Quelle claque! Voici la première grosse surprise de l’année avec ce petit film britannique délicieux et mémorable. Et en plus il faut préciser que c’est une première œuvre, ce qui impressionne d’autant plus. Barantini se sert de son expérience passée de chef de cuisine dans un grand restaurant huppé londonien pour nous inviter à une soirée plus qu’immersive dans un lieu illustre lieu culinaire de la capitale britannique dont on ne connaîtra pas le nom. Et c’est peu dire que cette expérience cinématographique est une sacrée réussite, intense et fascinante, qui ne nous lâchera pas durant plus d’une heure et demie sans aucune baisse de rythme. Réaliste et captivant, « The Chef » nous happe dès ses premières minutes pour nous scotcher sans discontinuer jusqu’à son final, certes un peu brutal. Mais il fallait bien terminer ce tour de force à un moment ou à un autre. Autant une leçon de mise en scène qu’une leçon d’humanité, ce film est un véritable plaisir de chaque instant sous tension permanente.
On ne peut parler de « The Chef » sans vanter l’incroyable plan-séquence qui le constitue. Un choix de réalisation qui, pour une fois, n’est pas qu’un moyen d’en mettre plein la vue. Il le fait, certes, mais c’est surtout totalement adapté au sujet et c’est ce qui permet une immersion totale dans ce microcosme si particulier qu’est un restaurant, des cuisines à la salle en passant par sa clientèle variée. Il y a peu d’œuvres qui sont véritablement faites d’un seul plan-séquence, réel ou présumé, et c’est peut-être dans celui-ci que ce procédé est le plus justifié. « 1917 » s’était doté d’une telle méthode, mais elle était trafiquée de l’aveu même de Sam Mendes. De même facture et sans trucage, on se souvient du tout aussi magistral film allemand « Victoria » qui, lui, prenait les apparats du thriller. Ici, on débute le service du restaurant caméra à l’épaule sur les traces du personnage principal – le chef du titre donc – et on ne quittera plus ce restaurant sans une seule coupe, Barantini passant d’un serveur à un plongeur, d’un client à un barman, permettant à chaque poste de se préparer à la séquence suivante dans un ballet humain épatant. Une vraie chorégraphie d’hommes et de plats, un ballet culinaire impressionnant et addictif.
« The Chef » peut en outre se féliciter et se galvaniser de l’implication de tous ses comédiens. On suppose des heures de répétition mais à aucun moment l’interprétation laisse à désirer ou sent l’improvisation. Peu importe le nombre de prises uniques incombant à ce plan-séquence qu’a dû filmer Barantini pour aboutir à celle que l’on voit sur le grand écran, mais une chose est sûre, la distribution ne faillit à aucun moment. Mieux, elle impressionne, avec une mention spéciale à Vinette Robinson. Avec ce long-métrage, il nous propose un condensé de ce qu’est un service dans un restaurant. Et on le vit. Tous ceux qui officient dans ce domaine verront la finesse et le réalisme du regard (de l’opposition salle/cuisine aux clients impossibles en passant par le stress perpétuel d’une soirée remplie). Ce huis-clos culinaire est virtuose, comme une sorte de prouesse technique doublée d’un révélateur de l’humanité. En effet, c’est un peu le petit théâtre de la vie disséqué dans un lieu en temps réel. La puissance dramatique est incroyable et même si, en si peu de temps, le scénario semble un peu chargé, tout reste tout à fait crédible et possible. Un plat de cinéma impressionnant et mémorable et surtout un délice de chaque instant pour le spectateur. Une expérience de cinéma magistral.
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