Shortbus est un film qui semble avoir fait pas mal parler de lui. Métrage aux scènes de sexe non simulées si j’en crois certaines affirmations du réalisateur même, ce qui semble logique d’après ce que l’on peut voir à l’écran.
Bon, je ne vais pas le cacher, je suis resté assez hermétique à ce métrage pourtant encensé par la critique. Peut-être est-ce par sa vision quelque peu directe de la sexualité de la bohème moderne, la teinte indéniablement bourgeoise de ce film, les deux sans doute, de quoi plaire à des personnes peu habitués à voir tant de chair en action !
Honnêtement Shortbus a de bonnes choses. Je caricature un peu, mais il y a quelques moments intéressants quant à l’exposition de la sexualité, la recherche du plaisir, dans la galerie d’individus qui nous est présentée. Pour ma part j’ai trouvé la première rencontre entre la sexologue et le couple gay assez drôle et cocasse par exemple, plutôt subtile, et il y a d’autres moments plus sérieux, plus graves, qui ne manquent pas de relief non plus. Le souci c’est que souvent pour une scène mémorable, on se coltine pas mal de minutes assez vaines, le réalisateur cherchant peut-être à insister sur le caractère underground et auteurisant de son film à renfort de grandiloquence fantaisiste et pas très bien maitrisée (la fin, qui ne vaut pas un bon Brisseau ou même l’orgie de Joy). Shortbus hésite vraiment trop entre le film narratif classique, et le film underground presque expérimental parfois, où le propos disparait, s’efface au profit de séquences qui frôle l’hallucinatoire. Ce que semble souligner une mise en scène parfois trop heurtée d’effets de style gratuit et au montage hasardeux.
En clair, le réalisateur dilue son propos, et c’est d’autant plus ennuyeux que le propos est déjà sérieusement dilué par la masse de personnages. Même si je peux saluer la volonté d’exposer divers cas de figure, certains semblent un peu là pour faire du volume. Je pense au personnage de Lindsay Beamish, qui aurait éventuellement pu rester dans un rôle d’ami de l’héroïne, mais sans plus. Malgré ses efforts, le réalisateur ne semble pas vraiment en mesure de jongler très intelligemment avec tout ça, et il en résulte un métrage assez brouillon, parfois mollasson, mais pas inintéressant. On sent poindre de bonnes choses, et des idées, c’est déjà ça.
Le casting est composé d’interprètes peu connus, dont trois acteurs principaux : Sook-Yin Lee, Paul Dawson et PJ DeBoy. La première campe une sexologue en quête du plaisir sexuel, les deux autres le couple gay qui va la faire venir au Shortbus. Très bonne prestation de la première, qui reste la meneuse du film, avec une interprétation subtile, juste et naturelle. Elle s’investit totalement dans son rôle, et le résultat est à la hauteur. Globalement, l’interprétation reste l’atout de ce film. Si le réalisateur commet des maladresses dans la manière de conduire son récit, de l’architecturé, il peut cependant compter sur des acteurs convaincants, jusque dans les seconds rôles, puisque Lindsay Beamish que j’évoquais ci-dessus est tout aussi convaincante. On sent une réelle complicité et un réel sérieux des acteurs pour offrir leur meilleur, et cela malgré des situations parfois pas simples, et des dialogues qui auraient pu être un peu plus affutés.
Formellement je ne vais pas trop y revenir, seulement dire que si Shortbus n’est pas sans défaut, avec un réalisateur qui semble parfois virer vers le cinéma expérimental et un manque de budget qui a limité très nettement le métrage (j’attendais quelque chose de plus marquant du fameux Shortbus), le résultat ne démérite pas complètement. Et puis le côté assez artisanal des décors n’est pas foncièrement un défaut. Tout dépend comment on l’envisage, mais perso je n’ai pas trouvé cela contre-productif. La bande son en revanche est faiblarde.
En clair, Shortbus est un film imparfait. Pour ma part, c’est un film qui n’a pas vraiment choisi de ligne directrice, et qui semble même hésiter entre l’ancrage réaliste et la réflexion plus métaphysique sur le sexe et l’amour (le Shortbus par exemple ne semble pas avoir d’existence physique réelle). Toutefois, et j’imagine comme chez tout réalisateur qui n’est pas un tâcheron et qui a une vision artistique, le résultat n’est pas antipathique ni raté. L’interprétation excellente jouant pour beaucoup dans la qualité du résultat. 2.5