Après "Drive", qui était plus ancré dans un genre hollywoodien (thriller urbain, course-poursuite en voiture), Winding Refn revient à quelque de chose de plus abstrait, expérimental, plus proche de "Valhalla Rising" en fait. Une abstraction avec laquelle j'ai eu beaucoup de mal.. Mais commençons par le positif : le cinéaste danois n'a pas perdu son talent visuel, et son film est très souvent un régal pour les yeux : couleurs, lumière, cadrage, ralentis, jeux clairs-obscurs, ... le tout sur une bande-son superbe. Il prend des risques pour proposer quelque chose de différent et surprendre sans cesse le spectateur. Alors, pourquoi ais-je dit "souvent" un régal, et pas tout le temps? Et bien, ceux qui me lisent régulièrement s'en doutent déjà, à cause du même problème, récurrent entre moi et Refn, un problème d'autant plus énervant que je suis chaque fois fasciné par le talent indéniable du bonhomme pour tenir une caméra : le problème de la violence! Comme d'habitude, donc, je trouve qu'il s'attarde un peu trop longtemps sur les cadavres, en proposant toujours une overdose d'hémoglobine, et qu'il répète un peu trop souvent les scènes de souffrances humaines, qu'il s'agisse de combats, de meurtre, ou pire, de torture. Enfin soit, ça, je pouvais m'y attendre. Alors pourquoi avoir moins apprécié ce long métrage-ci par rapport aux deux derniers? Parce que l'abstraction, selon moi, va tellement loin qu'elle en oublie ses personnages, qui semblent du coup un peu trop vains pour que je puisse m'accrocher à eux. Les interprètes font pourtant du bon boulot, surtout Ryan Golsing, dans la lignée de Drive. Certes, il s'agissait aussi d'un personnage plutôt symbolique, mystérieux. Mais il gardait aussi des éléments plus concrets qui permettait de s'intéresser à lui. Ici, les personnages sont bien trop souvent dans le flou : si je prends Julian et Chang, on les voit marcher dans des couloirs, dans des chambres, dans la rue, dans les bars, puis soudainement frapper ou tuer quelqu'un. C'est un peu vide, et même parfois un peu répétitif. Entre ces deux-là, on retrouvera Kristin Scott Thomas, pour un rôle proche du ridicule, de mère dont la seule action est de parler de bites et de chattes sur quelques scènes. Bref, une expérience originale, certes, mais dans laquelle je ne suis jamais rentré. Les inconditionnels de Refn devraient cependant avoir bien plus de chances d'adorer le voyage.