Après un écart bariolé aux pays des merveilles, Tim Burton revient à ses premiers amours en adaptant une vieille série TV américaine inconnue chez nous à base de vampires, de manoir hanté et de loups-garous. Bref, du gothique comme Burton l’apprécie tant, ce qui n’est pas pour déplaire à ses fans de la première heure. Et ce "Dark Shadows" marque effectivement le retour en forme du maître (mise en scène maîtrisé, BO signée Danny Elfman envoûtante, dialogues excellents…), même s’il n’est pas exempt de défauts auquel il ne nous avait pas forcément habitué. Ainsi, le début du film s’avère étonnement poussif alors que le portrait de ce Barnabas Collins (l’inévitable Johnny Depp qui, à défaut d’être surprenant, s’amuse et nous amuse dans une ambiance qui lui sied à merveille) et l’explication de sa malédiction semblait être du pain béni pour le réalisateur de "Sleepy Hollow". C’est lorsqu’il plante l’intrigue dans les années 70 que Burton semble trouver son rythme de croisière, le film mettant clairement l’accent sur la comédie avec la présentation de l’atypique famille Collins et les problèmes d’adaptation d’un Barnabas tout juste réveillé de son 18e siècle à l’Amérique des 70’s pleine de voiture, de télé et de hippies. Sur ce point, le film réussit à éviter le piège de la pochade rigolarde déjà vu mille fois (rien de vraiment nouveau sous le soleil depuis "Les Visiteurs") grâce à l’originalité de ses gags (Barnabas qui défie le M lumineux de McDonalds ou qui trouve que Alice Cooper est la femme la plus laide qu’il ait jamais vu). Dark shadows bénéficie donc d’un décorum superbe pour les fans de la Hammer (le manoir Collins est un modèle du genre) et d’une légèreté de ton appréciable. Il compte également dans ses rangs une galerie d’acteurs exceptionnels qui, malheureusement, souffre d’un temps de présence à l’écran ou d’une importance scénaristique pas forcément à la hauteur de nos espérances, que ce soit la toujours aussi séduisante Michelle Pfeiffer en chef de clan, Helana Bonham Carter en psy cinglé, Johnny Lee Miller en beau-frère magouilleur Chloe Moretz en gamine à fleur de peau, Jack Earle Haley en concierge ou encore Bella Heathcote en fantomatique nurse. Seul l’exquise Eva Green semble être au centre de toutes les intentions du réalisateur et nous offre un numéro de femme jalouse des plus savoureux. Ses duels avec Johnny Depp éclipse cependant un peu trop le reste du casting et empêche le scénario d’explorer certaines pistes pour se perdre parfois en redondances (le petit jeu de "Je t’aime moi non plus" entre Barnabas et Angélique aurait gagné à être allégé de quelques scènes). On pourra également regretter un final un peu trop "sérieux" au vu de la drôlerie du reste du film. "Dark shadows" est donc imparfait mais reste ce qui ce fait de meilleur dans le genre… Sans doute parce que Tim Burton est aujourd’hui le dernier nostalgique des grands films d’horreur classiques de la Hammer.