Une chronique de l’Amérique profonde sur fond de rédemption porté par 2 acteurs au sommet !
Dans une ville du Texas, Joe Ransom essaie d’oublier son passé d’ex taulard, en adoptant une vie ordinaire. Bucheron le jour, alcoolique la nuit, il a enfin l’occasion de pouvoir expier ses fautes lorsque Gary, un gamin de 15 ans cherchant du travail, arrive en ville. Cherchant la rédemption, il va le prendre sous son aile…
Hollywood va mal ! Simple constat avant-gardiste ou réelle souffrance ? Difficile de répondre dans l’immédiat, mais la surabondance de films vantant les mérites de l’Amérique profonde, loin de la prospérité et des paillettes, fait plus peser la balance pour la seconde option. Killer Joe, Les Brasiers de la Colère, Mud, Prince of Texas, Crazy Heart, tous incarnent chacun à leur manière cette volonté qu’à Hollywood depuis quelques années de revenir aux sources de son cinéma, à savoir un cinéma authentique et sincère, qui, souillé par une décennie de blockbusters et le flot d’impersonnalité et de formatage qu’ils drainent, parait comme mourant.
Un cinéma qui loin de l’aspect léché, formaté et scintillant d’Hollywood, se permet d’aborder de manière frontale des questions et des sujets forts tels que la pauvreté, la délinquance, la violence, le tout emballé dans une âpreté sans égale. Et Joe, s’inscrit de manière durable dans cette logique tant ce dernier ne diffère finalement que très peu des œuvres citées auparavant.
Car Joe apparait comme le récit d’un monde, crasseux, agonisant et désarticulé. Un monde ou errent sans âmes et sans but des humains, s’adonnant aux plaisirs et aux pulsions les plus basses et qui ne cherchent qu’à survivre et espérer de plus beaux lendemains. Dans cette errance, remplie de whisky, balles de fusils et maison-close se télescopent deux personnages, radicalement différents, mais qui vont être unis par la même volonté de changement : Joe, être rustre, rongé par le remords et la frustration en quête de rédemption et Gary, qui à la croisée des chemins oscille entre un père alcoolique et violent ou une figure paternaliste, emplie de bienveillance et d’estime, représentée par Joe.
Et au milieu de ce purgatoire grandeur nature aux couleurs du Texas, David Gordon Green, le réalisateur cherche par de nombreuses astuces, à doter son long-métrage d’une identité propre afin d’estomper sa mise en scène un peu trop scolaire et l’aspect trop prévisible de ses scènes, qui rassemble bien évidemment la vie des deux protagonistes, leurs limites et leurs retrouvailles placées sous le sceaux de la camaraderie et de l’estime mutuelle.
Et dans ce domaine, le réalisateur dégaine un atout non négligeable en la personne de Nicolas Cage. Neveu de Francis Ford Coppola qui a osé établir sa carrière sans « piston », Cage est surtout connu pour sa carrière ayant littéralement sombré depuis 2006 et l’infâme Ghost Rider. Raillé de toutes parts, et limité à camper des rôles dans des DTV tous plus impersonnels les uns que les autres, son vécu parait ici comme salvateur dans la mesure où comme son personnage, celui-ci est au bout du rouleau et espère la rédemption qui lui est due après autant d’année de disettes.
Empli de sobriété, et d’une classe folle, Cage parvient à montrer de la meilleure manière possible à ses détracteurs que jadis, du temps de Leaving Las Vegas (1995) et de son Oscar du Meilleur Acteur, il était un acteur respecté, influent et talentueux (chose qui parait inconcevable aujourd’hui me direz-vous).
Toutefois, il ne demeure pas le seul atout de cette fresque rurale car à l’instar du duo Joe-Gary, un autre personnage entre en scène en la personne du décor. En plaçant avec autant d’intelligence que de minutie et sincérité des décors, des sons, des couleurs, des textures miteuses, usées, le réalisateur parvient à insuffler à son film, le cadre nécessaire.
Entre des bars miteux, des routes abandonnées, des villes crasseuses et des maisons insalubres, le décor confère au film ce sentiment d’usure, de rouille, de vieillesse, essentiel pour attester de l’agonie dans lequel ses protagonistes évoluent !
Et malgré une fin prévisible, les émotions demeurent sincères et sans égales. Entre émotion, colère, haine, et sincérité, Joe s’annonce comme l’une des plus belles surprises de cette année 2014 et démultiplie les attentes de voir Nicolas Cage assurer son come-back dans d’autres films !