour de la Terre et c'est ça qui est fascinant, quel est le point de non retour, à quel moment on se dit qu'il y a eu assez de morts, qu'on a assez souffert et fait souffrir les autres pour une vérité "immortelle" ? Forcément l'homme est faillible et à un moment donné il va forcément devenir un apostat, se soumettre.

    La question morale se pose donc, est-ce-que "Dieu" préfère qu'on souffre pour lui, qu'on fasse souffrir des autres pour lui ou qu'on essaye de tendre vers le moindre mal, quitte faire croire qu'on devient un apostat tout en conservant sa croyance pour soi ? Mais il faut également prendre en compte pour eux que la vie sur Terre n'est pas la finalité, donc ce n'est pas forcément "grave" d'être un martyr.

    Bref c'est assez ambigüe et la réponse à ces questions n'est pas si aisée. Après j'ai trouvé que le film les esquisse seulement et aurait pu discuter plus de la question (lors des fameux champ/contre champ) mais surtout le faire sentir par la mise en scène. Disons que je n'aime pas du tout Garfield dans ce rôle là (je ne l'aime pas au départ non plus), il ne m'évoque rien, son visage ne me transmet rien. Dans Hadewijch de Dumont je sens la foi de l'héroïne, je la sens par la mise en scène, mais également par son interprétation, ses petits regards hors champ, etc.

    J'ai l'impression que ce qui n'est pas dit par le film et auquel j'ai réfléchis pendant le film est plus intéressant que le film lui-même. Après c'est lui qui m'y a fait penser... donc je sais pas trop...

    Un autre questionnement que j'ai trouvé intéressant c'est celui de comment détruire une foi en l'empêchant de proliférer, par des répressions, mais surtout en coupant la tête de cette propagation. Et se pose alors une question, également abordée dans le film, celle de l'incompréhension entre les japonais et les chrétiens, les deux qui ne savent rien l'un de l'autre, qui se jugent, qui se jaugent et qui finalement se méprisent pas mal. Au-delà de ça, la question de la légitimité à aller évangéliser les japonais se pose aussi. Oui c'est une vérité universelle, mais encore ? On peut tout à faire comprendre que des japonais n'ont pas envie que des étrangers remettent en cause leurs traditions, leur façon de faire, de penser, etc.

    Il y a quelques discussions assez fortes qui arrivent à l'illustrer.

    Si je trouve donc le film intéressant, je ne le trouve pas non plus totalement abouti, ne parvenant donc pas à m'émouvoir, malgré quelques séquences vraiment réussies, notamment lorsque la caméra épouse le regard de Garfield enfermé dans sa cage totalement impuissant face à la barbarie en face.

    Et je n'aime pas cette fin à la "et pourtant elle tourne" pour revenir chez Galilée, je trouve ça grossier, surtout avec la manière avec laquelle elle est amenée, très tape à l’œil... Et ça rejoint mon avis sur le reste du film, j'aurai aimé quelque chose de plus radical, de plus austère et de plus désespéré.
    Naughty Doc
    Naughty Doc

    909 abonnés 432 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 8 février 2017
    Dire que j'attendais ce film est un doux euphémisme, en effet cela fait des années que Scorsese en parle (sans doute le réalisateur qui m'a le plus marqué et dont j'ai vu tous les films au moins 3 fois), qu'il souhaite mettre en projet depuis une vingtaine d'années. Scorsese le dit lui-même, il n'était pas assez "mûr" pour tourner Silence, histoire de 2 jésuites (Sebastião Rodrigues joué par un Andrew Garfield parfait, et Francisco Garupe, incarné par un excellent Adam Driver) qui partent au Japon chercher le père Ferreira (Liam Neeson qui revient dans un grand rôle), qui selon des rumeurs aurait fait acte d'apostasie et renoncé à la foi. Envoyés par le père Valignano (Ciaran Hinds), nos 2 jésuites vont enquêter dans le Japon du XVIIe siècle au temps des Kakure Kirishitan ("les Chrétiens Cachés"). En effet toute preuve de chrétienté était sévèrement réprimée de manière plus ou moins violente.

