Peut-on réinsérer les riches ?
Voilà la question – certes un tantinet ironique – que posent les deux comparses, Gilles Perret et François Ruffin. 84 minutes d’une comédie documentaire, avec des rires et des larmes, qui met à l’honneur ceux qui tiennent le pays debout. « C’est quoi ce pays d’assistés ? De feignasses ? » Sur le plateau des Grandes Gueules, l’avocate parisienne Sarah Saldmann s’emporte: « Le Smic, c’est déjà pas mal. » D’où l’invitation du député François Ruffin : « Je vous demande d’essayer de vivre, madame Saldmann, pendant trois mois, avec 1 300 €. - Admettons, mais une semaine, ça sera déjà pas mal. » Cette grande bourgeoise entièrement dopée aux meilleurs restaurants et aux grands couturiers, - oh divine surprise ! – va accepter le défi. Ce qui permet à Ruffin d’infliger à la vibrionnante et insupportable – plus snob, tu meurs ! -, avocate estampillée Paris 8ème, un véritable tour de France des petits boulots, pénibles, mal payés sans lesquels notre pays serait à l’arrêt. Heureusement pour elle, le ridicule ne tue pas, sinon…
On s‘amuse beaucoup aux mésaventures de la blonde sapée « grande maison », lors de ses diverses rencontres avec un livreur, une aide à domicile, le personnel d’une entreprise de conditionnement de poissons, des personnes chargées de distribution d’aide alimentaire… etc. la liste est longue et savoureuse. Oui, on s‘amuse, mais l’émotion est souvent là, forte, réelle, devant ces gens qui parfois, pour des salaires de misère, aiment ce qu’ils font et déclarent parfois faire « le plus beau métier du monde ». Il faut avouer que Mme Saldmann joue le jeu et ne se contente pas d’observer, Ruffin la fait participer à chaque fois en lui faisant exécuter des tâches qu’elle n’assure sûrement pas chez elle. Je dois dire, que l’épisode - qui se situe à peu près au milieu du périple -, où elle retrouve son milieu « naturel » - difficile d’écrire ce mot -, rend le personnage réac et son mode de vie encore plus intolérables entre le croque-monsieur à 57 € et la petite veste à 2350 €, il y a de quoi tomber à la renverse. Ruffin continue, sans se lasser, son entreprise de « lanceur d’alerte », avec son cinéma-vérité. Et c’est un régal. Alors, les riches sont-ils réinsérables ou sont-ils indécrottables. Réponse en 84 minutes à ne pas rater.