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    Alain Delon : "J’aurais voulu, avant de mourir, faire un film sous la direction d’une femme"
    Brigitte Baronnet
    Passionnée par le cinéma français, adorant arpenter les festivals, elle est journaliste pour AlloCiné depuis 13 ans. Elle anime le podcast Spotlight.

    Dans un long entretien pour le journal Le Monde, Alain Delon revient sur sa carrière et évoque le cinéma d'aujourd'huin et mentionne un regret, celui de n'avoir jamais tourné sous la direction d'une femme.

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    C'est un entretien fleuve qu'Alain Delon a accordé à nos confrères du Monde, dans lequel il parle avec beaucoup de sincérité de ses débuts, sa carrière, et sa vision du cinéma d'aujourd'hui. Personnage entier, Alain Delon n'hésite pas à dire ses quatre vérités, notammment sur le cinéma d'aujourd'hui pour lequel il n'est pas tendre.

    Morceau choisi : "Le cinéma a changé, les stars ont changé. Avant moi, il y a Jouvet, Gabin, Montand. A mon époque, qui n’est plus royale, je rencontre en tant que môme des auteurs comme Michel Audiard ou Pascal Jardin, qui écrivent pour des stars. Je vais vous dire, quand je commence, en France, on est cinq copains, les cinq doigts de la main, Jean-Paul Belmondo, Jean-Pierre Cassel, Jean-Louis Trintignant, Jean-Claude Brialy, et le petit dernier, tout jeune, Alain Delon. Jean-Claude est mort. Jean-Pierre est mort. Trintignant va très mal. Jean-Paul va bien, mais finir sa carrière comme lui, c’est dur. Quand Jean-Claude et Jean-Pierre sont morts, cela me fait beaucoup de mal, et lorsqu’un autre partira, cela me fera encore plus de mal. Aujourd’hui, qui écrit pour des stars ? Personne. Ils écrivent pour du pognon, sur un sujet. Gabin dit un jour : faire un film, ce n’est pas compliqué, il faut un sujet, et si vous avez le sujet, vous avez l’argent, la production, les acteurs. J’ai l’impression qu’aujourd’hui la seule chose qui manque c’est le sujet. A l’époque, Audiard écrit pour Gabin. Je ne parle pas pour moi, je ne suis plus dans le coup, mais, aujourd’hui, qui écrit pour qui ? Je vous pose la question sur la disparition des stars. Est-ce lié à l’époque, ou est-ce le cinéma d’aujourd’hui qui a pris un virage ?

    Je tombe dans ce métier grâce à des femmes. Ce sont elles qui me font faire du cinéma

    L'acteur fait aussi part d'un regret, celui de n'avoir jamais tourné pour une femme : "Il y a une seule chose, mais ce n’est pas pour ça que je tournerais, qui m’a manqué et me manquera toujours : j’aurais voulu, avant de mourir, faire un film sous la direction d’une femme. Vous vous rendez compte, ça ne m’est jamais arrivé. Il y a Lisa Azuelos, Maïwenn, je l’ai dit à tout le monde, personne n’a bougé. Je l’ai dit, écrit, personne ne s’est manifesté, elles doivent avoir peur." Cette interview accorde une large place aux femmes justement. Delon confesse : "Je tombe dans ce métier grâce à des femmes. Ce sont elles qui me font faire du cinéma. Ce sont les femmes qui me veulent, me font, me donnent tout, des femmes tombées amoureuses de moi. Elles ont, minimum, six ou sept ans de plus que moi. Je veux voir alors dans les yeux de ces femmes que je suis le plus beau, le plus grand, le plus fort, et c’est pour ça que je deviens acteur." 

    Je suis capable de faire n’importe quoi aujourd’hui. Mais il faut vraiment – excusez-moi – que je bande ! Sinon, j’en ai rien à foutre.

    Alain Delon explique également que le cinéma, c'est à présent terminé pour lui : "J’ai toujours été marqué par ce qu’on appelle en boxe le « combat de trop ». Je ne veux pas faire le combat de trop. J’ai une carrière tellement exceptionnelle que je ne veux pas faire le film de trop. Les cinéastes avec qui je pourrais tourner sont morts. J’ai arrêté il y a dix ans déjà avec Astérix. Qu’est-ce que vous voulez que je foute ? Comme disait Gabin, si l’on m’apporte aujourd’hui un film, mais qui ? Avec qui ? Luc Besson ? Il sait depuis longtemps que j’ai envie de travailler avec lui, mais j’ai appris qu’il a une sorte de crainte. Il a peur ? Je ne sais pas. Polanski ? Il n’a pas pris contact avec moi. 

    Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? On a raconté tellement de choses sur moi. Comme si c’était moi qui avais fait tous ces films géniaux. Avec Clément, avec Visconti, avec Melville, j’ai fermé ma gueule, j’ai fait ce qu’on me demandait et du mieux que je pouvais. Je n’ai jamais dit à Visconti et à Clément comment me placer. Je suis capable de faire n’importe quoi aujourd’hui. Mais il faut vraiment – excusez-moi – que je bande ! Sinon, j’en ai rien à foutre. Je vous jure, aujourd’hui, je ne vois pas qui pourrait me faire faire un film. Ou alors il faut me présenter une histoire à crever."

    Le projet annoncé avec Juliette Binoche, avec Patrice Leconte à la réalisation, ne devrait finalement donc pas avoir lieu.

    Un entretien à retrouver en intégralité dans les colonnes du Monde.

    Astérix aux Jeux Olympiques, sorti en 2008, devrait donc être le dernier long métrage d'Alain Delon :

     

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