    Chaque film de Scorsese est un évènement pour moi, et ayant lu le livre sur lequel l'histoire du film est basé, j'avais véritablement hâte.

    Je vais commencer par dire que le film ne parlera peut-être pas à tout le monde. En effet la foi, ce qu'elle représente et jusqu'où peut-on aller pour renoncer à nos croyances sont des thèmes majeurs et présents tout au long du film, qui dure longtemps. Personnellement je n'ai jamais trouvé le temps long, tant les acteurs sont habités par leur rôle, tant les dialogues sont incroyablement bien écrits, la mise en scène et la réalisation de très très haut niveau (je n'ai pas peur de dire qu'il s'agit sans doute du film le plus abouti de Scorsese au niveau de la forme),la photographie excellente,l'ambiance générale prend au trip et l'histoire est vraiment narrée intelligemment.

    C'est simple, tout dans ce film respire ce sentiment qu'on est non pas en train de regarder une oeuvre de maître cinématographique,mais en train de vivre quelque chose. Tout au long du film on suit ces 2 jésuites plein de bonne volonté, qui se heurtent à la violence, au doute,au refuge dans la foi : c'est un film qui n'est pas facile à regarder, interpellant le spectateur à un niveau spirituel (au final qu'on soit chrétien ou non, c'est l'aspect spirituel et le fait qu'on ait des convictions et comment faire face à la nature humaine pour les garder qui est traité ici) et émotionnel que je n'avais jamais vu dans la filmographie de Scorsese. Des questions sont soulevées pendant une très bonne partie du film notamment dans sa seconde moitié : quelles sont les conséquences d'amener une religion sur un autre territoire ? Qu'est-ce qui fait de nous des croyants ? Renonçons-nous à l'apostasie par foi véritable ou par pure fierté ?
    En résumé on a sans aucun doute le film le plus exigent d'un point de vue intellectuel de la part de Scorsese, un film qui fait vraiment réfléchir le spectateur, dépassant le cadre du divertissement ou de l'art.

    Andrew Garfield tient son meilleur rôle. Je n'ai rien à ajouter si ce n'est qu'il est véritablement habité par son personnage et ce dès le début, jusqu'à la toute fin où j'étais vraiment époustouflé, je n'en dis pas plus.

    Adam Driver est également fantastique et ne démérite pas du tout. Liam Neeson n'est pas beaucoup présent à l'écran mais nous gratifie d'un personnage complexe questionnant à la fois les personnages du film et le spectateur et le tout avec une interprétation brillante.

    Le reste du casting, majoritairement japonais est irréprochable également, jusqu'aux figurants.

    Les scènes très violentes,tant physiquement que psychologiquement, des croyants obligés de marcher sur une représentation du Christ ou condamnés à des mises à mort...qui ne laissent pas indifférent, malgré une mise en scène non-graphique et pleine de sérénité, qui élève encore une fois l'image à un tout autre niveau quasi spirituel.

    La Bande Originale de Kim Allen Kluge et Kathryn Kluge est très discrète privilégiant le silence et les sons naturels.

    En terme de décor, Scorsese a parfaitement su insuffler une ambiance parfois onirique et d'autres fois assez cauchemardesques (cette scène de plage où des Chrétiens sont placés sur des structures en bois me fait encore froid dans le dos

    Définitivement un des films les plus complexes de Scorsese et son plus abouti en terme de réalisation,avec des acteurs monumentaux,un film qui marque réellement le spectateur par son propos et où il nous emmène intellectuellement. Une expérience cinématographique très riche à vivre par soi-même, nous posant énormément de questions pertinentes.

