Apocalypse now, réalisé par Francis Ford Coppola
Considéré par la plupart des cinéphiles comme un véritable classique du cinéma Apocalypse now a tous les traits d’un grand film, d’un casting d’exception à un tournage légendaire, le chef d’œuvre de Francis Ford Coppola est un film à voir et à revoir malgré ses trois heures vingt quelques peu dissuasives. Le tournage plus que compliqué auquel a dû se confronter Francis Ford Coppola l’a contraint à couper et remplacer de nombreuses scènes prévues à la base au montage. Cependant il s’est repenché sur son film en 2000 pour nous reproposer la version définitive souhaité dite « version redux », c’est donc bien de cette dernière version que traite cette critique.
Apocalypse now est donc un film sur la guerre du Vietnam (1955-1975) réalisé par Francis Ford Coppola dans lequel on suit le périple du capitaine Willard qui a pour mission de remonter un fleuve au plus profond de la jungle Vietnamienne afin de retrouver et d’éliminer un compatriote, le colonel Kurtz, déclaré fou aux méthodes dérangeantes. Au cours de son voyage le capitaine Willard étudie le dossier de sa victime, et découvre un homme très différent de celui qu’on lui avait décrit. Coppola nous fait parvenir parfaitement les horreurs et la folie de la guerre par les comportements de ses personnages et les situations auxquelles ils sont confrontés, tous les personnages y compris Willard et son équipage semblent avoir une plus ou moins grande part de folie contractée à cause de la guerre et ses horreurs dont ils participent. Les accusations de méthodes malsaines envers le colonel Kurtz semblent démesurées en vue des circonstances, le colonel Kurtz est-il donc réellement fou ou extra-lucide c’est la grande question sans réponse que nous pose ce film …
Francis Ford Coppola s’est associé avec John Milius et Michael Herr afin d’écrire ce film librement inspiré d’une nouvelle de Joseph Conrad Au cœur des ténèbres, parue en 1899, un titre qui sera repris pour nommer le documentaire sur les coulisses du film, réalisé par la femme de Francis Ford Coppola, Eleanor Coppola. Ce tournage est considéré comme un des plus mémorables par le monde du cinéma. Décidant de produire lui-même son film Coppola et sa famille embarquent pour tourner aux Philippines, prévu pour durer 6 semaines, le tournage s’est étalé sur 16 mois au total, entre mars 1976 et août 1977. L’équipe du film a dû faire face à rien de moins qu’un ouragan, la crise cardiaque de l’interprète principal, Martin Sheen, l’attitude de l’inimitable Marlon Brando, payé trois millions de dollars pour le rôle, qui ne connaissait ni son texte ni le script ainsi que des problèmes de drogues divers et variés, d’après les rumeurs Francis Ford Coppola payait quelques-uns des 600 membres de l’équipe techniques en alcool ou en drogue. Les hélicoptères qui participent à la scène culte du film étaient de véritables hélicoptères de combats appartenant à l’armée du dictateur Philippin Ferdinand Marcos qui avait passé un marché avec Francis Ford Coppola, cependant ceux-ci étaient très souvent réquisitionnés en plein milieu du tournage pour aller combattre les rebelles communistes au Sud du pays. Coppola s’est également heurté à des problèmes de casting lorsque ni Steve Mcqueen, ni Jack Nicholson, ni Al Pacino, qu’il avait déjà dirigé dans Le Parrain, n’acceptèrent d’incarner le capitaine Willard, refusant de passer 6 semaines dans la jungle, rôle finalement attribué au très convainquant Martin Sheen. Ce film a entrainé Francis Ford Coppola dans de terribles tourments ne trouvant pas de fin, ni début, à son scénario, il en existe d’ailleurs plusieurs selon les versions, il voit sa vie et sa carrière pas loin d’être complétement anéanties par tous ces problèmes de tournages, de budget et de casting, il aurait même menacé de se suicider à plusieurs reprises. Et les problèmes d’Apocalypse now ne se sont pas limités seulement au tournage, puisque le montage du film aura duré près de trois ans. Coppola déclara plus tard au festival de Cannes de 1979 « Ce n’est pas un film sur le Vietnam, c’est le Vietnam ». Ces multiples anecdotes sur le tournage et l’implication du réalisateur rendent ce film d’autant plus épique et il ne saurait pas ce qu’il représente aujourd’hui dans l’univers cinématographique sans les problèmes et les difficultés auxquelles ont été confrontés l’équipe du film.
