Oui, vraiment Nomadland mérite plus qu'un détour et Frances Mcdormand vaut le voyage! L'air de rien, ce vrai-faux documentaire dévoile une face cachée de l'Amérique. Oui, le point de rupture de ces vies de travailleurs âgés est la crise de 2008, mais le sujet est ailleurs, car nous ne sommes pas en Europe, et encore moins en France. On voit brièvement les entrepôts Amazon, mais le propos ne vire pas au politique, et s'intéresse plutôt à la vie itinérante de ces marginaux de l'américan way of life. Un choix qui s'est imposé malgré eux, par nécessité économique, puis qui devient un mode de vie volontaire, une sorte de retour à l'esprit pionner américain. Pour survivre en dessous des radars, la solidarité, la débrouille, une vision positive de la vie sont de mise, et Fern les incarne avec pudeur et détermination. Les tentations existent pourtant de revenir dans le droit chemin, par exemple
habiter chez sa sœur, ou de répondre à l'invitation de l'ex routard Dave,
mais non le souvenir de la vie passée avec Bo, le mari trépassé, l'horizon désertique, sont les plus forts et attirent ces lonesome people comme une lumière attire les insectes. Ce scénario de qualité s'accompagne d'une photographie grandiose, mais sans trop en rajouter, d'une bande son apaisée, et des acteurs non-professionnels criant d'humanité (Swankie et Linda May). Qu'une actrice non maquillée, non liftée de soixante ans peut être belle, parce qu'elle assume pleinement son physique, et ne perd rien de son sourire espiègle. Vous nous l'aviez expliqué à Lyon lors du Festival Lumière en 2019, Frances, vous tenez votre parole, quel plaisir pour nous. Cinéma - juin 2021