    Martin Scorsese prouve encore une fois qu'il est le maestro, en livrant une nouvelle oeuvre marquante qui peut dorénavant être considérée comme un de ses nouveaux classiques :love2:
    anonyme
    Un visiteur
    5,0
    Publiée le 9 février 2017
    Film extraordinaire, ayant vécu au Japon de nombreuses années, je suis vraiment bouleversé après avoir vu ce film. Il explique parfaitement ce qu'est le Japon. Un pays ténébreux où la beauté cache une noirceur incroyable. Bravo !
    traversay1
    traversay1

    3 567 abonnés 4 859 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 9 février 2017
    On a assez dit et répété que Silence est un projet qui hante Martin Scorsese depuis de longues années. Mais pourquoi, d'ailleurs, si ce n'est parce que le roman de Susaku Endo brasse toutes les thématiques qui agitent le cinéaste, ancien séminariste, on le sait : la foi, le doute, la violence, l'ouverture au monde. Petite parenthèse : dans le futur, Martin Scorsese sera sans doute aussi célébré pour son rôle à la tête de sa Fondation pour la restauration de films du monde entier que pour sa prestigieuse carrière de réalisateur. Silence donc, que l'on peut considérer au fond comme une sorte d'autobiographie ou tout du moins d'une synthèse de vie, où le mystère de la foi tient l'une des premières places. Déjà, le film n'est pas spectaculaire, il est même relativement austère, exigeant même, qualificatif souvent employé en lieu et place d'ennuyeux, ce qui n'est absolument pas le cas ici. 161 minutes, oui, mais qui n'ont rien d'un étouffe-chrétien, si l'on ose dire. Pour commencer, la mise en scène ample et majestueuse glorifie les paysages maritimes et les processions dans la brume, c'est magnifique. Ensuite, s'il est vrai que Silence est bavard (sic) et qu'il faut bien admettre que nos jésuites portugais parlent anglais, cela n'enlève rien à la limpidité d'une intrigue intelligemment menée et clairement exposée, ce qui n'est pas si fréquent dans un cinéma contemporain où l'on cache un certain vide narratif en complexifiant le récit au possible. Le film n'est pas exempt de longueurs et de répétitions mais cela n'est rien dans une oeuvre qui propose (plutôt qu'impose) une vision très personnelle de la croyance religieuse, doutes et remises en question comprises. On n'est pas obligé de la partager, cette vision, mais au moins convenir qu'elle puisse être écoutée et discutée, de la part d'un cinéaste qui est un auteur à part entière et qui n'a pas peur d'aller au "front" avec un sujet dont le défi est de s'adresser aussi bien aux croyants qu'aux athées et aux agnostiques. Silence est ouvert au questionnement y compris lorsque cette histoire des derniers prêtres au Japon prend une résonance particulière dès lors qu'on lui trouve des échos très contemporains. La mission de ces jésuites en terre étrangère ressemble à une tentative de colonisation des esprits en imposant une religion qui correspond mal à une culture basée sur d'autres coutumes. L'humilité des jésuites et leur caractère de martyrs est aussi au service d'une cause totalitaire et fanatique, du moins on peut la voir comme telle. Cette ambigüité est aussi dans le film au milieu d'une foultitude de thèmes pas nécessairement creusés mais qui l'enrichissent de façon souterraine. A chacun son Silence, en quelque sorte, avec la liberté d'y voir tel ou tel message. Andrew Garfield, beaucoup plus inspiré que dans Tu ne tueras point, porte une grand partie du film sur ses épaules. Tâche écrasante dont il se tire bien au détriment d'un Adam Driver moins présent et qui parait peu à l'aise, moins en tous cas que dans Paterson. L'espace de quelques scènes, Lima Neeson montre de son côté quel comédien extraordinaire il peut être pour peu qu'on lui donne du grain à moudre. Enfin, très bonne interprétation de la part des comédiens japonais et notamment de Yosuke Kubozuka, savoureux Judas (de l'humour dans Silence, si, si, il y en a !). On ne prend pas nécessairement de plaisir immédiat devant Silence mais c'est un film qui travaille longtemps après la projection, et encore, et encore.
    Estonius
    Estonius

