Wong Kar-waï utilise, avec 2046, la même recette que pour In The Mood for Love, à savoir, une composition très soignée de tout son cinéma. Le réalisateur ne se contente en effet pas de ses fabuleuses images, signées Christopher Doyle, ni de sa bande-son, aussi touchante que celle de son précédent film : Wong Kar-waï parvient à créer des instants entre ses acteurs qui relèvent du miracle. Ici, on joue avec pas grand-chose : des hésitations, des chuchotements, des silences, des gestes, des regards. Mais le résultat est là : chaque scène est parfaite, le jeu sans faille, le spectateur impressionné. L'écriture du long-métrage n'a aucun défaut, elle non plus : le concept de l'histoire, cette chambre 2046 qui sera métaphorisée, est original et bien pensé, et sert de structure solide à la narration que WKW se construira. Toutes les aventures sont organisées, presque archivées, filmées de façon très différentes. La façon de parler aux femmes qu'a le personnage de Tony Leung est le résultat d'une grande recherche, où chaque mot est minutieusement choisi : par ailleurs, les femmes dans ce film ne sont pas en reste. On sautera de joie à l'idée de retrouver toutes les pointures chinoises que sont Gong Li, Zhang Ziyi, Maggie Cheung, Faye Wong ou encore Carinau Lau. Toutes magnifiques, portant des costumes intemporels, elles sont filmées par un maître en la matière, qui choisit minutieusement ses positionnements de caméra, ses vitesses d'obturateur, ses focales, pour magnifier ces stars. On pourrait regretter d'en voir certaines plus que d'autres, mais les perstations livrées confortent le public : Zhang Ziyi, plus sobre que jamais, assure une de ses meilleures performances, Gong Li en reste à son habituelle et suffisante excellence. Tony Leung, quant à lui, est tout simplement un surdoué du jeu de l'acteur, où tous les aspects de son personnage torturé ressortent parfaitement sur son visage et ses paroles. Aussi maîtrisé que In the Mood for Love, 2046 est une leçon pour tous.