La couleur. Le Cadre. La dilatation. Refn avait-il des comptes à régler avec ce film? Un message à faire passer à ses nouveaux fans suite au succès de Drive? Il y a parfois des réalisateurs qui dans leur filmographie on besoin de faire un film à contre pied par peur d'être pris pour ce qu'ils ne sont pas. Une manière de remettre les points sur les i. Refn est libre et n'appartient pas à la caste hollywoodienne. Voilà ce qu'il voudrait nous dire. Ok on l'entend bien. C'est plutôt à son honneur. Mais pourquoi avoir fait Drive dans ce cas là? Est-ce qu'on cracherait pas un peu dans la soupe? Peut-être que j'interprète mal ce film, mais j'émets beaucoup de réserve sur le sérieux de ce projet. Pas que j'accuse le réalisateur de négligence, se serait plutôt l'inverse d'ailleurs, mais oui j'ai bien l'impression qu'il y a beaucoup d'ironies aigres. Lorsqu'il crée l'homme à l'épée-dans-le-dos alors qu'on voit bien que c'est pas possible par exemple. Cette petite fantaisie n'est pas une facilité scénaristique car elle n'apporte rien à l'intrigue. Alors qu'est-ce que c'est? L'insolence d'un réal se sachant maître tout puissant de sa création? Il y a un peu de ça. Mais j'ai aussi le sentiment qu'il a terriblement envie de nous parler de lui. Quel genre d'homme il est. Et pour moi c'est ça qui ne passe pas, c'est-à-dire, les intentions. Toutes histoires racontées, qu'elles soient vécues/inventées par vous ou par un un autre, deviennent personnelles lorsque vous y mettez votre parole. Refn, lui, choisit ses mots avec beaucoup de précaution. La couleur d'abord. Le rouge domine ainsi que le vert. Quelqu'un parlait de Daltonisme. Ca aide beaucoup à comprendre ce film maladif ou le héros est le point faible. Il a des sentiments et a choisi l'argent facile. Relation très ambiguë avec la mère qu'on ne doit surtout pas critiquer sinon il crie. On se demande même s'il ne serait pas un peu impuissant. Il ne couche pas, mais regarde. Il voudrait toucher, mais n'y arrive qu'en fantasme. Alors il tape dans les verres et dans les visages par rage. Le cadre ensuite. Le vide y est au premier plan. Long couloir sans âmes. Le héros a des cauchemars et comme pour se rassurer il allume la lumière et se rend bien compte qu'il n'y a pas de monstre dans le placard, il ne trouve que sa mère. Au second plan, les avant-bras. Signe annonciateur. Des mains tu as fauté, les mains on t'ôtera. Celles qui servent à se battre sur le ring, la place des gens d'honneur en Thaïlande. D'ailleurs mains et yeux souffrent beaucoup dans ce film: cloués, coupés, brûlés, crevés. Le spectateur aussi. La dilatation enfin. Je parle du temps évidemment. Refn prend beaucoup de plaisir à étirer, parfois surenchérir ses scènes d'angles différents montrant toutes les faces d'une même action. La scène très western du héros qui vient voir l'assassin de son frère est assez éloquente. Dilatation inhérente au plan ou effet de montage, le réal ne se précipite surtout pas. Il veut qu'on comprenne. Mais quoi au juste? Qu'il sait faire? Qu'il ne cherche pas l'efficacité du rythme? Qu'il a du style? La réponse doit se trouver quelques parts entre ces trois hypothèses. Peut-être une manière de dire qu'une coupe c'est sacré. On ne sectionne pas un plan comme ça. Il y a presque une valeur morale là dedans. Car au final, toute cette histoire est partie d'un salopard, qui frappe sans raison, qui aime les jeunes filles, qui recherche le sang. On prononce le mot "diable". Et c'est bien ce diable qu'on doit éradiquer. Toute une famille viciée venu pourrir l'étranger. Mais d'où viennent-ils d'ailleurs? Refn règle donc ses comptes avec la Mecque du cinéma. Voilà pourquoi ce film ne passe pas pour moi. Car à part vouloir prouver qu'il est unique et qu'il n'y aura pas de Drive 2, il a perdu de vu ce qui l'a sûrement poussé à faire des films: raconter une histoire. J'espère qu'on ne se méprendra pas sur cette phrase, elle n'est pas synonymes de savoir faire une intrigue bien ficelée, avec du suspens, etc... Non, mais quand même raconter autre chose que son refus d'être une pute. Personne lui demande d'en être une, pas besoin d'essayer de nous prouver le contraire. Message aux groupies de Gosling, écoutez donc les petites révélations de Kristin Scott Thomas, porte-voix de Refn, votre chouchou n'est pas l'homme que vous croyez. C'est un perdant. Et paf dans ta gueule !