    3 332 abonnés 5 452 critiques Suivre son activité

    1,5
    Publiée le 2 janvier 2020
    Tout le monde a le droit de se planter mais il est triste de constater à quel point ce grand réalisateur a pété les boulons. Au départ c'est un bouquin mais le scénario est de Scorsese; et il est évident qu'il s'identifie à Rodrigues et qu'il revendique ses propos. Or Rodrigues non seulement à un comportement et un look christique, et pour ceux qui n'auraient pas compris, c'est le visage de Jésus qu'il voit quand il se mire dans l'eau du ruisseau. Donc Scorsese se prend pour Jésus ! Elle est quand même dure à avaler celle-là. Maintenant le récit, j'ai toujours estimé qu'un réalisateur avait parfaitement le droit de s'éloigner de la vérité historique, encore faut-il que cet éloignement ne s'apparente pas à du révisionnisme et là on en est vraiment tout près. Car si les japonais ont interdit la propagande chrétienne ce n'est pas parce qu'ils sont méchants, mais parce qu'une première vague d'évangélisation avait fini par créer de gaves troubles internes. De ça peu de gens le savent et Scorsese se garde bien d'en parler… Non il fait plus simple :les japonais bouddhistes sont de cruels fanatiques et les chrétiens sont bons, manichéisme quand tu nous tiens ! Le reste du film avec ses questionnements s'adresse aux chrétiens, sur le thème "les desseins de Dieu sont impénétrables" et je me suis jamais senti concerné. Parlons aussi de la réalisation souvent plate malgré une bonne photographie, avec des dialogues champs contre champs, des longueurs à provoquer des bâillements, des scènes qui se répètent, un manque d'empathie pour les personnages, quelques complaisances dans la violence et une direction d'acteurs peu convaincante. Bref je n'ai pas du tout aimé ce film
    AMANO JAKU
    AMANO JAKU

