L'idée de base du film, mettant en avant la théorie délirante du psychiatre norvégien Finn Skårderud (qui existe réellement !!) était vraiment incroyable, originale et bien pensé !
Le pari était d'ailleurs plutôt risqué car le thème autour de l'alcool et le propos tient quand même en équilibre sur un fil très fin et dangereux, puisque le propos du film apparait comme une célébration de l'ivresse et un certains éloge de l'alcool, qui montre qu'il mène à un état de libération de soi et permettrait (ou aiderait au minimum) à atteindre son meilleur potentiel de soi, en tant qu'individu, sur le plan intellectuel et relationnel. Même si le scénario intègre en contrebalancement
une mort
et un désespoir profond lié à l'alcoolisme, cet arc intervient seulement lorsque la consommation dépasse plus d'1g/L ... on sent tout de même que le film, de façon globale, positive l'alcool et l'ivresse et c'est ce message qui ressort clairement et que l'on retient en fin de séance, surtout avec la scène de conclusion. Et c'est vrai que personnellement, après la projection, je n'avais qu'une envie, c'était de boire ! J'ai donc un petit sentiment négatif sur le vrai sens et le vrai fond du film, qui peut-être interprété abusivement par certains spectateurs.
J'ai bien aimé le ton en tout cas, qui mêle pas seulement du drame mais aussi beaucoup de touches humoristiques ! Les scènes du prof d'histoire alcoolisé face aux élèves sont mémorables, celle du montage successif de chefs d'états par totalement à jeun, l'est tout autant, et permet vraiment de donner des inspirations et bouffées d'air frais face aux litres d'alcool déversé durant tout le film. C'est d'ailleurs un autre point fort du film aussi, le fait que malgré la répétition d'actions et de comportements des personnages avec l'acool, il n'y a jamais ce sentiment de redites et de répétitions à l'image, toute la mise en scène et le choix des plans permet de diversifier et densifier la consommation d'alcool des différents personnages sans rentrer dans une mécanique visuelle bouclée. Au contraire les choix visuels des scènes de consommation se renouvellent et sont donc bien filmés.
Côté casting, c'est brillant. Mads Mikkelsen en tête, toujours bluffant de profondeur et de prestance, qui par un simple regard transmet énormément d'émotions et de nuances de jeu ! Mais en réalité, c'est une mention spéciale générale pour le quatuor d'acteurs, car jouer l'ivresse n'est pas aussi facile qu'on le pense ! Et c'était clairement réaliste et bien incarné, surtout qu'il fallait bien maîtriser les différents degrés d'ivresse et qu'on puisse vraiment voir une différence et une évolution dans le degré d'alcool consommé et les effets implacables qui s'en suivent sur chacun d'eux ! Cela reste une performance d'acting, et il faut le saluer ! Performance qui n'aurait pas pu être réussie sans une parfaite maîtrise de la direction d'acteurs, et là c'est vraiment un gros big up au réalisateur Thomas Vinterberg, car on perçoit réellement l'évolution de leur état au fil du temps, de façon claire et flagrante, une décadence contrôlée et bien dirigé !
Je trouve par contre juste dommage et dommageable d'un point de vue scénaristique d'avoir associé 4 hommes pour ce trip alcoolique, relayant les femmes seulement au second plan, qui n'apparaissent alors que subissant les actes de leur compagnon, ce qui doit certainement constituer le schéma le plus représentatif concernant les problèmes d'alcoolisme mais j'aurai aimé qu'on comprenne que ce problème touche aussi des femmes et mères de famille, et ne pas le faire figurer comme un mal qui laisse à penser qu'il est exclusivement masculin.
Je terminerai par souligner la grande qualité de la BO du film, musique qui est juste géniale et entraînante. Signée par Scarlet Pleasure, trio danois de musique pop formé d'Emil Goll (le chanteur), d'Alexander Malone (à la basse) et de Joachim Dencker (à la batterie), et intitulée "What a Life" ! Elle est d'autant plus réussie qu'elle reste en tête et qu'elle permet d’accoler une identité forte au film et à certaines scènes. Elle permet d'ailleurs de conclure magiquement le film avec cette scène de conclusion dansante absolument géniale, permettant de finir dans un feel good... imbibé ! Un film maîtrisé et réussi malgré une thématique borderline qui ne doit pas être mal interprété ! C'est davantage une éloge à la vie et un encouragement au laisser aller qu'à la consommation excessive d'alcool ! Peut-être manquait-il "modération" au casting du film, mais le visionnage du film, lui, est à consommer sans excès !