Un des films majeurs de Stanley Kubrick remonte à 1975, l'histoire d'un jeune homme frustré, blessé par l'amour et sa nature complexe, qui décide de prendre sa revanche sur la société en y gravissant tous ses échelons. Au départ naïf et amoureux, fougueux et maladroit, il se métamorphose peu à peu en une créature diabolique, et en arbore tous les aspects: il finit, à force d'infidélité, de malhonnêteté et de perversité, en dépravé, une jambe en moins, sa gloire et sa fortune derrière lui, l'amour détruit par son égoïsme, sa femme magnifiée par la tristesse et la pureté de sa beauté. Rythmé par la sarabande de Händel, toutes ces aventures romanesques, endiablées, nous entraînent dans un dédale de relations, de faux-semblants, de bonté, de vilenie, de promesses, de trahisons. Du personnage arriviste, ambitieux et antipathique qu'est Barry Lyndon, massacré par sa propre gloire, son propre pouvoir, c'est toute une époque, tout un monde que s'applique à représenter Kubrick, avec ses coutumes, ses mentalités, ses vices et ses vertus. La caméra est invariablement immobile: elle fixe chaque scène comme un tableau, où la vie ne fait que passer avant de déserter les lieux et de laisser dans son sillage les traces essentielles des passions de l'humanité dans sa plus grande diversité, son plus grand flamboiement.