    323 abonnés 797 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 21 février 2017
    Je ne cache pas que j’aime beaucoup Martin Scorsese mais j’ai rarement apprécié ses « intrusions » dans le domaine de la religion ("La Dernière tentation du Christ" et "Kundun"). C’est donc un peu avec une certaine méfiance que je suis allé voir "Silence"…et finalement, je n’avais pas tort d’avoir des doutes : même si je ne peux nier qu’encore une fois la réalisation de Scorsese est impeccable (à 74 ans il fait toujours preuve d’une maîtrise bluffante !), je dois bien avouer que "Silence" me laisse perplexe…D’un côté, le sujet même du film nous donne droit à une intelligente et subtil réflexion sur la foi : tout fraîchement débarqué de l’occident, le père Rodrigues se prend dans les dents de la part du pouvoir japonais ce que l’Eglise Catholique a fait subir à travers toute l’Europe pendant sa grande période de colonialisme inquisitoire. Et, aussi incroyable (hypocrite ?) que cela puisse paraître, cela remet en cause sa foi…Le plus remarquable dans tout ça c’est que Scorsese ne fait le procès de personne : le péché des chrétiens partis convertir à tout prix une autre culture n’est pas montré du doigt ; et les japonais ne sont jamais diabolisés, ils sont même plutôt « justifiés » au fil des différents dialogues entre Rodrigues et ces geôliers. Ce face à face brutal entre le européen colonialisme et l'inquisition japonaise amène dans un sens comme dans l'autre au même constat, énoncé directement dans le métrage par un vieux proverbe local (« Les montagnes et les rivières peuvent être bougées mais pas la nature de l'Homme ») : on peut tenter de convertir un peuple tout comme on peut tenter de pousser un croyant à renier sa foi, mais, au final, cela est forcément voué à l'échec. Malheureusement, d’un autre côté, Scorsese abuse peut-être un peu trop de la qualité visuelle de son bébé : même s’il est intéressant, le film aurait pu facilement durer 20 à 30 minutes de moins sans pour autant affaiblir son propos…au lieu de cela, il traîne en longueur et finit par ennuyer car, soyons franc, "Silence" c'est 2h40 de Jésuites emprisonnés qui ne font rien à part se demander comment réagir et à tenter vainement de communiquer avec un Dieu qui ne répond pas…pas réellement attrayant n’est-ce pas ? Autre petit point noir du métrage, le casting : si on peut fermer les yeux sur l’inexpérience d’Adam Driver en tant que tête d’affiche (et puis, il s’en sort pas si mal que ça finalement) et sur la sous-exploitation de Liam Neeson (malgré sa rareté à l’écran, quand il est là, il en impose réellement !), on ne peut que soupirer grandement sur le choix d’Andrew Garfield qui n’a absolument pas évolué depuis ses piètres prestations de mollusque inexpressif dans les "Amazing Spiderman". Il n’est pas très crédible et les grimaces qu’il essaye de faire passer pour des émotions ont plus tendances à agacer qu’autre chose…Scorsese aurait pu trouver mieux quand même (ça sent le caprice de producteur ça !!), comme Aaron Taylor-Johnson ou même Taron Egerton par exemple. Finalement, c’est le casting japonais qui est le plus méritant (Tadanobu Asano, Yôsuke Kubozuka, Yoshi Oida, Shinya Tsukamoto). Visuellement et techniquement magnifique, "Silence" pêche notamment par une durée inappropriée et un rythme trop contemplatif ainsi qu’un protagoniste principal hors sujet. Cependant, Scorsese a le mérite (le courage plutôt) de se permettre d’exprimer son point de vue sur la religion, remettant en cause cette dernière sans jamais être moralisateur : la foi ne se limite pas aux normes imposées par le Vatican, elle se vit en silence, en accord avec soi-même et sans aucun prosélytisme. Les convictions de chacun sont ainsi préservées et cela est assez rare au milieu des productions US habituelles du genre bourrées de bons sentiments chrétiens pour des raisons purement commerciales : si ça c’est pas un miracle !....sinon, c’est quand même un peu trop long pour accrocher un large public (surtout si vous êtes pas croyant !).
    poet75
    poet75

