Deux ans à peine après le carton mondial d'« Une Séparation », Césarisé et Oscarisé au titre de meilleur film en langue étrangère, le scénariste et réalisateur iranien Asghar Farhadi revient en force avec « Le Passé », présenté sur la croisette au 66è Festival de Cannes.
Synopsis Allociné : Après quatre années de séparation, Ahmad arrive à Paris depuis Téhéran, à la demande de Marie, son épouse française, pour procéder aux formalités de leur divorce. Lors de son bref séjour, Ahmad découvre la relation conflictuelle que Marie entretient avec sa fille, Lucie. Les efforts d'Ahmad pour tenter d'améliorer cette relation lèveront le voile sur un secret du passé.
Fier du succès critique et public d'« Une Séparation » à travers le globe – plus d'une soixantaine de récompenses dans le monde – Asghar Farhadi eut le choix pour son cinquième long métrage de réaliser une œuvre avec davantage de moyens. Que nenni ! Le bonhomme jeta son dévolu sur notre cher hexagone pour mettre en scène « Le Passé ».
Passé aisément la difficulté de tourner dans une langue orale qui n'est pas la sienne, Asghar Farhadi met en boîte avec une pudeur incommensurable un film viscéral et poignant, qui transcende un cinéma vérité, un peu à la manière d'une Coline Serreau (« Chaos ») ou d'un Jean-Paul Lilienfeld (« La Journée de la jupe »).
Son récit, assez banal, d'une mère (Bérénice Béjo) confrontée à la dureté des relations avec son ex-mari d'un côté, (Ali Mosaffa) et sa fille de l'autre (Pauline Burlet), est une authentique injection intraveineuse d'émotions pure souche.
« Le Passé » est, en effet, une sorte de polar sentimental qui monte en puissance pour atteindre son point culminant lors d'une confrontation absolument bouleversante entre Béjo et Burlet, venant sonner le glas d'une somme astronomique de non-dits dans cette famille recomposée.
Comme dans « À propos d'Elly », Farhadi exploite les apparences souvent trompeuses pour décadenasser progressivement un dogme chaotique qui n'attendait que d'exploser.
Si « Le Passé » bénéficie d'une tension constante, c'est aussi grâce à la magnifique interprétation de tous ses comédiens. Bérénice Béjo offre une prestation époustouflante, tout en demi-mesure, jamais tire-larmes, et mériterait amplement une récompense Cannoise. Elle est entourée d'enfants – acteurs bluffants, des deux plus jeunes, Elyes Aguis et Jeanne Jestin, à Pauline Burlet, dont le talent frappe le cœur du spectateur à chacune de ses présences à l'écran. Les adultes ne sont pas en reste : Tahar Rahim se montre très bon en conjoint vulnérable lorsque Ali Mosaffa, très juste, essaye tant bien que mal de rétablir une certaine unité au sein de cette famille dysfonctionnelle.
Bilan : « Le Passé », brut et contemporain, devrait logiquement taper dans l'œil du jury, si l'on en croît les chaudes larmes de Nicole Kidman en sortie de projo. Bravo Mr Farhadi, vous rejoignez le panthéon des grands réalisateurs modernes.