Les 400 coups
Depuis 1994, James Gray nous a rarement déçus – à part peut-être avec le trop fumeux Ad Astra -. Depuis 1994 et Little Odessa, Gray nous raconte, même par des voies détournées, son histoire personnelle. Mais ces 115 minutes sont certainement celles qui dévoilent le plus intimement notre cinéaste. L’histoire très personnelle du passage à l’âge adulte d’un garçon du Queens dans les années 80, de la force de la famille et de la quête générationnelle du rêve américain. Avec ses critères habituels, noirceur du propos, beauté de la photographie et présence d’un casting de grande qualité, il reste fidèle à lui-même. Superbe !
Après des échappées dans la jungle puis l’espace, Gray revient à ses premières amours avec son New-York natal et en particulier le quartier populaire du Queens. Je voulais rentrer à la maison, et faire un film qui serait le plus personnel possible a-t-il déclaré. Il revisite son enfance en nous faisant partager le quotidien de sa famille, son frère aîné, son père, fils de plombier, qui, après une enfance difficile, est parvenu à se hisser dans la classe moyenne en devenant ingénieur, sa mère, enseignante et présidente de l’association des parents d’élèves. Mais le personnage central pour le jeune garçon, c’est son grand père auquel il voue une admiration sans bornes. Les thèmes du racisme sont traités avec beaucoup de subtilité, à travers le regard d’un jeune garçon qui découvre que la race et la classe sociale octroient le bénéfice du doute, et donnent droit à une deuxième chance, voire une troisième. Ce film est bouleversant et, encore une fois, on se demande comment il a pu repartir bredouille de Cannes. Un drame amer et lucide sur la perte de l’innocence.
Anne Hathaway et Jeremy Strong, sont parfaits dans les rôles des parents. Anthony Hopkins, comme toujours, est formidable. Quant aux jeunes Banks Repeta et Jaylin Webb, ils nous amusent et nous bouleversent tout à la fois. A noter la furtive apparition de Jessica Chastain dans le rôle de Maryanne Trump – sœur de… -, dont le discours ne laisse aucun doute sur les orientations politiques de sa famille. Loin des grandes envolées lyriques des tragédies précédentes de James Gray, on est conviée à une balade mélancolique dans le Queens de la Grosse Pomme des 80’s, au cours de laquelle il nous raconte deux mois fondateurs de son enfance. La photographie de Marius Khondji sublime ce film magnifique et donc… incontournable.