    270 abonnés 703 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 11 février 2017
    Que penser du nouveau film de Martin Scorsese, film dont le cinéaste caressait le projet depuis bien des années et qu'il a donc eu le temps de longuement mûrir ? Je n'ai nullement la prétention, bien évidemment, d'assener un jugement catégorique : que chacun se fasse sa propre opinion sans trop tenir compte des réactions assez vives que l'on peut glaner ici et là dans les magazines ou sur le net. Les uns parlent d'un film pénible et éprouvant, allant jusqu'à affirmer que le vrai martyre du film est pour le spectateur ! D'autres, au contraire, estiment que l'on a affaire à un chef d'oeuvre et à un réalisateur en état de grâce.
    Laissons de côté tout ce qui est excessif. Le film n'est pas parfait, on est en droit de le trouver trop long et de juger que quelques ficelles scénaristiques auraient pu être évitées (y compris la scène ultime du film, en forme de pirouette, qui peut sembler superflue). Cela étant dit, si je peux comprendre que ce film paraisse pénible à ceux qui sont totalement rétifs aux questions qu'il soulève, je ne partage pas du tout le point de vue de ceux qui le trouvent raté sur le plan de la forme. Au contraire, il m'a semblé que cette œuvre si longuement préparée par le cinéaste a été réalisée avec un grand sens de la mise en scène, si grand que, malgré sa durée (2h41), le film m'a littéralement fasciné du début à la fin.
    Mais venons-en à ce qui nous touche au plus profond de l'être, aux questions de foi, de charité, de mission que soulève ce film. L'histoire ici contée, inspirée de faits réels, a été imaginée par le grand romancier catholique Shûsaku Endô (1923-1996) et elle avait déjà été adaptée au cinéma par Masahiro Shinoda en 1971. Ayant moi-même lu le roman il y a une dizaine d'années, j'en avais gardé un souvenir très fort et j'étais donc curieux et quelque peu inquiet de le voir adapté sur grand écran par Scorsese. Toute mon appréhension a été balayée : le cinéaste est resté fidèle au livre et, lui qui avait déjà abordé, mais jusqu'ici maladroitement, la problématique de la foi dans sa filmographie, le fait ici d'une manière convaincante, interrogative plutôt qu'affirmative.
    La foi mise à l'épreuve, la foi confrontée à la souffrance et à la mort : c'est ce dont il s'agit. Les deux jésuites, le le père Sebastião Rodrigues (Andrew Garfield) et le le père Francisco Garupe (Adam Driver), qui se font un devoir de partir au Japon à la rencontre des chrétiens pourchassés et martyrisés et dans le but de retrouver leur mentor, le père Ferreira (Liam Neeson), suspecté d'apostasie, ne peuvent imaginer par quelles épreuves ils vont devoir passer. Ce qu'ils vont avoir à supporter, Scorsese l'indique avec pas mal d'habileté, n'est pas sans rappeler la Passion du Christ. Il ne s'agit pas d'une copie de cette dernière, mais de souffrances et d'épreuves qui s'y réfèrent. Il y a une sorte de Judas dans le film de Scorsese, mais son comportement n'est pas totalement identique à celui des Evangiles. Il y a surtout des interrogatoires, d'atroces souffrances et l'épreuve la plus difficile, celle de la déréliction. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? », tel fut le cri de Jésus sur la croix (Mt 27,46), tel est l'appel qui monte du cœur du père Rodrigues face aux souffrances qu'il faut endurer et à celles dont il est le témoin effaré. Le silence, qui donne au film son titre, c'est le silence de Dieu. Où est-il, que fait-il, quand ses enfants endurent les pires tribulations ? Le film de Scorsese pose la question sans imposer de réponse mais en indiquant une piste : si Dieu semble se taire, c'est peut-être parce qu'il est, lui aussi, en train de souffrir avec l'humanité...
    Tout le film est construit sur ce modèle : il pose de redoutables questions, il les pose adroitement, mais en se gardant de donner des réponses simples qui pourraient rapidement apparaître simplistes. Les questions abordées par le film sont nombreuses et trop complexes pour qu'on puisse s'autoriser à donner des réponses toutes faites, Scorsese l'a bien compris. Quand, par exemple, l'on débat au sujet de l'annonce de la foi chrétienne à des peuples qui lui sont culturellement très éloignés, il n'est pas admissible de répondre avec légéreté. Les Japonais convertis le sont-ils vraiment, la foi est-elle enracinée en eux ? Dans ses échanges avec le père Rodrigues, l'inquisiteur émet de sérieux doutes à ce sujet et personne ne peut lui répliquer de façon péremptoire.
    Quant à la troublante question de l'apostasie de quelques-uns, à commencer par le père Ferreira, elle ne saurait se résoudre, elle non plus, ni par un rejet pur et simple, ni par un décret, ni par une condamnation. L'Eglise catholique honore les martyrs, c'est vrai, mais doit-elle pour autant honnir les apostats ? Le film de Scorsese, fidèle au roman de Shûsaku Endô, montre que rien n'est simple. Ceux qui ont cédé lors de la cérémonie du fumi-e, autrement dit ceux qui ont accepté de piétiner une image sacrée, l'ont-ils fait par peur, pour sauver leur propre peau, ou plutôt pour sauver celle des autres, pour faire cesser leurs insupportables souffrances ? Dans ce cas, le reniement public à la foi chrétienne n'est-il pas assimilable à un acte de charité, de compassion, de miséricorde ? Qui se permettra de juger ?
    Je ne peux, dans le cadre restreint de ma critique, restranscrire toutes les questions soulevées par ce film. Mais je ne peux qu'encourager à aller le voir (en mettant en garde, toutefois, ceux pour qui les scènes de violence seraient insupportables) et à en débattre. Car, oui, ce film est important, il est réalisé avec grand talent et il peut susciter bien des échanges chez tous ceux que les questions de la foi et de son annonce interpellent. De plus, et je le dis pour finir, « Silence » met en scène des personnages qui ne sont ni des archétypes ni des symboles : on ne peut les réduire à leur fonction. Pour le dire sans détour, on n'a pas affaire aux bons jésuites contre les méchants persécuteurs japonais. Chaque personnage garde son mystère et sa complexité et l'inquisiteur lui-même ne peut être réduit à un rôle de tortionnaire. Ses motivations ne se limitent certes pas à des instincts de cruauté. De ce point de vue aussi, du point de vue de la complexité des personnages, le film de Scorsese est une réussite. 9/10
    Freakin  Geek
    Freakin Geek

