Mais qu’arrive-t-il à Anne Fontaine depuis une décennie? C’était l’une des rares cinéastes féminines françaises installées depuis longtemps dans le paysage cinématographique tricolore, plus exactement le début des années 90, et dont les films étaient de qualité relativement constante. Révélée avec les « Augustin » et consacrée par le troublant « Nettoyage à sec », on lui doit d’excellents films tels que « Entre ses mains », l’un des premiers rôles sérieux de Benoît Poelvoorde, ou encore le sublime mélodrame tourné en Australie avec des actrices américaines « Perfect Mothers ». Depuis dix ans, soit elle tourne trop, privilégiant sans le vouloir la quantité plutôt que la qualité, soit elle a perdu sa « libido cinématographique ». En tout cas, aucune de ces œuvres n’a marqué les esprits depuis le film historique en noir et blanc « Les Innocentes » il y a dix ans. De son anecdotique « Marvin et la belle éducation » à son tristement raté « Présidents » au sujet pourtant en or, elle ne convainc plus.
En choisissant de narrer l’histoire de la création de l’un des morceaux de musique classique les plus célèbres de l’Histoire, le « Bolero » de Maurice Ravel qui donne son nom au film, on avait envie de croire à son retour. Malheureusement, le film est encore une fois raté si l’on excepte quelques (rares) fulgurances. La cinéaste cale à rendre intéressante la naissance et l’origine de la composition de morceau phare. Tout comme elle ne parvient pas à rendre passionnant le portrait du musicien, compositeur et chef d’orchestre, pourtant magnifiquement interprété par Raphael Personnaz, un acteur de qualité bien trop rare sur le grand écran. Il est peut-être l’une des seules raisons qui rend le film relativement agréable par instants. Et peut-être aussi Emmanuelle Devos, la seule dans tous ces seconds rôles féminins que l’on retiendra. En effet, on a connu Doria Tillier plus convaincante qu’ici où elle joue de manière trop moderne en comparaison de ses camarades quand Jeanne Balibar nous a déjà joué ce rôle de diva (comme dans le récent chef-d’œuvre « Illusions perdues ») et en fait un peu trop en Ida Rubinstein.
On retiendra tout de même dans la seconde partie les séquences où le mythique morceau fait office de bande originale récurrente avec en point d’orgue sa première présentation par la Rubinstein. Envoûtant comme peut l’être cette magistrale musique qui a marqué son temps et galvanise encore aujourd’hui, elle hypnotise et magnifie lesdites scènes. Hormis cela, c’est lent, c’est long et c’est monotone, surtout dans la première partie. La réalisation chic mais sage de Fontaine n’aide pas. Un tel morceau qui devient de plus en plus intense aurait dû accoucher d’un film du même acabit. Ce qui n’est jamais le cas entre flashbacks inutiles et maladroits, histoire d’amour contrariée inintéressante et explication de la création du morceau plutôt maladroite. Le scénario et la mise en scène n’ont pas choisi le bon angle et « Boléro » en devient conséquemment un film peu engageant où l’ennui gagne vite le spectateur. Alors on aura appris quelque chose certes, mais on en attendait bien plus. Soit une œuvre dans la lignée de cet illustre chef-d’œuvre de la musique classique...
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