Troisième collaboration entre le réalisateur Jean-François Richet et l'acteur Vincent Cassel, après les films sur Mesrine et la comédie "Un moment d'égarement", "L'empereur de Paris" se saisit de la figure historique française d'Eugène-François Vidocq. Cette personnalité marquante a déjà suscité de nombreuses adaptations au cinéma dont la dernière date de 2001 avec Gérard Depardieu dans le rôle titre.
Au début du XIXème siècle, soit en plein règne de Napoléon Bonaparte, un homme se fait un nom en échappant aux autorités de tout le pays. Après sa dernière évasion, Vidocq réussit à se faire oublier sous les traits d'un simple commerçant. Mais, malheureusement ou heureusement pour lui, son passé va le rattraper pour lui faire une proposition des plus étonnantes : celle de rejoindre la police pour combattre les criminels, et ce, en échange de sa liberté.
Visuellement, "L'empereur de Paris" est une réussite ! Les décors et les costumes font de ce polar historique post-révolutionnaire son atout principal. Le cadre est riche, minutieusement détaillé, joliment éclairé et on y décèle la haute exigence de ce budget XXL en terme de film d'époque. Bien entendu, cela participe fortement à l'atmosphère imprévisible des rues parisiennes du début du XIXème siècle. Ruelles sales et dangereuses, marchés bruyants et mouvementés ; c'est avec grand plaisir qu'on circule de décor en décor, au travers des classes sociales et des différents quartiers de Paris. Les dialogues, bien que des fois un peu sommaires et bancals, témoignent aussi de cet autre temps, au vocabulaire singulier.
Mais, pour être honnête, "L'Empereur de Paris" m'a semblé très imparfait et n'a pas su rendre palpitant le destin de cette personnage mythique. Déjà, l'accent est tellement mis sur Vidocq et l'interprétation de Vincent Cassel que quasiment tous les personnages secondaires sont des faire-valoir, souvent anecdotiques. Ils font germer des sous-intrigues, certes, mais au détriment de notre ennui car on a pas eu le temps de s'attacher à eux. D'ailleurs, certaines scènes auraient méritées d'être plus étoffées ou carrément supprimées. Les histoires d'amour, de vengeance ou encore la quête pour la lettre de grâce ne font qu'agiter les marionnettes de ce théâtre d'antan en remplissant le cahier de charges des films à gros budget français. L'émotion est parfois forcée, les scènes de séduction souvent très kitsch.
Niveau jeu, j'ai été plutôt déçu, notamment par les actrices qui manquent vraiment de conviction (la pauvre Olga Kurylenko, on dirait qu'elle comprend rien à ce qu'elle dit). James Thiérrée séduit par son élocution, Patrick Chesnais nous amuse tandis que August Diehl fait superbement face à Vidocq. Ce dernier ne manque pas de charisme et de prestance et c'est vrai que ce rôle lui va comme un gant car il remplit physiquement et dans son jeu, tous les critères pour en faire une interprétation crédible. Tout est là même si on a l'impression qu'il manque l'essentiel. Pour moi, le scénario manque de profondeur, de complexité, d'ambiguïté, d'écho à notre époque (notamment sur la question de la sécurité et de la criminalité, du patriotisme). La trame est trop lisse et prévisible, trop classique. "L'empereur de Paris" aurait pu être une vraie baffe, un récit d'aventures fidèle à la réalité mais aussi divertissant. Là, c'est fun mais on reste en surface la plupart du temps. On finit par focaliser notre attention sur les magnifiques décors, sans vraiment se soucier de l'intrigue. Ha oui, j'ai failli oublier les drôles mouvements de caméra, parfois expérimentaux et inattendus, que Richet à fait subir presque à chaque séquence. C'est parfois vraiment pas beau, car dénaturant le coeur de la scène. Des fois, ça a son charme, car, justement, il nous surprend par un changement de point de vue. Mais il y a pour moi des ponctuations dans la réalisation qui m'ont paru bizarres et maladroites, et le montage aussi s'est avéré assez alambiqué, peut-être par pur soucis de style.
Même si la fin suggère une possible suite que je n'irais pas forcément voir, "L'Empereur de Paris" a le mérite de défendre fièrement une histoire épique et spectaculaire de notre pays. Dommage qu'il se contente juste de faire joli, sans éveiller un peu plus notre intérêt.