C’est mon premier film d’Aki Kaurismaki et, en toute honnêteté, je pense que ce sera certainement mon dernier… Alors attention, je n’entends pas vomir ce film sous prétexte qu’il ne rentre pas dans le moule classique qu’on voit partout. Loin de moi l’idée : bien au contraire. Moi le premier, j’adore quand on sort des sentiers battus. Seulement voilà, quand on nous invite sur un autre sentier pendant une heure et demie, ce qui serait chouette, c’est d’aller un peu plus loin que les premiers mètres. Parce que oui, cette introduction très énigmatique et minimaliste, multipliant les anachronismes et les contre-pieds, m’avait clairement séduit au début… Oui, mais seulement au début… Parce que bon, une fois dix minutes passées, tout ce que Kaurismaki avait à nous proposer, il l’a déjà mis sur le tapis (le parallèle entre la situation sociale de la France d’hier et d’aujourd’hui ; le parallèle entre la chasse aux clandestins et la chasse aux Juifs et surtout, le parallèle entre le cinéma d’hier et celui d’aujourd’hui). Faute d’avoir du neuf à proposer, ne reste du coup pour tout le reste du film que la longue application d’une démarche qui tourne en rond, tirant le fil conducteur d’une intrigue bien famélique, et face auxquelles le parti-pris formel se transforme progressivement en lourdeur qui empêche au spectateur de s’impliquer totalement dans l’histoire. Parce que bon, cette direction d’acteurs qui rappelle les vieux films théâtraux d’autrefois, ça passe pour André Wilms, mais c’est quand même une sacrée plaie pour tous les autres membres du casting (mention spéciale d’ailleurs pour l’actrice finlandaise Kati Outinen qui, s’efforçant de bien articuler une langue qu’elle ne comprend pas, devient aussi convaincante dans son rôle qu’une horloge parlante). Bon alors OK, c’était audacieux, et tout le monde saura apprécier les multiples clins d’œil nostalgiques fait au cinéma et aux périodes d’autrefois. Mais bon, un décor ne fait pas un film. Enfin si, la preuve avec ce « Havre »… Un décor peut suffire à certains et tant mieux : ils apprécieront surement ce film. Moi, je fais partie des gens qui considèrent qu’un beau décor n’empêche pas une belle intrigue, une belle réflexion, un beau propos, une belle dynamique… Or oui, au milieu de tout ce qui se fait autour en termes de cinéma, pour moi, ce film « Le Havre », c’est une vraie purge…