Mon avis : Les couleurs se déplacent à l'écran. Les costumes se dévoilent, véritable farandole de vêtements, se froissent, travaillés avec goût, où paraît la beauté frappante des textiles. Les décors, majestueux, se dressent, immenses, devant les personnages. Ceux-ci se placent, mouvement géométriques de leurs pas, classe incarnée, allure distinguée, et prennent la pose, au milieu de paysages somptueux. Et le spectateur, lui, regarde. Regarde ce qui est peut-être la plus remarquable définition du cinéma. Contemple. Découvre. Sa beauté froide, glaciale, tragique. Funèbre. Chaque plan paraît comme un tableau d'époque, où éclate sa symétrie, sa grandeur, sa virtuosité. Dans chaque visage se dessine cette même impression de perte inévitable. Cette fin. Cet échec, qui résonne et qui effraie chaque homme détruit par sa soif. Sa soif de pouvoir, de richesses, d'amour, qui le transformera en brute. On retrouve le même pessimisme qui obstine tant Kubrick. La même mélancolie oppressante. Le même combat torturé opposant les multiples facettes de l'être. Barry Lyndon est une oeuvre d'une grande beauté, gravement désincarnée, méditant douloureusement et constatant d'un regard triste la défaillance humaine et de ce qu'il en reste dans une société corrompue, s'éteignant, fondant comme une simple bougie. Une simple bougie, à la flamme dansante éclairant les nombreuses peintures où éclatera, à jamais, la froideur d'un monde courant à sa perte. 20/20.