Depuis « Augustin », je suis fidèle au cinéma d’Anne Fontaine, et à chaque fois surpris par son éclectisme, allant de « l’anti moralisme» de Perfect Mothers, à la légèreté de Gemma Bovary, en passant par les bouleversantes Innocentes, pour moi son meilleur film…Alors par fidélité je suis aller voir Boléro…Je ne connais pas Ravel, pas plus son œuvre, à part cet entêtant Boléro qui lui fût commandé en 1927 par la fantasque danseuse Ida Rubinstein…un Boléro qui est l’un des rares tubes de la musique classique, pompe à cash de la SACEM et de ses héritiers qui se battent encore, décliné à toutes les sauces comme le montre l’inénarrable présentation du générique…variation sur 17 minutes, d’un thème qui n’en dure qu’une...Disons le tout de suite, Boléro est esthétiquement un beau film, le film a été en partie tourné dans la maison de Maurice Ravel, le Belvédère à Montfort l’Amaury dans les Yvelines et en partie dans l'une des très belles villas de Trestraou près de Perros Guirec… Anne Fontaine évoque les années 1920 avec ravissement, servie par une superbe conception artistique, une mise en scène un peu surchargée comme l’était cette époque… la photographie est splendide et le travail sur la lumière, admirable ... Au prétexte de décrire la genèse d’une des œuvres musicales dont le succès n’a fait que s’amplifier depuis 1928, année de sa création, c’est le portrait d’un artiste, solitaire, sans épouse ni enfant, entouré de trois femmes, l’excentrique Ida Rubinstein ( Jeanne Balibar qui s’en donne à cœur joie) Misia Sert (Dora Tillier au diapason), grande figure parisienne de son temps, femme émancipée, intrigante et fascinante, elle-même pianiste, et Marguerite Long ( Emmanuelle Devos, discrète et juste) sa sœur d’âme , son amie discrète et sincère, grande pianiste elle aussi, une trilogie de la femme qui trouve son origine dans la mère de Ravel (Anne Alvaro), une femme douce et cultivée qui jamais ne doutera du talent de son fils, malgré ses cinq échecs au prix de Rome dus au décalage entre l’académisme requis et l’avant-gardisme affiché…Toutes sont aux yeux d'Anne Fontaine au cœur de Maurice Ravel. Aussi, du père, il ne sera jamais question. Raphaël Personnaz, qui joue Ravel, est de tous les plans, élégant, charmeur, sinon irrésistible, mondain, enfermé à l’intérieur de lui-même…
C’est plaisant, intemporel, cela se laisse voir sans déplaisir…c’est un peu long et dommage alors que la cinéaste n’ait pas clos son récit, à la première du Boléro.