On ne peut pas enlever à Gilles Lellouche sa force de réalisation. Ce film, il l’a attendu, chérit, construit au fil de scénarios. C’est comme accoucher d’un souvenir d’enfance ou de jeune adulte, que l’on tendrement couvé. On lui voue une profonde affection, nous piégeant parfois dans un déni. Est-ce encore vif, pertinent, important, si cela sortait aujourd’hui ?
L’amour ouf part donc avec un handicap : son scénario, peu révolutionnaire. Mais tout œuvre mérite d’être racontée, si elle est bien traitée. Ici, nous percevons des incohérences ou des manquements. Si Clotaire (François Civil) est bloqué dans cette histoire d’amour passionnelle, c’est qu’il n’a pas d’autres issues que de penser à elle. Mais Jackie (devenue Adèle Exarchopoulos) a toutes ses raisons d’être passée à autre chose. Alors pourquoi reste-t-elle coincée dans ce refus de vie ? A-t-elle été profondément piquée par l’injustice de sa condition ? Lui a-elle écrit, quand il était en prison ? Est-elle allée le voir ?
Le relais du couple Mallory Wanecque-Malik Frikah en couple Adèle Exarchopoulos-François Civil est difficile. On ne lit pas en eux les mêmes regards, intentions, la même désinvolture pour lui ou finesse pour elle.
On reste frustré d’assister à une œuvre esthétiquement belle, avec un jeu d’acteur où chacun laisse transparaître une grande fragilité dans sa rage de vie et/ou de vengeance ; mais qui ne nous livre pas de grandes émotions.