« Nomadland » est certes magnifique au niveau des images, avec en arrière-plan ce rapport de dimension, entre l’infiniment petit du grain de sable que nous sommes et ces paysages grandioses à perte de vue...
Il reste pourtant la dimension humaine, celle qui à priori était l’enjeu de la réalisatrice Chloé Zhao, et là, on se perd un peu en conjectures, tant le personnage pourtant intéressant de Fern reste hermétique au possible...
Rien ne permet en effet d’entrer dans le mental de cette personne et de comprendre véritablement ce choix de vie, cette fuite en avant qui l’empêche de s’attacher à un lieu, de même qu’à ceux qui l’approchent en lui témoignant de l’affection, de l’amitié, comme si dès qu’une possibilité de se poser enfin devait inévitablement être sabordée par elle-même.
Alors que Frances McDormand aurait pu donner bien plus de force et de conviction à cet être en rupture resté sur la touche.
Si bien, que petit à petit, on a de plus en plus de mal à s’attacher ou s’identifier en tant que spectateur à cette femme devenue nomade, dont on ne connaît presque rien.
De même que tous ses compagnons de route, tous des éclopés de la vie, ont aussi vécu la terrible épreuve de la maladie et de la mort, sans qu’aucun d’entre eux ne renvoie un message plus positif, ne serait-ce que par un choix délibéré de vivre ainsi et de s’y sentir bien.
On reste sur l’idée que ce choix l’est par défaut, alors que quelques jeunes itinérants auraient pu faire la différence en évoquant leurs profondes motivations.
La tonalité très noire et plombée l’emporte ainsi et on aurait donc juste aimé de temps en temps une lueur d’espoir, un horizon plus dégagé à l’image de ceux superbes que l’on découvre de manière un peu trop contemplative.
Peut-être que le scénario n’est pas assez construit, qu’il manque aussi une véritable histoire à ces femmes et hommes toujours attirés par un autre lieu, un autre environnement pour en faire un film totalement abouti.
De plus, Fern semble rester délibérément seule quoiqu’il arrive et même lorsqu’elle se trouve dans des lieux publics qui restent étonnamment toujours déserts.
On y verra sans doute de la part de la réalisatrice une volonté d’isoler son héroïne, de la magnifier également mais à force d’insister sur ce point, son film en devient trop sombre, alors que le nomadisme tel qu’il est montré aurait pu donner matière à reflexion, et surtout l’occasion de croire à un monde meilleur, et d’espérer ainsi une autre philosophie de vie...
Ici, on quitte Fern qui vadrouille toujours et toujours sans savoir pourquoi, comment et jusqu’où...
On aurait tant aimé la comprendre, l’accompagner, et rêver avec elle...