Johnny a tout. Un travail, une petite amie, de l'espoir et des rêves ; un avenir, qui s'annonce radieux. Car, la vie est belle. Oui mais voilà, il y a cette foutue guerre. Engagé pour accomplir "son devoir" envers la patrie, il quitte sa vie rangée. Comme tant d'autres jeunes, il ne mesure pas ce qui l'attend : La boue, la crasse, les balles et les obus qui sifflent, la peur. De se faire tuer, mais aussi de rencontrer l'autre. L'ennemi. Celui qu'on doit tuer. Qui est-il ? Quelle importance ? C'est l'ennemi. Un pauvre type comme tous les autres, qu'on a embrigadé pour faire le nombre, alimenter l'inextinguible brasier. Qui consume tout, à commencer par les hommes au front. Gravement blessé, réduit à l'état de "légume" incapable de ne plus rien faire - sinon bouger la tête -, mais toujours conscient, Johnny va quitter un enfer pour un autre : être prisonnier de son corps, et de la solitude. On le croit mort ; il est pourtant toujours en vie. Cette situation inouïe provoque d'abord un sentiment d'effroi. Petit à petit, il se mue en désespoir. Quel temps fait-il ? Quelle heure est-il ? Quel jour, quel mois ; combien de temps est passé depuis le jour ou tout est parti en vrille ? Que deviennent les êtres aimés ? Impossible de savoir. Le diagnostique du médecin étant établi, il est inconcevable de le remettre en cause. Et Johnny, qui est toujours là, prisonnier de sa situation. Il peut bien tout tenter, c'est peine perdue. Plus homme, ni jeune amoureux, ni rien du tout ; il est une sorte de chose clouée à un lit, et qu'on maintient en vie car... c'est comme ça, et pas autrement. Telle est l'injustice de cette histoire, portée par quelques scènes d'une extraordinaire humanité. La guerre est une monstruosité qui bousille tout. "Dulce et decorum est pro patria mori" - Il est doux et honorable de mourir pour sa patrie, qu'il disait l'autre, Horace. Mais autant que ça soit les autres, hein. Venant de quelqu'un qui est mort bien tranquille dans son lit cette phrase pourrait prêter à sourire, si son esprit n'avait pas été repris dans tous les discours nauséabonds qu'on nous sert sur la guerre. Quelle plaie.