    246 abonnés 883 critiques Suivre son activité

    1,5
    Publiée le 12 février 2017
    Il faut être réellement porté par la foi ou un amour inconsidéré pour Martin Scorsese pour trouver le moindre intérêt à Silence. Certes les images de paysages sont très belles mais c’est à peut être tout ce qu’on retiendra du film qui semble répéter inlassablement les mêmes scènes pendant près de trois heures. Il y aurait certainement été facile de tailler dans le gras pour faire un film un peu plus rythmé mais cela n’aurait pas forcement empêcher la faiblesse d’un scénario qui n’arrivera jamais à nous émouvoir. [lire la critique complète sur le site]
    L'Info Tout Court
    L'Info Tout Court

    411 abonnés 1 025 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 8 février 2017
    Sublime, poignant, renversant, sidérant. Le long-métrage est d’une force rare, même pour un réalisateur comme Martin Scorsese. Le combat physique et psychologique de tous les instants est parfaitement transmis aux spectateurs. On ressort de la projection tourmenté et le film ne parvient plus à quitter notre esprit. À noter également qu’on est surpris de revoir Liam Neeson dans un bon rôle.
    tixou0
    tixou0

    697 abonnés 1 999 critiques Suivre son activité

    0,5
    Publiée le 11 février 2017
    "Silence".... On a très vite (au bout de 10 minutes, au plus), envie d'ajouter ".... on ne tourne pas" !
    Ou si peu, et à vide... Un grand film sur une grande cause, celle des Chrétiens du Japon, (paisiblement - mais en ayant à l'esprit de possibles retombées commerciales fructueuses) évangélisés par les Jésuites, surtout portugais, au 16e siècle, avec succès, ce qui désorganisa le système féodal en place et, entraînant des conflits entre seigneurs convertis et non-convertis, aboutit à des persécutions d'une grande ampleur (et cruauté), puis à l'interdiction du catholicisme dès 1614, et jusqu'à l'ère Meiji, au milieu du 19e siècle, on pouvait imaginer Scorsese en bâtir un ! Las....On ne croit pas un instant à cette Eglise des Ombres, avec des communautés villageoises à foi du charbonnier, renouvelant à l'Est la ferveur des premiers Chrétiens, ceux des catacombes – au mieux, on visionne comme si c'était une sorte de protodocumentaire. Jamais on ne s'intéresse, jamais on n'entre en empathie (ce qui est infiniment gênant, eu égard au thème abordé).. L'image est saint-sulpicienne, les "padres", plutôt fantoches, supposés lusitaniens, s'expriment en anglais, et dialoguent dans la langue de Shakespeare (ou à peu près) avec des humbles autochtones, jamais partis de leurs villages misérables de pêcheurs, à un Judas/apostat récidiviste local près - en revanche le shogun aura besoin, lui, d'un interprète (mais j'imagine le ridicule supplémentaire de la version doublée : des acteurs anglophones jouant des Portugais, parlant français, avec des Japonais, parlant anglais en VO !..).... Et que c'est long, ces 2 h 40... A défaut d'un film convaincant sur la foi et le martyre (à compter de la capture par l' « Inquisiteur », en particulier), cela aurait pu être au moins un film d'aventures se laissant regarder sans déplaisir : même pas. Du pataud, du délayé, et de l'ennui... Beaucoup d'ennui.
    Yves G.
    Yves G.