Francis Ford Coppola décide de ne pas aborder le sujet de la guerre comme la majorité des autres films, il ne tient pas à nous prendre par les sentiments ou nous renvoyer une image positives du soldat américain luttant corps et âme pour la liberté dont nous nous sommes habitués. Même si nous nous attachons aux personnages, ils n’en demeurent pas moins fous et atteints par les horreurs dont ils sont témoins, voir acteurs par moment. La folie des personnages et des situations semblent s’accentuer au fur et à mesure que les protagonistes avancent dans leur quête. Ce qui donne des scènes mémorables, comme l’incarnation de l’imperturbable lieutenant-colonel Kilgore par Robert Duvall, et d’autres scènes qui semblent improbables et pourtant inspirées de faits réels, comme la visite des playmates dans les bases militaires américaines. Le film nous propose un périple au plus profond de la folie meurtrière des hommes et ne nous épargne pas des scènes très dures des horreurs de la guerre. Au milieu de toute cette violence et cette folie le personnage du colonel Kurtz, incarné à la perfection par Marlon Brando, qui a déserté son poste et est considéré comme un véritable dieu vivant par les aborigènes semble comme un paradoxe être presque le personnage le moins perturbé.
Historiquement la guerre du Vietnam a eu de terribles répercutions sur l’image de l’armée américaine, c’est la première fois que les américains peuvent voir presque en direct les dommages causés par leur armée à une population bien moins puissante militairement. Francis Ford Coppola confirme cette violence abusive à travers son film et comme dit précédemment à l’encontre de la plupart des films de guerre américains de cette époque Apocalypse now se démarque par son « antipatriotisme », le film ne cesse de nous montrer les soldats américains non comme de fiers combattants mais se rapprochant plutôt de fous armés tirant sur tout ce qui bouge, une scène glaçante sur le bateau le démontre assez bien, lorsque l’équipage panique à cause d’un simple mouvement d’une innocente non armée et se mettent à cribler de balles sans raisons une famille Vietnamienne innocente. Le réalisateur nous démontre également toute la puissance et l’efficacité du napalm à travers une scène très impressionnante ou l’aviation américaine détruit toute une partie d’une forêt ne laissant aucune chance au Vietnamiens. D’ailleurs Francis Ford Coppola, comme son personnage principal, compatit avec le peuple Vietnamien et nous démontre toute la misère et l’horreur que leur font subir les colons. Ils semblent presque insignifiants et ne font offices que de figurants dans leur propre pays tentant de lutter contre la folie de l’ogre américain.
Apocalypse now est sans aucun doute un très bon, voir un excellent film, malgré quelques petits défauts comme des scènes quelque peu à rallonge qui ne semblait pas forcement nécessaires au vu de la durée du long-métrage, les personnages sont à la fois complexes et attachants, la bande originale, composé par le père de Francis Ford Coppola, Carmine Coppola, est on ne peut plus adapté, le récit est bien rythmé avec de vrais propos de fonds et la réalisation donne des scènes parfaitement cultes, notamment la scène de l’attaque des hélicoptères, qui aura même droit à un hommage par J.J.Abrams dans Star Wars épisode VII. Le film est un véritable monument du cinéma dont il m’est impossible de faire le tour en si peu d’écrit, c’est une œuvre, que l’on aime ou pas, à voir au moins une fois dans sa vie.