    1 456 abonnés 3 485 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 15 février 2017
    Au XVIIème siècle, des missionnaires chrétiens ont commencé l’évangélisation du Japon avant que le pouvoir shogunal, inquiet de ces influences étrangères, ne prohibe la foi catholique et n’interdise à ces prêtres l’accès à l’archipel. Deux jeunes Jésuites bravent cet interdit pour retrouver la trace d’un des leurs dont la rumeur prétend qu’il aurait apostasié.

    « Silence » est l’adaptation du roman éponyme de Shūsaku Endo, un auteur japonais né au début du XXème d’une mère chrétienne, qui a suivi une partie de ses études en France et dont l’œuvre est souvent comparée à celle de l’écrivain catholique Graham Greene. Écrit en 1966, « Silence » ne fut traduit en français qu’en 1992 (Denoël) et publié en poche en 2010 seulement (Folio) quand la rumeur se répandit que Scorsese en préparait l’adaptation.

    Le grand maître, qui abandonna le séminaire pour le cinéma et dont toute l’œuvre est traversée par un questionnement sur la foi, en réalise une adaptation grandiose aux dimensions hors normes. « Silence » dure deux heures quarante et une, une durée à laquelle le rythme pétaradant et la brièveté des courts épisodes des séries TV ne nous ont plus habitués. La photographie de Rodrigo Prieto livre quelques plans d’anthologie : trois prêtres descendant l’escalier monumental d’une église, une jonque voguant sur la mer de Chine, une plage battue par les vents où débarquent clandestinement les deux missionnaires.

    « Silence » est un film sur la foi. La foi qu’on possède. La foi qu’on transmet.

    La foi qu’on possède. Difficile de ne pas céder à l’anachronisme en interprétant à l’aune de nos mondes désenchantés la foi qui animait deux missionnaires du XVIIème siècle. Qu’on croit au Ciel ou qu’on n’y croit pas, bien dérisoire nous semblera aujourd’hui l’épreuve du fumi-e pratiquée par la police shogunale afin de dépister les croyants : fouler au pied l’effigie du Christ ou mourir dans les pires tortures (noyades, crucifixions, pendaisons par les pieds, ces tortures raffinées sont filmées avec le voyeurisme malsain qui caractérise nombre des réalisations de Scorsese). Peut-on abjurer sa Foi pour sauver la vie de ses Frères ? Ou faut-il au contraire souffrir le martyre pour sauver leurs âmes ?

    La foi qu’on transmet. Comme « Mission » de Roland Joffé – mais avec autrement plus de subtilité et beaucoup moins de musique – « Silence » interroge les desseins de l’Église une, sainte, catholique et apostolique. Le post-colonialisme est passé par là. Il y a trente ans, dans « Mission », les Guaranis étaient des victimes passives des guerres de conquêtes qui opposaient l’Espagne au Portugal en Amérique latine. Dans « Silence », le Japon est devenu l’agent de son destin. L’inquisiteur Inoue-Sama incarne à merveille le raffinement et l’intelligence de cette résistance aux influences étrangères. Une résistance qui durera plus de deux siècles jusqu’à ce que les bateaux du Commodore Perry ne forcent la baie d’Edo et ne contraignent le Japon des Meiji à s’ouvrir au monde.

    Revenons à nos Jésuites. On ne dira pas comment ils résoudront, chacun à leur façon, les dilemmes auxquels ils sont confrontés. Ces questions auraient pu rester en suspens, laissant à chaque spectateur le soin d’y apporter leur réponse. Scorsese prend un parti différent, nous livrant dans une dernière scène bouleversante la clé de ces questionnements.
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